A partir de mardi, le Sénat débat du projet de réforme pénale post-attentats. Depuis les attentats de Bruxelles, les propositions des sénateurs se sont durcies.
Le Sénat débat à partir de mardi du projet de réforme pénale post-attentats, qu'il devrait encore "muscler" en confirmant notamment la possibilité de prononcer une "perpétuité incompressible" pour les auteurs de crimes terroristes, déjà votée par les députés.
Cette mesure avait été introduite par le député Les Républicains Guillaume Larrivé pour permettra à une cour d'assises, lorsque le crime terroriste est passible de la réclusion criminelle à perpétuité, soit de porter la période de sûreté jusqu'à 30 ans contre 22 actuellement, soit de décider qu'aucune mesure d'aménagement de peine ne pourra être accordée.
Xavier Bertrand pour la peine de mort ?
Depuis, les derniers attentats de Belgique ont entraîné une véritable surenchère à droite. Le député LR Olivier Dassault s'est dit favorable au rétablissement de la peine de mort pour les auteurs d'actes terroristes. La peine capitale a été abolie en France en 1981. Il a jugé insuffisante la perpétuité "incompressible", idée défendue largement à droite, notamment par Nathalie Kosciusko-Morizet, car elle "ne perturbera jamais les projets diaboliques de ces bombes humaines". Jeudi, l'ancien député LR et actuel président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, a déclaré pour sa part que s'il avait été parlementaire en 1981, il croit qu'il "n'aurai(t) pas voté l'abolition de la peine de mort". "Aujourd'hui, avec le recul, je pense que supprimer la peine de mort a du sens à une condition : ceux qui étaient susceptibles d'en relever ne doivent jamais sortir de prison", avait-il ajouté.Mais pour l'ancienne Garde des Sceaux Rachida Dati, comme de nombreuses voix à gauche, "une perpétuité réelle" transformerait "en fauves" les auteurs d'actes terroristes.
Vote solennel le 5 avril
Le Sénat avait déjà adopté en février la possibilité de prononcer une perpétuité incompressible pour les auteurs d'actes terroristes, en votant ses propres propositions pour renforcer la lutte anti-terroriste. L'ensemble des sénateurs de droite avait voté ce texte déposé par leurs présidents de groupe Bruno Retailleau (Les Républicains, LR) et François Zocchetto (UDI-UC), celui de la commission des lois Philippe Bas (LR) et l'ancien garde des Sceaux Michel Mercier (UDI-UC). Les socialistes comme le RDSE (à majorité PRG) s'étaient abstenus. Communistes et écologistes avaient voté contre. Mais pour que le texte sénatorial soit adopté définitivement, il aurait fallu que l'Assemblée nationale, où la gauche est majoritaire, le vote également. Or celle-ci a examiné en premier lieu le texte du gouvernement."Je présenterai (...) en Conseil des ministres un nouveau projet de loi adaptant notre procédure pénale aux nécessités de la lutte antiterroriste, dont l'esprit est le même que celui de votre proposition de loi", avait d'ailleurs annoncé aux sénateurs le Garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas, dont c'était la première intervention au banc des ministres. Les sénateurs prévoient de mieux encadrer la perpétuité incompréhensible, notamment en précisant comment elle pourra être aménagée à l'issue de la durée de 30 ans,
a indiqué M. Bas. Soulignant que cette possibilité existe déjà pour les auteurs d'assassinats de policiers, gendarmes ou magistrats dans l'exercice ou en raison de leurs fonctions, il rappelle que Carlos et Georges Ibrahim Abdallah, condamnés en France à la perpétuité pour des actes terroristes, sont toujours en prison.
En revanche, dit-il, la peine de mort prônée par M. Dassault est "inconstitutionnelle" et "contraire à mes idées". Autres dispositions que devraient introduire les sénateurs: l'organisation d'un régime plus rigoureux d'exécution des peines, ou la création d'une circonstance aggravante permettant de criminaliser certains délits d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, et de faciliter la saisie des correspondances stockées.
Le Sénat prévoit aussi de renforcer le contrôle administratif des personnes de retour de zones d'opérations terroristes. L'examen du texte doit durer jusqu'à jeudi. Il fera l'objet d'un vote solennel le 5 avril, avant de partir en commission mixte paritaire, 7 députés et 7 sénateurs, qui devront établir une version commune aux deux chambres.