Lundi 6 décembre, l'inspection d'Académie du département de l'Aisne renouvellera son partenariat avec l'Union des associations familiales et la ligue de l'enseignement. "Lire et faire lire" permet à des personnes de plus de 50 ans d'offrir un temps d'évasion par la lecture aux élèves de maternelle et de primaire.
En 2003, ils n'étaient encore qu'une poignée. Jean-Pierre Ducroizet retraité de l'entreprise Saint-Gobain à Soissons se souvient d'un petit groupe de cinq ou six personnes. "Lire et Faire lire" faisait ses premiers pas dans l'Aisne. Quatre ans plus tôt, en 1999, l'écrivain Alexandre Jardin avait lancé cette association. Son but : inciter les plus jeunes à la lecture en leur offrant la possibilité d'écouter un adulte lire un ouvrage pendant au moins une vingtaine de minutes.
Une seule condition : le lecteur doit être âgé d'au moins 50 ans
Jean-Pierre Ducroizet s'est engagé dans l'association "Lire et faire lire" pour remplir ses journées alors qu'il abordait la retraite. Dix-huit ans plus tard il continue son action. "C'est enrichissant, pendant au moins 20 minutes nous avons une relation privilégiée avec un petit groupe d'élèves."
Là où l'association préconise des groupes de 5 ou 6 enfants, Jean-Pierre Ducroizet privilégie des interventions devant 3 ou 4 élèves pour maintenir leur attention. Ce bénévole intervient surtout dans des écoles ou des maternelles en zone d'éducation prioritaire. "Au départ nous n'étions pas vraiment connus, le bouche à oreille dans le milieu enseignant, nous a permis de nous développer."
Dans l'Aisne, en 2019, 17% des jeunes de 16 ans avaient des difficultés à lire. Le département fait l'objet d'un plan spécifique pour lutter contre l'illettrisme. Tous les mois, Jean-Pierre, qui intervient par le biais de l'UDAF, l'Union des associations familiales, va choisir une douzaine de livres à la bibliothèque de Soissons.
Un partenariat existe avec l'établissement municipal : La chose, Mia, Agnès l'ogresse ou Comment lire un livre?, font partie, ces derniers jours, de sa sélection. "Nous bénéficions d'une certaine latitude pour choisir les ouvrages. Pour moi c'est enrichissant, cela me permet de me sentir utile." Seule condition imposée par l'association "Lire et faire lire" à ses adhérents : avoir plus de 50 ans car le projet se veut aussi intergénérationnel.
Pour mener son combat l'association s'appuie sur deux piliers qui maillent le territoire. La ligue de l'enseignement et l'Union des associations familiales (UDAF). Elles apportent leurs effectifs. Dans le département de l'Aisne, chacune possède son ressort d'intervention. La Thiérache et le sud de l'Aisne (Château-Thierry) sont dévolus à la ligue de l'enseignement. Soissons, Saint-Quentin et Laon à l'UDAF.
Plus de 180 bénévoles à pied d'œuvre en toute discrétion
Depuis les premiers temps "héroïques", "Lire et faire lire" a tissé sa toile sur le département. La ligue de l'enseignement revendique désormais 84 bénévoles engagés, l'UDAF en compte 103.
Seule différence entre les deux associations partenaires, la ligue pour l'enseignement dispose de son propre matériel pour intervenir dans les écoles : une mallette avec quelques ouvrages et des jeux pour un échange avec les jeunes auditeurs. L'UDAF, elle, a noué des partenariats avec les bibliothèques municipales. L'ensemble des intervenants reçoit des formations prodiguées par l'association "Lire et faire lire". "La lecture à haute voix" "jouer sur le ton" ou "lire une poésie" font partie des enseignements proposés. Quelques fois ce sont aussi des rencontres avec des auteurs venus présentés leurs ouvrages aux lecteurs.
Aujourd'hui, environ 70 structures scolaires ont recours aux services de l'association dans l'Aisne. Des écoles, des maternelles, mais aussi des crèches et même...des maternités comme celle de l'hôpital de Laon. Des centres d'accueil pour migrants écoutent également ces volontaires de la lecture partagée.
"Lire et faire lire" en manque de volontaires
Mais depuis le début de la crise sanitaire, les bonnes volontés font défaut. Emmeline Boussard, référente pour la ligue de l'enseignement dans l'Aisne, indique avoir perdu une dizaine de bénévoles : "les craintes liées à la Covid ont incité beaucoup de lecteurs à ne plus se déplacer, la moyenne d'âge est supérieure à 60 ans." Un constat que rejoint également Pauline Pierre pour l'UDAF : "les effectifs ont fondu de 150 à une centaine, nous sommes à la recherche de personnes qui ont du temps disponible."
Même le court répit offert à la rentrée par la maladie n'a pas permis l'augmentation du nombre de lecteurs. Les besoins sont pourtant plus importants que jamais. Dans le département de l'Aisne, on estime à 13% la part de la population touchée par l'illettrisme contre 7% au niveau national. Les services académiques de l'Aisne ont signé leur première convention "Lire et faire lire" en 2014. L'instant lecture en milieu scolaire veut offrir à tous le désir d'aller vers les mots.