Suspendus aux décisions gouvernementales, les restaurateurs espèrent une réouverture de leurs établissements courant mai. Particulièrement attendue, l'autorisation de servir en terrasse. Des villes sont prêtes à aider les professionnels à travailler en extérieur en piétonnisant des rues.
L'ouverture limitée aux seules terrasses n'enthousiasme pas vraiment les restaurateurs du département de l'Aisne. François Vieillard-Cristante, propriétaire de la brasserie la Cathédrale à Soissons, indique que cela ouvre tout de même une perpective : "économiquement, l'impact pour nous restera limité, mais nous ouvrirons car cela répond à la demande du public".
La terrasse de son restaurant dispose d'une cinquantaine de places idéalement situées à quelques mètres seulement de l'édifice gothique. "Aux mois de mai et juin, le temps reste très instable, les journées peuvent être humides, une ouverture réservée uniquement aux terrasses est d'un intérêt très limité mais nous avons besoin de travailler."
Un constat que rejoint Nordine Chellat le propriétaire du Bouche à oreille, situé à quelques centaines de mètres de là. "Cela peut aussi accompagner la vente à emporter qui nous permet aujourd'hui de poursuivre notre activité". Le restaurant dispose en temps normal de trente couverts disposés sur quelques tables qui s'alignent sur le trottoir. Une autorisation assortie de nouvelles contraintes de distanciation pourrait encore réduire cette capacité de moitié. Qu'importe ! Le professionel se dit prêt à jouer le jeu car il est certain comme tous ses confrères contactés par nos soins de l'attente des clients.
À Laon, le propriétaire de La salle à manger a décidé de cesser la vente à emporter. Il n'a pas voulu s'engager sur la guerre des prix imposée par certains concurrents qui l'aurait obligé à faire des concessions sur la qualité. Il dispose d'une cinquantaine de couverts en terrasse contre 140 en salle. La réouverture éventuelle de sa terrasse est une petite consolation : "notre clientèle viendra surtout le midi, les soirées sont fraîches et de toute façon pour l'instant bloquées par le couvre-feu, la situation de la terrasse coincée entre la nationale 2 et la zone commerciale la rend peu attractive".
Des municipalités aux aguets et à l'écoute
L'an passé, la mairie de Soissons avait exempté les cafetiers et restaurateurs de taxes pour la présence de tables sur le domaine public. Ils bénéficieront encore cette année de cette gratuité et de la prise en charge de leurs taxes foncières. Les collectivités comme les professionels sont dans l'attente des mesures gouvernementales pour aider les établissements.
La piétonnisation de certains axes comme les rues Charpentier et du Commerce est à nouveau à l'ordre du jour pour concilier une extension des terrasses et des impératifs de sécurité toujours d'actualité. Cette expérimentation tentée l'an passé avait donné des résultats mitigés, principalement en raison d'épisodes pluvieux inopportuns, mais elle pourrait permettre aux clients d'avoir davantage d'espace libre en fin de journée.
Les horaires seront décidés en fonction de l'évolution du couvre-feu. Sylvie Coupey, en charge du commerce dans la cité du Vase, évoque le sur-mesure pour offrir aux restaurants et cafés "une place de parking, un bout de trottoir pour permettre à chacun de travailler dehors". A Saint-Quentin, l'adjoint au maire en charge de la sécurité, Freddy Grzeziczak, confie, lui, avoir déjà reçu des demandes d'extension sur les extensions déjà consenties aux terrasses l'an passé. "Nous ne pourrons pas dire oui à toutes les sollicitations, cela doit être encadré, la sécurité liée à la circulation ne peut être ignorée". L'adjoint précise qu'une réunion avec les commerçants sera programmée sans doute en fin de semaine prochaine pour aplanir les difficultés. La mairie dit travailler à cette réouverture des espaces de restauration extérieurs depuis une dizaine de jours déjà.
Dans la ville préfecture de l'Aisne, la situation est plus avancée. Sylvie Letot-Durande, ajointe au maire en charge du commerce à Laon, confirme la piétonnisation de la rue Saint-Jean, comme l'été passé, avec la possibilité pour les restaurateurs d'installer des tables en extérieur. Les places Saint-Julien et du Bourg seront ouvertes et sécurisées pour permettre également au public de venir déguster les plats proposés.
Dans l'Aisne seulement un établissement sur quatre dispose d'une terrasse.
Jean-Marie Serre, le président du syndicat de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie de l'Aisne, a pris ses dispositions. Il a porté la capacité de la terrasse de son hôtel-restaurant de 40 à 60 couverts. Situé à Etouvelles, non loin de Laon, le responsable de l'organisation professionnelle souligne l'impérieuse nécessité de reprendre le travail même d'un façon très amoindrie. Les chefs d'entreprise ont de plus en plus de mal à retenir leurs cadres les plus qualifiés, dit-il. "Ce sont les salariés qui ont le plus souffert du chômage technique et de la baisse des revenus dans nos métiers. Ils tentent aujourd'hui leur chance dans des secteurs d'activité qui souffrent moins de la crise sanitaire". Jean-Marie Serre souligne cependant le caractère inégalitaire d'une réouverture circonscrite aux seules terrasses.
De nouvelles contraintes
"Dans l'Aisne seulement, un établissement sur quatre dispose d'une terrasse, que vont faire ceux qui n'en ont pas? Tout dépendra du bon vouloir des villes où ils sont installés". Selon ses informations, une éventuelle réouverture des terrasses sera assortie de nouvelles contraintes sanitaires. Jean-Marie Serre évoque des tables limitées à quatre convives et des espaces obligatoires d'1,5 mètre entre les tablées. Malgré ces possibles restrictions, malgré les incertitudes de la météo, le patron axonais de l'organisation syndicale se contentera d'une ouverture des espaces extérieurs.
Elle impose d'après lui d'être prévenu une dizaine de jours en amont pour accueillir le public dans de bonnes conditions. La terrasse, lieu de détente habituel des clients, pourrait aussi signifier le début du retour des beaux jours pour les restaurateurs, cuisiniers et traiteurs.