Deux passeurs ont été condamnés ce mercredi 18 décembre à six et trois ans de prison ferme par le tribunal de Boulogne-sur-Mer pour homicide involontaire et aide au séjour irrégulier, après la mort d'une femme migrante dans la Manche lors d'une traversée clandestine vers l'Angleterre.
Le tribunal de Boulogne-sur-Mer a condamné deux passeurs à six et trois ans de prison ferme pour homicide involontaire et aide au séjour irrégulier après la mort de Mitra M., une Iranienne de 31 ans lors d'une traversée clandestine vers l'Angleterre.
Selon les autorités françaises, elle a été vraisemblablement la première femme migrante à mourir noyée dans la Manche au cours de ces traversées clandestines d'exilés vers l'Angleterre.
Cette titulaire d'un master de psychologie avait embarqué le 9 août sur un bateau pneumatique aux côtés de 19 irakiens et iraniens, dont sept mineurs. A court d'essence, sans rames, l'embarcation avait été secourue par la marine britannique mais trois personnes s'étaient auparavant jetées à l'eau.
Deux hommes avaient été repêchés vivants, mais Mitra M. était portée disparue avant que son corps ne soit retrouvé sur une plage des Pays-Bas le 18 août.
Les autorités françaises avaient interpellé le 7 octobre sur l'autoroute A6 les deux passeurs, un Afghan de 31 ans et un Néerlandais d'origine guinéenne de 44 ans. Selon l'enquête, les deux individus ont acheté huit bateaux et permis la tentative de traversée de 84 personnes migrantes en l'espace de deux mois.
59 000 euros par passage
A la barre du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), l'Afghan a nié toute implication dans l'organisation des passages mais admis avoir "aidé à charger des bateaux dans le véhicule" pour financer sa traversée. Face à lui, le président s'est appuyé sur des écoutes "très précises" dans lesquelles l'homme évoque "l'achat de bateaux", "des passages à 3.500 euros par client" et "la police présente sur la plage".
Le Néerlandais a accepté de transporter des bateaux destinés à la traversée. En contact, les deux hommes avaient multiplié les aller-retours pour acheter les embarcations pneumatiques et les amener sur le littoral.
Rappelant la dangerosité des passages par voie maritime, la procureure a évoqué un réseau très lucratif. "Avec une vingtaine de migrants sur une embarcation, on peut estimer que cela rapportait 50.000 livres (59.000 euros) par passage. Ces personnes acceptent de s'enrichir en profitant de la détresse humaine", a-t-il dénoncé. Le tribunal a également prononcé un maintien en détention et une interdiction définitive du territoire français pour les deux hommes.
Depuis la fin 2018, les tentatives de traversée se sont multipliées dans la Manche malgré le danger lié à la densité du trafic, aux forts courants et à la faible température de l'eau. En 2019, 254 opérations de sauvetage ont été réalisées, impliquant 2.521 personnes migrantes qui tentaient de rejoindre l'Angleterre par la mer, selon un bilan actualisé de la préfecture maritime.