Condamné à 30 ans de prison en première instance pour le viol et le meurtre d’Isabelle Mesnage en 1986, Jacques Rançon, "le tueur de la gare de Perpignan" a été condamné vendredi à la réclusion criminelle à perpétuité, conformément aux réquisitions du parquet.
Après cinq jours de procès et quatre heures de délibéré, la réclusion criminelle à perpétuité a été prononcée par la cour d’assises d’appel de l’Aisne pour le viol et le meurtre d’Isabelle Mesnage en 1986. Une peine plus lourde que celle prononcée en première instance, assortie d’une période de sûreté de 18 ans. À 62 ans, il est l'un des rares criminels à avoir été condamné par deux fois à la peine la plus lourde du code pénal.
Jacques Rançon a, pendant ce procès nié les faits et assuré n’avoir jamais croisé la route d’Isabelle Mesnage. Il est resté impassible lors du prononcé du verdict, conforme aux réquisitions de l'avocat général André Meykuchel.
L’accusé avait été condamné à 30 ans de réclusion en première instance par les assises de la Somme, mais cette condamnation était entachée d'une erreur de droit relevé par André Meykuchel. À l'époque des faits en 1986, ce quantum de peine n'existait pas et ne pouvait donc pas être prononcé en vertu de la non-rétroactivité de la loi.
Le manque de preuves formelles
À l'époque, l'enquête avait abouti à un non-lieu. L'affaire n'a été rouverte que 25 ans plus tard, mais aujourd'hui encore, il n'existe ni preuve ADN, ni témoin. C'est bien le cœur de ce procès en appel : tout repose sur des preuves circonstancielles.
Déjà, le fait que Jacques Rançon connaissait bien l'endroit où a été retrouvé le corps d'Isabelle Mesnage, à Cachy dans la Somme. Mais d'après le ministère public et les avocats des parties civiles, il existe aussi et surtout des similitudes entre le meurtre d'Isabelle Mesnage et les deux autres meurtres commis par Jacques Rançon.
Dans sa plaidoirie, Me Didier Seban, avocat des parties civiles, a également rappelé que Jacques Rançon avait dans un premier temps avoué les faits, avant de se rétracter.
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Me Herrmann, avocate de la famille, spécialiste des affaires non élucidées.
L'avocate qui avait relancé le dossier a ajouté "Il n'est jamais trop tard pour reprendre une affaire ancienne."
Me Xavier Capelet, l'un des avocats de Jacques Rançon, s'est lui dit "pas vraiment surpris". "On a la sensation de ne pas avoir été réellement entendu", a-t-il ajouté, excluant un pourvoi en cassation.
Jacques Rançon, déjà condamné en 2018 à la réclusion à perpétuité pour les viols et meurtres de deux femmes à Perpignan en 1997 et 1998, "est très dangereux", avait insisté André Meykuchel lors de ses réquisitions.
L'accusé, 62 ans, est selon lui "soucieux de son image" et "il ne souhaite pas être pris pour un tueur en série". Or, un tueur en série, pour lui, c'est quelqu'un qui a tué trois fois", avait-il mis en avant, pour expliquer pourquoi l'ancien cariste-magasinier nie les faits.
Après un non lieu, l'enquête relancée en 2017
Isabelle Mesnage, une jeune informaticienne de 20 ans partie randonner, avait été retrouvée morte le 3 juillet 1986 à la lisière d'un bois à Cachy, une douzaine de kilomètres d'Amiens.
Après un non-lieu en 1992, l'enquête avait été relancée en 2017 quand Me Herrmann avait fait le lien entre Jacques Rançon, alors mis en cause pour des meurtres à Perpignan après l'identification de son ADN, et la mort de la jeune femme.
Une nouvelle autopsie d'Isabelle Mesnage avait confirmé de fortes similitudes avec le mode opératoire de Jacques Rançon.
Il avait avoué en 2019 l'avoir violée et étranglée, puis avoir découpé son sexe et ses seins pour effacer son ADN. Il avait répété ses aveux devant le juge d'instruction, avant de se rétracter par courrier.