La mini-série tournée dans le Nord Pas-de-Calais rempile pour une deuxième saison, diffusée en septembre sur Arte. Bruno Dumont dévoile ses intentions en tant que réalisateur dans ces épisodes qui s'annoncent apocalyptiques et "farfelus".
Coincoin, ex-p'tit Quinquin, est furieux que sa petite voisine soit amoureuse d'une agricultrice et se console dans les bras d'une belle vacancière. Voilà pour le début de la deuxième saison "Coincoin et les Z'inhumains", réalisée par Bruno Dumont. Elle sera diffusée en septembre sur Arte, quatre ans après le premier volet.
A 17 ans, Coincoin a bien grandi. Il colle des affiches pour l'extrême droite et joue au chat et à la souris avec les gendarmes au volant de son tacot, dans la lumière blanche du Pas-de-Calais.
"C'est l'apocalypse, la fin de la vie, la mort de tout, même de la gendarmerie", souffle le commandant Van Der Weyden, secoué, le revolver toujours dressé vers le ciel. Une toile de fond aux allures absurdes pour une saison qui s'annonce aussi décalée que la première.
"Envie d'aller encore plus loin"
Après la première saison, le réalisateur avait "envie d'aller encore plus loin, de trouver une histoire farfelue qui permette de parler du réel", a-t-il indiqué mercredi, lors d'une conférence de presse.
Coincoin et les gendarmes croisent la route de migrants, qui ont installé un camp sur le port de Boulogne-sur-mer et que des jeunes militants veulent brûler. Pour l'anecdote : pendant le tournage de la série en 2017, un (vrai) élu FN s'était inquiété de cette installation, croyant qu'il s'agissait d'un vrai camp.
Dans cette nouvelle saison, le commandant se révèle raciste et homophobe, soit un personnage "compliqué", selon Bruno Dumont : "une nature humaine brassée par des sentiments contradictoires", qui protège les adolescents mais les mate et les insulte en même temps.
"La nuance, il n'y en a pas. La morale, il n'y en a pas non plus", assume le réalisateur. "Ce film pique. Il faut que le cinéma nous libère de notre méchanceté (...) Je veux pousser le spectateur à son point de déséquilibre".
Le clonage des habitants, causé par des chutes de magma, mène à des quiproquos absurdes. Un humour grinçant imprègne chaque plan, au risque de créer un sentiment de gêne.
Du "burlesque sonore"
Dans "Coincoin", les gorges déglutissent et les intestins gargouillent. Ce "burlesque sonore", inspiré des toiles de Brueghel et Bosch représente "une cacophonie spirituelle", "une vicissitude de la nature humaine dont le commandant serait la tête de pont", souligne Bruno Dumont, ancien professeur de philosophie converti à un cinéma radical.
Comme dans la première saison, l'intrigue policière sert de toile de fond pour poser des questions existentielles. Qui est le plus humain ? Comment se manifeste le mal ? "On doit se poser des questions, mais il faut aussi accepter qu'il n'y ait pas de réponse", lâche Bruno Dumont.
Les acteurs, tous amateurs pour la première saison, sont désormais "plus à l'aise, connaissent la caméra, l'équipe", explique le réalisateur. Alane Delhaye, notamment, "s'amuse, il connaît la machine et en joue". Le réalisateur a continué à les guider à l'oreillette pendant le tournage, tout en leur laissant une grande liberté pour improviser.
Une troisième saison ?
Y aura-t-il une troisième saison ? "Tout est possible", répond Bruno Dumont, 60 ans, qui prépare un nouveau film sur le journalisme et pour lequel il travaillera avec des acteurs professionnels.
Début août, le réalisateur de "Flandres" et "L'humanité" (deux Grands prix du jury à Cannes) doit recevoir un Léopard d'honneur au festival de Locarno où "Coin-Coin et les Z'inhumains" sera projetée en première mondiale.