La Cour des comptes et le Gouvernement veulent supprimmer des sous-préfectures. Pourquoi pas celle Montreuil-sur-Mer ?
Il y a six mois, la Cour des comptes publiait un rapport de 30 pages dans lequel elle préconisait d’adapter la carte des sous-préfectures françaises (donc d'en supprimer), pour faire des économies. La Cour des comptes relevait « les écarts démographiques croissants » entre les 330 arrondissements de métropole (qui ne sont pas tous des sous-préfectures). Le rapport citait la sous-préfecture de Barcelonnette (Alpes-de-Haute-Provence) et ses 8.300 habitants en la comparant à la moyenne des 137.000 habitants d'une sous-préfecture.
L’arrondissement de Montreuil-sur-Mer étant moins peuplé que la moyenne (107.000 habitants), sa sous-préfecture était logiquement menacée par le point-de-vue de la Cour. Or, celui-ci semble aussi être devenu celui de l’Etat.
Le vice-président PS du Sénat et président du conseil général de la Drôme Didier Guillaume a en effet estimé vendredi que des sous-préfectures devraient peut-être fermer pour lutter contre les « doublons qui coûtent cher » dans l'action de l'Etat et des départements. Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls avait déjà exclu mardi tout « statu quo » sur l'implantation des sous-préfectures françaises.
Ces deux déclarations tranchent avec les prises de position du gouvernement précédent. En novembre 2009, le secrétaire d'Etat à l'Intérieur et aux Collectivités locales, Alain Marleix, avait assuré qu'il n'était pas question de remettre en cause les sous-préfectures sans exclure « mais de façon exceptionnelle, des ajustements ponctuels, notamment en milieu très urbain ».
Le reportage d'Eloïse Daviaud et Sébastien Gurak
Une menace diffuse pèse donc sur le réseau des 238 sous-préfectures françaises, mis en cause dans le rapport 2012 de la Cour des comptes, pour qui « ce niveau infra-départemental de l'administration de l'Etat devient de plus en plus inconsistant ». Sous-préfets aux champs ou en ville, ils sont actuellement 230 en métropole et 8 outre-mer, à représenter l'Etat à la tête d'un arrondissement, échelon administratif hérité du Consulat de Napoléon Bonaparte.
Dans ses recommandations, la haute autorité préconise « d'adapter la carte des arrondissements aux réalités socio-démographiques et administratives actuelles » et de « sortir des situations indécises sur l'avenir des arrondissements et des sous-préfectures les plus petits, en examinant leur situation concrète et en assurant la viabilité des sites maintenus ».
Le maintien du réseau actuel suscite de « l'émoi » au sein de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), qui dit compter 10.000 adhérents de toutes tendances politiques, représentant principalement des communes de moins de 3.500 habitants. « Nous sommes tous très attachés à la présence de l'Etat notamment pour soutenir les élus locaux au moment où l'Etat diminue le nombre de ses postes administratifs », explique à l'AFP Vanik Berberian, président depuis quatre ans de l'AMRF et maire de Gargilesse-Dampierre, commune de l'Indre de 300 habitants. Même si les demandes de cartes d'identité et de passeports peuvent désormais passer par les mairies, « la présence de l'Etat, via les sous-préfectures, reste une nécessité », ajoute M. Berberian.
« La sous-préfecture n'est plus le point de présence de l'Etat régalien voulu par Napoléon », souligne Jean-Yves Caullet, député-maire socialiste d'Avallon (Yonne). Ce préfet hors cadre, qui fut sous-préfet à Saint-Claude (Jura) et à Avallon, estime qu'un sous-préfet est « un cadre d'autorité capable de coordonner les politiques de l'Etat vis-à-vis du monde économique, associatif et des collectivités ».
« Aujourd'hui, conclut Jean-Yves Caullet, les politiques publiques ne sont plus menées seulement par l'Etat mais également par les collectivités et l'Europe et l'on pourrait imaginer que le sous-préfet soit à la fois le coordonnateur des politiques de l'Etat et aussi le relais des politiques de la région et du département. »