Coronavirus : "On peut passer à côté d'AVC, de péritonites", les cabinets médicaux tournent à 30% de leur activité

Par crainte du Coronavirus, des patients atteints d'autres maladies, ne se signalent que très tard auprès de leurs médecins libéraux. Exemples avec les témoignages de deux docteurs, l'un exerçant à Valenciennes, l'autre à Villeneuve d'Ascq. 

"30% ! Les cabinets médicaux tournent à 30% de leur activité dans le Nord",  assure Jean-François Rault, président du conseil de l'ordre des médecins du Nord qui compte 12 000 médecins, libéraux ou hospitaliers. Les patients qui ont d'autres pathologies ne consultent pas ou beaucoup moins. A l'extrême, "Il y a des cas de péritonites prises en charge au troisième jour ou des appels concernant des infarctus qui sont passés quatre jours après. Aux premiers jours du confinement, les médecins constataient déjà les choses, et une centaine d'entre-eux appelait au conseil de l'ordre par jour. Aujourd'hui on en est à 50-60 appels par jour." Alors, avant que les discussions avec le gouvernement se fassent sur l'aspect financier des choses. Retour sur cette "désertification" des cabinets médicaux avec deux exemples, l'un à Valenciennes, l'autre à Villeneuve d'Ascq.

Thomas Poumaere est généraliste à Villeneveuve d'Ascq. Son cabinet se compose de deux médecins (lui compris) et d'une collaboratrice. Il constate également une baisse de son activité de l'ordre de 60% à 80%. Trois raisons à cela. "1. Les patients chroniques renouvellent les médicaments désormais directement en pharmacie, 2. Les problèmes disons "rhumatismaux" ne sont plus traités - les kinés sont fermés - et 3. La peur de déranger ou de contracter le Covid-19 en allant voir le médecin".
  

"Ça met des patients en danger"


A tel point que, la consoeur du cabinet ayant dû s'absenter trois semaines, Thomas Poumaere a traité les deux patientèles sans problème. "Hier, par exemple, six patients sont venus : là on travaille à perte, si ça continue je ne sais pas si je vais devoir mettre ma secrétaire en chômage partiel". Mais le problème essentiel, si on laisse les cas de Covid-19 de côté, c'est que "ça met des patients en danger : on se retrouve avec des pathologies d'un autre temps, j'ai entendu parler d'appendicites rompues ou de coup de téléphone au médecin un vendredi soir alors que tous les symptômes d'un AVC avaient eu lieu le mercredi matin ! Il y a trois fois moins de consultations quasiment partout, même dans les services traitant les AVC, mais il n'y a pas trois fois moins d'accidents neurovasculaires pour autant..."

Mais les patients ont-ils raison d'être apeurés par une contagion en se rendant dans leur cabinet médical ? "Pour le Covid-19, les médecins savent très bien, par téléconsultation, constater les symptômes, s'il y a besoin d'une autre consultation, besoin d'assistance respiratoire etc. Quant au cabinet, il est désinfecté complètement deux fois par jour". En revanche, concernant les masques, Thomas Poumaere n'hésite pas à manifester une colère certaine. "On nous explique qu'il faut des masques FFP2 pour être protégés, puis que, finalement, un masque chirurgical pour le patient et un pour le praticien suffisent et résultat on annonce 18 masques, par médecin, par semaine ! C'est du foutage de gueule, on n'est pas dans les clous ! Heureusement que des patients et une entreprise, par solidarité, m'ont donné des dizaines de masques !".
  

"Important de consulter, même en ce moment !"


La solidarité... C'est ce que Jacques Franzoni, médecin libéral à Valenciennes, retient de ce qu'il vit actuellement. Comme Thomas Poumaere, qui consacre une partie de son temps pour le centre Covid-19 de Roubaix, Jacques Franzoni était hier de garde, au CH de Valenciennes. "Les personnels soignants se serrent les coudes, les moyens sont mutualisés. C'est chouette à voir, c'est comme ces patients qui veulent filer un coup de main pour dépanner. Beaucoup de gens veulent se rendre utiles". 
 
Malgré tout, lui qui travaille dans un cabinet de 5 médecins à Valenciennes, constate aussi une division par trois ou quatre du nombre de patients. Comme Thomas Poumaere, il remarque des retards de prise en charge, pour des choses importantes "comme une pancréatite d'une patiente de 32 ans qui a consulté 3 ou 4 jours après l'apparition de la douleur". Autre exemple dramatique, celui d'un homme de 56 ans sans antécédents médicaux : "il avait les symptômes du Covid-19 mais ne les a déclarés qu'à son médecin une semaine après. Il avait peur d'être hospitalisé et de mourir. Il a été hospitalisé en réanimation dans la nuit de dimanche à lundi et est décédé lundi soir. Sa femme, diagnostiquée positive devrait s'en sortir car elle a été prise en charge plus tôt". 

"C'est pourquoi il est important de consulter, même en ce moment". C'est le mot de Jean-François Rault qui, à l'instar des libéraux bretons préconise de continuer les vaccinations par les pédiatres ou les dépistages de glaucomes. "Il faut à tout le moins appeler son généraliste, beaucoup de cabinets ont une file Covid-19 de telle sorte qu'elle ne croise pas la file des autres patients. Beaucoup ont mis en place la téléconsultation qui se paie normalement avec la communication du numéro de carte vitale lors de la téléconsultation". 


 
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