Une géante portant le voile intégral devait défiler lors du carnaval de Roubaix, mais les organisateurs ont du finalement renoncer à l'événement. Ce projet artistique avait reçu une subvention du Conseil Régional.
La géante baptisée "Miss Burqa" ne connaîtra pas les joies de la "parade du 32 mars", le carnaval "décalé" qui devait avoir lieu le 1er avril à Roubaix. L'événement a été annulé sur fond de polémique quant à la présence de cette égérie d'un genre très particulier. Une polémique jugée disproportionnée par son concepteur, l'artiste Thierry Verbeke. "C'est un faux procès", estime-t-il. "Moi je la voyais comme une espèce d'objet pacificateur qui pouvait réconcilier à un moment deux types de folklore. Mais c'est un peu l'inverse qui se passe..."
Cette géante avait provoqué la colère du conseiller régional UMP et maire de La Madeleine, Sébastien Leprêtre. Pour lui, il s'agissait d'une "véritable provocation". L'élu nordiste s'étonnait notamment que ce projet artistique ait pu bénéficier de subventions de la région. "Il y a clairement eu un bug, il faut savoir le reconnaître" réagit-il aujourd'hui. "On a évité que cette "Miss" puisse sortir publiquement, on n'est pas passé loin d'un bug avec un "B" majuscule. Il y a un bug au niveau du fonctionnement du Conseil Régional. Ça suscite des questions et il faut qu'elles trouvent des réponses".
Une bourse de 8 000 euros du Conseil Régional
Dans une délibération publique datée du 4 juillet 2011, le Conseil Régional du Nord Pas-de-Calais avait décidé d'allouer une bourse de 8 000 euros au créateur de "Miss Burqa". "Le projet de création présenté par l’artiste est intitulé « Aujourd’hui c’est permis ». Il s’agit d’un géant représentant une femme revêtue d’une burqa", peut-on lire dans cette délibération qui donne un avis favorable au projet. "Ce projet s’inspire de la loi belge qui précise qu’il n’est pas permis d’avoir le visage couvert dans l’espace public sauf les jours de carnaval. Avec ce projet, propose de réconcilier ces deux folklores et aborder ainsi le mythe des géants, mythe fondateur chez nombreux peuples et qui a à voir avec les affects et les émotions et comporte une forte part d’ambivalence. Il souhaite que ce géant trouve sa place à la fois dans des lieux consacrés à l’art contemporain et qu’il puisse également sortir ce géant dans des manifestations publiques et grâce à un travail de médiation utiliser cette création pour travailler sur la décrispation face aux problèmes identitaires".
Selon Nord-Eclair, c'est le refus de financement d'une structure roubaisienne, le Fonds de participation des habitants (FPH), qui a définitivement plombé "la parade du 32 mars" et sa "Miss Burqa". Motif : "pas assez fédérateur du mieux vivre ensemble roubaisien".
Le Conseil Régional assume son choix mais présente des excuses...
Ce mardi après-midi, Catherine Génisson, vice-présidente du Conseil Régional, a rappelé que la bourse accordée à Thierry Verbeke, le créateur de "Miss Burqa", avait été votée le 4 juillet 2011 par la Commission permanente, "à une large majorité – y compris l’opposition régionale". Seul le groupe Front National Rassemblement pour le Nord-Pas de Calais s’était abstenu. "Le comité consultatif a retenu le projet à l'unanimité saluant son caractère inventif et porteur de message", a justifié Mme Génisson dans un communiqué. "Parce qu’il ne s’agit pas d’une provocation mais bien d'une démarche artistique inscrite en cohérence avec le travail de cet artiste reconnu, sur le détournement des images, des costumes et sur l’impact de la communication et des médias".
La vice-présidente du Conseil Régional a tenu "à réaffirmer (son) respect quant à l’autonomie de création de chaque artiste". Elle présente cependant les excuses du Conseil Régional "à celles et ceux dont la sensibilité aurait pu être heurtée".