Depuis novembre 2020, les salles de spectacle sont fermées et le monde de la culture vit au ralenti. Alors que plusieurs théâtres sont occupés dans la région par les intermittents, plusieurs manifestations ont eu lieu ce samedi 27 mars pour demander la réouverture des lieux culturels.
"Chante la vie, chante, comme si tu devais mourir demain, comme si plus rien n’avait d’importance, comme si c’était ta dernière chance". Ces paroles, tirées de la célèbre chanson de Michel Fugain et entonnées par des musiciens réunis ce samedi 23 mars à Arras, résument à elles seules leur détresse.
Des centaines d’acteurs de la culture, inquiets pour leur avenir, se sont mobilisés pour interpeller le public sur leur monde sinistré par la pandémie. Place des Héros, ils ont pris à parti les Arrageois en chanson, tandis que dans les rues de Lille, c’est sur l’air classique des musiciens de l’orchestre national que danseurs et danseuses ont manifesté dans les rues.
Ces deux mobilisations distinctes convergeaient vers un message clair : rouvrir les lieux culturels, fermés depuis plusieurs mois désormais, et faire que la culture ne tombe pas aux oubliettes.
À Arras,"est-ce que je dois aller chanter dans les grandes surfaces, dans les TGV pour survivre ?"
Pour le troisième week-end consécutif, Flavien Riez organise ce qu’il appelle un "happening chantant" à Arras, non loin du marché alimentaire, pour interpeller le maximum de passants. Le concept : chanter en cœur des chansons à l’image d’une chorale, qu’on soit professionnel ou non. C'est aussi une manière également de se montrer.
"Est-ce que je dois aller chanter dans les grandes surfaces, dans les TGV pour survivre ? Aujourd’hui, je suis vraiment en questionnement : est ce qu’on ferme tout ou est ce qu’on réouvre doucement et progressivement ?"
"On a l’impression d’être écoutés, mais pas d’être entendus, explique ce musicien et chanteur. On fait plaisir aux gens, on met un peu de pommade sur les cicatrices qui sont pour l’instant visibles, mais elles sont beaucoup plus profondes que ça".
Selon lui, le manque de culture va laisser des traces dans la société post-Covid : "c’est essentiel qu’il y ait de la culture, pas que pour les artistes mais également pour les autres."
En se mobilisant avec d’autres artistes, il espère ainsi "allumer une petite flamme" dans la tête des décideurs et permettre à tous les amoureux de la culture de ne pas être résignés face à la situation. "Il est carrément possible d’envisager plein de choses, mais pour l’instant on se dit qu’on verra, que c’est le monde d’après. Mais c’est maintenant qu’il faut réfléchir," poursuit-il.
À Lille, danser pour ne pas être oublié
Le point de rendez-vous était donné devant l’entrée du Nouveau siècle, qui abrite l’Orchestre national de Lille (ONL). Un lieu qui n’a pas été choisi au hasard, parce que certains musiciens avaient décidé de se mobiliser auprès des structures de danse de tous les Hauts-de-France. "C’est important pour tous les arts d’être visibles et entendus", explique Mélanie Plankeele, directrice des studios Nord.
Pendant près d’une heure, amateurs et danseurs professionnels se sont succédés pour offrir des bribes de spectacles aux badauds du jour, accompagnés tantôt par les musiciens de l’ONL, tantôt par une bande de percussionnistes.
Entre deux performances, les manifestants prennent la parole. "Danser me manque réellement, c’est une torture psychologique et physique" confie l'un d'entre eux, "on a perdu tout lien social, c’est une catastrophe," ajoute un autre. Puis entrent en scène une dizaine de danseuses classiques, tutu vissé autour de la taille et masque chirurgical sur le nez. Un instant de poésie qu’on avait presque oublié.
Au nom de toutes les structures artistiques associatives, Mélanie Plankeele regrette "le manque de considération" et demande aux autorités "la réouverture des établissements culturels avec une non-refermeture". Puis les manifestants entament une déambulation dans les rues de la ville en direction de la place de la République. En dansant bien sur.