Face à la colère des gardiens de prison après une succession d'agressions, la ministre de la Justice a fait mardi "dix propositions" pour améliorer leur sécurité à Vendin-le-Vieil, où trois surveillants ont été blessés par un détenu jihadiste.
Lancée lundi, la mobilisation des surveillants est restée forte mardi, bien que moins importante, touchant des dizaines de centres pénitentiaires à travers le pays. Elle pourrait se poursuivre ce mercredi, mais de façon plus sporadique : deux syndicats de gardiens de prison attendent de voir l'évolution des discussions engagées mardi soir avec l'administration pénitentiaire et n'ont appelé à reprendre le "blocage général" que jeudi matin.
Parmi les doléances, "ce qui revient tout le temps, c'est: On joue notre vie pour 1.500 euros", a expliqué Martial Delabroye, représentant FO au centre pénitentiaire de Réau (Seine-et-Marne).
Accueillie dans la matinée à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) par une "Marseillaise" hostile des personnels réclamant des moyens, la garde des Sceaux s'est engagée à "aller vers un accroissement des effectifs des personnels d'encadrement" sur place, à étudier les transferts "d'un certain nombre de détenus" et à proposer des formations pour les surveillants.
Nicole Belloubet a également promis de "revenir dans deux mois très précisément", le 16 mars, pour vérifier que "ces propositions ont réellement pris corps".
Le centre pénitentiaire de Vendin-le-Vieil est censé accueillir en février prochain Salah Abdeslam, dernier membre vivant du commando jihadiste du 13 novembre, pendant son procès pour une fusillade en Belgique. Trois surveillants y ont été blessés à l'arme blanche jeudi par un islamiste allemand, cerveau de l'attentat contre la synagogue de Djerba (Tunisie) en 2002.
L'agression a suscité une "énorme colère" des agents pénitentiaires et provoqué lundi un mouvement national de blocage des prisons, où les syndicats réclament notamment des moyens supplémentaires pour surveiller de tels détenus radicalisés. Mme Belloubet s'est également engagée à ce qu'"un nouveau dialogue soit établi avec la direction" de Vendin-le-Vieil à propos du quartier d'évaluation de la radicalisation (QER), qui y sera mis en place dans deux mois.
La démission du directeur de l'établissement lundi n'a pas apaisé la colère des organisations syndicales, qui réclamaient des mesures de sécurité en urgence.
"Insultes" et "menaces de mort"
Alors que le président Emmanuel Macron a annoncé lundi un "plan global" pour la prison en février, deux nouvelles agressions ont attisé la grogne.
Lundi après-midi au centre pénitentiaire Pémégnan de Mont-de-Marsan (Landes), Ilyes Tafer, condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de deux jeunes gens à Echirolles (Isère) en 2012 et désormais surveillé pour risque de "radicalisation", a frappé sept agents.
Mardi matin à Tarascon (Bouches-du-Rhône), un prisonnier suivi lui aussi pour radicalisation a frappé une surveillante au visage, selon des sources pénitentiaires. Selon l'administration pénitentiaire, 96 établissements (contre 139 lundi) sur 188 ont été touchés mardi par le mouvement de protestation, "qui a essentiellement consisté en des retards de prise de service en début de journée", avec des blocages complets ou partiels, des piquets de grève, débrayages ou retards.
Le syndicat majoritaire, l'Ufap-Unsa Justice, et la CGT Pénitentiaire ont entamé mardi soir des discussions avec la Direction de l'administration pénitentiaire (DAP) pour discuter de leurs revendications communes et revaloriser un métier qui n'attire "plus personne" selon eux. Dans certains établissements, des négociations ont commencé mardi.
"Demain, les établissements qui souhaitent poursuivre le mouvement le feront. Le mouvement va se poursuivre à Vendin-le-Vieil par exemple. Mais l'appel à un blocage général ne reprendra que jeudi", a déclaré à l'AFP Samuel Gauthier, secrétaire national CGT Pénitentiaire. Selon lui, la suite du mouvement "dépendra aussi des discussions qui ont débuté ce soir à la DAP".