Le report des mesures de rétorsion de la France à l'encontre du Royaume-Uni, qui devaient entrer en vigueur ce 2 novembre, laisse la filière de la pêche dans la peur d'une issue défavorable. A Boulogne-sur-Mer, pêcheurs et mareyeurs espèrent une résolution rapide du bras de fer entre les deux pays.
La France va-t-elle interdire aux navires de pêche britanniques de débarquer leurs cargaisons dans les ports français et renforcer les contrôles douaniers de tous les camions ? La question n'est pas encore tranchée. Ces mesures de rétorsion, qui devaient entrer en vigueur le mardi 2 novembre pour répondre à la politique du Royaume-Uni accusé de délivrer trop peu de licences aux pêcheurs français pour naviguer dans ses eaux (un prérequis depuis l’accord sur le Brexit conclu in extremis fin 2020 entre Londres et Bruxelles), sont repoussées.
Le gouvernement français veut "donner une chance" aux discussions avec son homologue britannique, le temps d’une rencontre au sommet entre la France et le Royaume-Uni, jeudi 4 novembre. En attendant, de nombreux pêcheurs français se retrouvent toujours pris en tenaille – 210 licences ont été accordées fin octobre, alors que la France en demande 244 et que de nombreux pêcheurs de Boulogne-sur-Mer sont encore sans licence.
"Attitude inadmissible des Anglais"
Une situation de flottement qui inquiète les acteurs de la pêche. Olivier Leprêtre, président du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins des Hauts-de-France, regrette "l'attitude inadmissible des Anglais et leur non-respect des accords signés". Selon lui, "les mesures de rétorsion" sont la "seule solution" dans ce bras de fer entre les deux pays. "Boris Johnson ne va pas en rester là", annonce Olivier Leprêtre, qui craint qu’au "moindre problème" des bateaux français soient "détournés".
Patron du bateau boulonnais le Laurent-Geoffrey, Laurent Merlin attend toujours une licence et regrette que "le temps passe avec la crainte de ne rien avoir". "C’est du stress qu’on emmagasine", dit celui qui a "une entreprise de quatre employés à faire tourner" et craint de disparaître sans cette licence. "Actuellement, ce sont des mois où on devrait être dans les eaux anglaises. Là, on pêche 25 à 30 kilos de soles, alors qu’on pourrait monter à 70 kilos", regrette celui qui subit la concurrence des pêcheurs belges et néerlandais dans les eaux françaises.
"On ne peut pas rester dans l'incertitude"
Pour Aymeric Chrzan, secrétaire général du syndicat général des mareyeurs boulonnais, ce report des sanctions ressemble à un sursis. "Avec ces mesures [de retorsion], ça aurait été extrêmement compliqué pour nous. L’approvisionnement anglais à Capecure [le centre boulonnais de transformation et de commercialisation des produits de la mer] est indispensable, cela représente trois à quatre fois ce qui est en vente à la criée." Le mareyeur espère un "consensus" entre la France et le Royaume-Uni à propos des licences de pêches post-Brexit. "Les Britanniques ont besoin du marché européen et nous, on a besoin des produits britanniques."
? Licences de pêche : "Je veux bien les 48h de plus mais il faut être sacrément dur avec les Britanniques"
— Info France 2 (@infofrance2) November 2, 2021
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Le report des sanctions a également fait réagir le président des Hauts-de-France. "Je veux bien les 48 heures [de négociations] de plus mais il faut être sacrément dur avec les Britanniques. Si vous n’êtes pas prêt à faire un bras de fer très dur avec les Britanniques, vous perdez à coup sûr." Xavier Bertrand ne souhaite ni une "guerre de la pêche" ni une guerre "commerciale" avec le Royaume-Uni mais ne veut pas voir des pêcheurs disparaître.