Un cirque sous le dôme d'une église : quand des artistes redonnent vie à un lieu de culte fermé depuis des années à Saint-Quentin

Les circassiens de la compagnie Isis sont en pleine répétition à l'église Sainte-Thérèse de Saint-Quentin. Ils préparent une série de représentations de Noël pour les fêtes de fin d'année, dans ce lieu que les habitants redécouvrent grâce à eux.

En septembre 2023, la compagnie Isis, basée à Pargny-Filain, non loin de Soissons, décide d'investir l'église Saint-Thérèse de Saint-Quentin. Un lieu de culte fermé depuis quinze ans faute de paroissiens, et que le diocèse cherche à louer. Un très bel espace qui leur permet d'y installer leur école des arts du cirque et d'y proposer des spectacles à intervalles réguliers.

"Nous payons un loyer de 1 000 € par mois", précise Quentin Bancel, le directeur artistique de la compagnie Isis. "Certes, c'est un très bel endroit et nous disposons d'une surface de 1 000 m² sur deux niveaux, mais il a fallu opérer quelques travaux. En un an et demi, nous avons fait au mieux en installant notamment un système de chauffage pour recevoir le public dans de bonnes conditions. Le gros point noir, c'est l'absence d'eau potable. Nous sommes contraints de ramener nos stocks de bouteilles. Et une fuite d'eau, qui nous inquiète. Nous avons rendez-vous très bientôt avec le diocèse pour en parler".

L'édifice religieux date de 1937. Les Saint-Quentinois l'ont bien connu pour y avoir longtemps célébré mariages, baptêmes et communions. "On y organisait même des parties des cartes ou des kermesses, nous explique Quentin Bancel. En intégrant ces lieux, qui sont magnifiques, avec les vitraux et le dôme, nous répondions à une attente : faire revivre cette structure religieuse, lui donner une nouvelle visibilité, et surtout combler un vide, car Saint-Quentin, qui est pourtant une grosse ville, ne possédait pas d'école de cirque."

J'appartiens à une famille d'artistes et je pratique les arts du cirque depuis tout petit.

Quentin Bancel / Directeur Artistique de la Compagnie Isis

Bon sang ne saurait mentir, Quentin Bancel a de qui tenir. À 38 ans, il pratique les arts du cirque depuis sa plus tendre enfance. Sa mère, actrice de théâtre, fonde la troupe Isis il y a trente ans, à Pargny-Filain dans l'Aisne. Quelques années plus tard, Quentin et ses deux sœurs vont la transformer pour en faire une compagnie de cirque. Car décidément, le cirque est une affaire de famille chez les Bancel !

"Moi, j'ai choisi de devenir jongleur et de pratiquer la roue Cyr, une sorte de cerceau géant à taille humaine, qui tourne sous l'impulsion de son manipulateur. Je suis circassien depuis l'âge de 7 ans et j'ai parcouru toute l'Europe pour me produire un peu partout lors de festivals. Mais pour notre spectacle de Noël, on ne me verra pas sur scène, car je suis en charge de la direction artistique. Je serai en coulisses pour une fois", précise Quentin Bancel.

13 représentations à l'affiche pour un joli conte de Noël sur la tolérance

Depuis plusieurs semaines, les artistes du spectacle Le Cadeau du Loup se retrouvent chaque jour pour plusieurs heures de répétition sous le dôme de l'église. "C'est du cirque aérien avec quatre artistes au plateau, c’est-à-dire qui se produisent sur scène, ou plutôt, à dix mètres de haut, accrochés par leurs agrès à un grill, une structure qui les supporte. Les répétitions auront lieu jusqu’au dernier moment, car nous, les circassiens, nous sommes des perfectionnistes".

Un spectacle au scénario totalement original interprété par des circassiens originaires du Canada, de Nouvelle-Zélande et de France. "Ils viennent des meilleurs cirques du monde, dont le fameux Cirque du Soleil. Et ils sont très heureux d'utiliser tout ce volume disponible sous le dôme de l'église", complète Quentin Bancel.

Pendant une heure, à compter du samedi 7 décembre à 15 heures et jusqu'au 26 au moins, les spectateurs seront immergés dans un monde de lumière et de musique et suivront les tribulations d'un loup, victime de la méfiance et de la peur qu'il inspire. "Mais comme c'est un conte de Noël, on peut d'ores et déjà prédire que tout cela finira bien", s'amuse Quentin Bancel.

"Si le public répond présent, nous pouvons envisager de jouer les prolongations jusqu’au 30", précise encore Quentin Bancel.

"On compte sur le public pour faire de ce coup d'essai un coup de maître"

La troupe Isis compte une dizaine de salariés, des circassiens, aux techniciens son et lumière. Et puis il faut payer le matériel, le loyer, chauffer... "Il nous faudrait au moins 2 500 spectateurs pour entrer dans nos frais. Ce spectacle, pour le monter, il a fallu investir 50 000 €, sur fonds propres. Heureusement, nous bénéficions ponctuellement de l'aide de bénévoles, nous explique le directeur artistique du spectacle. Nous sommes limités pour l'instant à une jauge à 200 personnes. J'attends une autorisation de la mairie pour accueillir 300 personnes". Le succès est donc impératif pour la troupe Isis et son Cadeau du Loup.

"Nous avons l'intention d'être un lieu ouvert à tous. Nous hébergeons déjà plusieurs associations au sein de l'église Sainte-Thérèse : un réparateur de vélo, une AMAP (association pour le maintien de l'agriculture paysanne), un club de capoeira... Et bien entendu, la porte est toujours ouverte aux passants, curieux de voir ce qu'il s'y passe ou de redécouvrir leur église. Ils sont les bienvenus !".