Libération et Le Monde s'inquiètent d'une possible atteinte au secret des sources, affirmant que des magistrats ont tenté de saisir les "fadettes" de leurs journalistes dans le cadre de l'affaire du Carlton de Lille, dans deux billets publiés samedi.
"Une nouvelle fois, des magistrats - deux juges d'instruction de Lille - envisagent de saisir les factures téléphoniques détaillées - les "fadettes" - des journalistes du Monde, de Libération et du Figaro pour découvrir leurs sources", affirme la directrice du Monde, Natalie Nougayrède dans l'édition datée de dimanche-lundi.
Le Monde "portera plainte pour chacune de ces inadmissibles violations de la loi et demandera une sanction disciplinaire pour chaque magistrat qui s'y sera imprudemment livré", écrit-elle.
Dans Libération, Eric Decouty explique que plusieurs journalistes de son titre, du Monde et du Figaro ont été mis en examen "ces derniers jours", soupçonnés d'avoir publié des informations relatives à l'affaire du Carlton couvertes par le secret de l'enquête.
"Avant d'avoir engagé ces poursuites ordinaires, les magistrats ont officiellement demandé au parquet de Lille l'autorisation de perquisitionner le siège des journaux visés, et même de consulter les fadettes des portables des journalistes" afin d'identifier leurs sources, écrit le directeur adjoint de la rédaction.
"Si le procureur a repoussé la demande du juge, rien n'indique que celui-ci n'est pas passé outre", poursuit-il, rappelant que cette initiative est "totalement hors la loi".
Un précédent
Dans une autre affaire, le parquet de Paris a requis cette semaine que l'ex-patron du renseignement intérieur Bernard Squarcini soit jugé pour avoir fait analyser en 2010, en pleine affaire Bettencourt, les fadettes d'un reporter du Monde pour identifier sa source.Le ministère public a estimé que l'ancien directeur central du renseignement intérieur (DCRI) devait être renvoyé en correctionnelle pour "collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite", un délit passible de cinq ans de prison et 300.000 euros d'amende.
Le ministère de la Justice travaille actuellement à une réforme de la protection du secret des sources. La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a plaidé en avril pour son "renforcement".