Biodiversité : l’azuré de la croisette, un papillon menacé, dépendant d'une plante hôte rare et d'une fourmi bien particulière

L'azuré de la croisette est un petit papillon bleu foncé typique des prairies. Son cycle biologique le lie à la présence de deux hôtes spécifiques, une plante et une fourmi. Une nécessité qui le classe aujourd’hui parmi les espèces menacées. (Première publication le 18/07/2021).

L’azuré de la croisette, également appelé argus bleu marine, de son nom latin phengalis alcon rebeli, est un très petit papillon puisqu’il mesure entre 17 et 19 mm. Il se reconnaît par le dessus de ses ailes, bleu foncé pour le mâle et marron pour la femelle et le dessous gris clair et parsemé de points noirs.

Il fait partie des lépidoptères. Il s'agit de l'un des ordres d'insectes les plus répandus et les plus largement connus dans le monde, dont la forme adulte (ou imago) est communément appelée papillon, dont la larve est appelée chenille, et la nymphe chrysalide.

Les Hauts-de-France comptent plus de 2 000 espèces de lépidoptères (papillons) dont 91 papillons de jour (rhopalocères).

Où vit-il ?

Ce petit papillon a besoin d’un environnement sec et chaud. Il se trouve dans les pelouses calcicoles et les friches sèches.

Le gros de la population se situe dans l’Aisne sur le camp militaire de Sissonne et sur les marais communaux et les pelouses de la commune de Marchais et dans l’Oise à Avilly-Saint-Léonard sur une seule petite pelouse sèche.

Autrefois connue sur huit autres communes, l'espèce y a totalement disparu. Il est peu représenté dans la région Hauts-de-France et n’est pas présent dans le Nord-Pas-de-Calais.

Quand peut-on l’observer ? Classé parmi les papillons de jour, l'insecte s'observe en pleine journée de la mi-juin à la mi-août, parfois jusqu’à la fin du mois, mais c'est plus rare.

Des liens indéfectibles

Comme la plupart des autres espèces de papillon, l’azuré de la croisette a besoin d'une plante hôte pour y déposer ses œufs et nourrir les chenilles. Pour lui, comme son nom l'indique, c'est la gentiane croisette (gentiana cruciata) qui lui est nécessaire pour se reproduire. Cette relation, plante-insecte, permet d’ailleurs d’expliquer sa faible répartition sur le territoire régional. En effet, la gentiane croisette est considérée comme très rare en région et totalement absente du Nord-Pas-de-Calais.

Toutefois, les relations nécessaires à sa survie ne s’arrêtent pas là ! L’azuré de la croisette a également besoin d’une espèce de fourmi bien particulière, nommée Myrmica schencki. "Après avoir passé près de trois semaines sur sa plante hôte, la chenille se laissera tomber au sol afin d’être transportée par les fourmis dans leur fourmilière. Une fois à l’intérieur, elle sera nourrie par ses hôtes, dissimulée par des phéromones qu’elle sécrète et sera soignée comme une fourmi reine. Elle y restera toute la mauvaise saison jusqu’à regagner l’air libre sous la forme d’un papillon", explique Nicolas Caron, chargé d’études scientifiques à l’antenne de l’Aisne du conservatoire d'espaces naturels (CEN) des Hauts-de-France.

Un habitat en danger

Ce cycle de vie si particulier, combiné aux menaces qui pèsent sur les pelouses sèches, rendent la situation très précaire pour l'insecte menacé à différentes échelles. Il est même protégé au niveau national. "Les pelouses étaient auparavant maintenues ouvertes par les moutons. Aujourd'hui, ce sont des milieux laissés à l’abandon qui se sont fermés", explique Nicolas Caron.

Depuis le début du XXe siècle, 50 % à 75 % des pelouses sèches auraient disparu du territoire national. Ces chiffres traduisent des mutations complexes du territoire, passant par l’urbanisation, l’intensification de certaines pratiques agricoles et l’abandon de secteurs accidentés, autrefois pâturés. La non-intervention de l’homme conduit ainsi à une fermeture progressive des milieux, associée à une perte d’espèces animales et végétales qui y sont liées.

En résumé, les transformations globales et les évolutions techniques et technologiques ont favorisé la disparition des pelouses selon le CEN.

Victime de différents dérèglements qui pèsent sur son biotope, localement, ce bel azur peine donc à subvenir à ses besoins.

Une espèce menacée en Picardie

Des difficultés de survie qui ont amené le conservatoire des espaces naturels à le protéger.

L’azuré de la croisette est très menacé à l’échelle régionale.

Nicolas Caron, chargé d’études scientifiques au CEN des Hauts-de-France

Conscient des dangers qui pèsent sur cette espèce, le conservatoire d'espaces naturels des Hauts-de-France mène de nombreuses actions en sa faveur et participe aux programmes nationaux visant à sa préservation.

Des menaces qui sont nombreuses : destruction de l'habitat des chenilles et des imagos, isolement des populations par la fragmentation des milieux naturels, raréfaction de plantes hôtes pour les espèces les plus spécialisées, utilisation de pesticides, parasitisme... Avec la présence de 95 % des espèces menacées en Picardie sur les sites gérés par le conservatoire d'espaces naturels des Hauts-de-France, celui-ci a un rôle majeur dans la préservation des papillons de jour.

Une protection rapprochée

L’azuré de la croisette parvient à émerger grâce à la protection qui lui est accordée. "C’est une espèce phare dans le département de l'Aisne que l’on essaie de préserver sur les pelouses". Sa présence est un bon indicateur de la santé des prairies.

Chacun peut adopter à son niveau des petits réflexes dans son quotidien pour sauvegarder les petits insectes comme éviter de tondre toute sa pelouse et garder des petits recoins de protection comme des branchages.

Une centaine d’espèces de papillons de jour ont été recensées en Picardie. Certaines d'entre elles sont aujourd'hui menacées de disparition, d'autres ont déjà disparu et d’autres sont arrivées récemment.

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