Alors que les JO d'hiver débutent vendredi 4 février à Pékin, il y a 58 ans François Bonlieu, originaire de l'Aisne devenait le premier Français sacré champion olympique de slalom géant. Retour sur l'histoire hors norme de cet "enfant de la plaine" au destin tragique.
"Tout ce qu'il fait porte la marque de l'adresse, de la virtuosité, et sur ses skis rien ne lui semble impossible, à croire qu'il n'est plus soumis aux lois de l'apesanteur", commente le journaliste sportif Robert Chapatte lors d'un reportage datant du 18 mars 1964.
Un mois avant ce tournage, François Bonlieu, était sacré champion olympique de slalom géant aux JO d'Innsbruck en Autriche. Pourtant rien ne prédestinait cet "enfant de la plaine", comme il se surnommait, à dévaler les pistes de ski.
François Bonlieu est né le 21 mars 1937 à Juvincourt-et-Damary dans l'Aisne, loin des montagnes enneigées. "Qui aurait dit qu'un jour j'aurais fait du ski à ce moment-là, je ne m'en doutais pas", se souvient-il lors de ce reportage en 1964. Mais c'est un séjour en colonie de vacances dans les Pyrénées qui changera la donne. Un véritable coup de foudre qu'il partage avec sa sœur Edith, elle aussi future championne de ski.
Surnommé "le petit prince des neiges"
Un an plus tard, la famille quitte l'Aisne et s'installe à Contamines-Montjoie, une station des Alpes. "C'était un grand royaume de la neige, j'étais complètement perdu et puis on a loué une paire de skis, je suis parti avec, j'étais heureux comme tout", confie François Bonlieu.
Très vite, le jeune garçon intègre l'équipe de France de ski alpin. À 17 ans, il termine même deuxième des championnats du monde de 1954 en Suède, derrière le Norvégien Stein Eriksen. Une véritable prouesse pour "le petit prince des neiges", comme on le surnomme, qui impressionne par sa technique et sa précocité.
Les années suivantes, il est plusieurs fois champion de France en 1958 et 1959 à la fois en slalom, en slalom géant et en combiné. Puis se distingue encore aux championnats du monde en remportant la médaille de bronze de slalom géant en Autriche en 1958. Puis le 2 février 1964 vient la consécration.
Sacré sur les terres du ski alpin
Aux JO d'Innsbruck, sur les terres autrichiennes des plus grands champions de ski alpin, la tâche s'annonce compliquée pour le Français âgé de 27 ans. Devant lui, l'Autrichien Josef Stiegler réalise déjà le chrono de référence. Puis François Bonlieu s'élance. Sa virtuosité et sa légèreté font mouche. Et même si le skieur n'est pas satisfait de sa prestation, aucun autre ne réussira à faire un meilleur chrono.
François Bonlieu est sacré champion olympique de slalom géant en Autriche, devant deux Autrichiens : Karl Schranz et Josef Stiegler.
Un mois après sa victoire, lorsqu'il est interviewé par Robert Chapatte, à la question : si vous n'aviez pas fait de ski, quel sport auriez-vous pratiqué ? Il répond : "je crois que je n'aurais certainement fait aucun sport parce que le ski c'est pour moi ce qu'il y a de plus beau comme sport." Il annonce alors vouloir continuer la compétition pendant deux ou trois ans puis choisir un métier, "qui lui plaît vraiment."
Il meurt à 36 ans après une rixe
Neuf ans plus tard, François Bonlieu est retrouvé inanimé au pied d'un escalier dans les jardins de Port-Pierre-Canto, à Cannes, dans la nuit du 16 au 17 août 1973 après une rixe. Il meurt le 18 août à l'hôpital de Nice. Il avait 36 ans.
Un autre Français, "le seul capable de s'approcher de cette perfection", avait déjà pris en quelque sorte sa succession. Jean-Claude Killy, déjà 5e au JO de 1964 à 20 ans, réalisait ainsi un triplé olympique en 1968 à Grenoble en remportant l'or sur la descente, le slalom et le slalom géant.