1940, la bataille de France au jour le jour : 31 mai, 68 000 hommes évacués de Dunkerque en une journée

EPISODE 23 - C'était il y a 80 ans. Le début de la Seconde Guerre Mondiale. La journée commençait par une nouvelle tragédie en mer avec le naufrage du Siroco, touché par des bateaux et des avions allemands. 68 000 hommes étaient évacués de Dunkerque tandis qu'un cessez-le-feu se négociait à Lille.

Un peu après minuit, le torpilleur Siroco quitte Dunkerque avec 930 hommes à bord, dont 750 fantassins du 92e régiment d’infanterie.
 


Jusqu’ici le Siroco et son capitaine, Guillaume de Toulouse-Lautrec, ont eu de la chance. En trois semaines dans le détroit du Pas-de-Calais, ce navire a coulé plusieurs sous-marins allemands. Le 11 mai, au large des Pays-Bas, il a été touché par une bombe de Stuka mais celle-ci n’a pas explosé. Il a aussi échappé à l’attaque d’une vedette rapide allemande le 21 mai.
 


Mais cette fois, au large de Nieuport, le Siroco est attaqué par deux vedettes allemandes. Après avoir évité deux premières torpilles, le navire est touché. Les hélices sont hors d’usage.
 


Immobilisé, le Siroco est alors bombardé par un avion allemand. Les soutes de munitions sont touchées. Le torpilleur français explose. Deux navires britanniques et un torpilleur polonais, le Blyskawica, viennent en aide aux survivants qui nagent dans une épaisse nappe de mazout.
 


Sur les 930 hommes d’équipage et soldats à bord du Siroco, seuls 270 en réchappent, dont son capitaine.

Un nombre record d'évacuations

 
A partir de 7h30, le Camp des Dunes est déplacé à hauteur du Sanatorium de Zuydcoote pour être plus près de Dunkerque. 70 000 soldats français y sont regroupés. Les Anglais embarquent désormais des plages à l’est du Sanatorium, les Français des plages à l’ouest.
 


Marc Bloch, officier d'état-major, cherche un navire pour embarquer vers l’Angleterre. Il traverse Dunkerque : "Je conserve un souvenir aigu de la ville en décombres, avec ses façades creuses, sur lesquelles flottaient de vagues fumerolles et, épars parmi ses rues, moins des cadavres que des débris humains. J’ai dans les oreilles encore l’invraisemblable fracas qui, comme le final au terme d’un opéra, vint peupler de ses sonorités nos dernières minutes, sur les rives de la Flandre : éclatements de bombes, éclatements d’obus, tac-tac des mitrailleuses, tirs de DCA".
 


Dans la soirée, Marc Bloch quitte la jetée du port de Dunkerque à bord d’un bateau anglais, le Royal Daffodil : "Un admirable soir d’été déployait sur la mer ses prestiges. Le ciel d’or pur, le calme miroir des eaux, les fumées, noires et fauves, qui s’échappant de la raffinerie en flammes, dessinaient, au-dessus de la côte basse, des arabesques si belles qu’on en oubliait la tragique origine… tout dans l’atmosphère de ces premières minutes de voyage, semblait conspirer à rendre plus pleine l’égoïste et irrésistible joie d’un soldat échappé à la captivité".
 


Marc Bloch arrivera sain et sauf en Angleterre pour repartir vers Cherbourg. Pour lui, le combat peut continuer. Après l’armistice, il s’engagera dans la résistance. En juin 1944 il sera assassiné par la Gestapo.
 


Ce 31 mai, le Premier ministre britannique Winston Churchill est à Paris pour un conseil suprême interalliés. Il décrète ce vendredi "Journée des Français", demandant à la Royal Navy d’embarquer davantage de soldats français.

Au Sanatorium de Zuydcoote, transformé en énorme hôpital de campagne, les blessés qui peuvent marcher sont rassemblés pour une évacuation.

Parmi eux le soldat Jean Beauvalot, originaire de Craywick : "Ici, au milieu de la plaine, il y avait un drap immense de la Croix Rouge pour montrer aux avions allemands que c’était un hôpital militaire. Les pilotes allemands passaient parfois au-dessus de nous - je ne sais pas si c’était pour nous narguer - en battant des ailes ou en nous faisant signe du bras. Le vendredi 31 mai, il y avait peut-être 150 ambulances ici".
 

Jean Beauvalot, ancien combattant, témoigne dans le documentaire "Dunkerque 1940" réalisé par Bernard Claeys et diffusé le 28 mai 1978 dans l'émission "Hexagonal, Histoire de France" (FR3).


"Nous avons eu l’ordre - tous les blessés français qui pouvaient se déplacer par eux-mêmes sans aucune aide - de nous rassembler pour embarquer à Dunkerque. Nous avons réussi à embarquer le long de la jetée Ouest, sur deux navires. C’étaient des malles, des bateaux qui faisaient habituellement Boulogne-Folkestone ou Calais-Douvres. Des navires assez longs qui étaient tout au bout de la jetée Est. Et moi, j'ai embarqué sur le Lady of Mann".
 


Malgré les lourdes pertes en mer, 68 000 soldats seront embarqués ce 31 mai vers l’Angleterre. Un record qui ne sera plus égalé d’ici la fin de l’Opération Dynamo.
 


Ce 31 mai, c'est aussi le jour où la Royal Air Force et la DCA abattent le plus d’avions allemands au-dessus de Dunkerque : 77 en cette seule journée.

A Paris, Churchill assure également à ses alliés que les Britanniques défendront le périmètre de Dunkerque aussi longtemps que les Français : "Bras dessus, bras dessous". Mais au même moment à Dunkerque, le général britannique Gort se rend au QG français dans le bastion 32 pour annoncer son départ. Il est remplacé à la tête des forces britanniques par le général Alexander qui ordonne l’embarquement immédiat de toutes les forces britanniques.
 


A minuit, les défenseurs britanniques de la poche de Dunkerque quittent le secteur de La Panne et Bergues pour se replier vers les plages.

Pour faire face au départ des Britanniques, le général Janssen fait reculer ses hommes jusqu’à Uxem, derrière les marais inondés.
 


La poche de Dunkerque se réduit un peu plus. Le général Janssen s’installe dans le Fort des Dunes à Leffrinckoucke. Pour défendre l’est de Dunkerque, il lui reste la 12e DIM, le 27e GRPI et des éléments d’infanterie du Secteur Fortifiés des Flandres, soit 8000 soldats français face à 72 000 Allemands selon l’historien Dominique Lormier.
 


Les Allemands attaquent Bergues après d’importants bombardements qui détruiront la charpente en bois du Beffroi.
 


Dans les remparts, tirailleurs tunisiens et fantassins français tiennent bon et repoussent les assauts.
 

 

Cessez-le-feu à Lille


A Lille, la situation devient impossible pour les Français encerclés. Les Allemands progressent au cours de violents combats de rue. A 17h, le quartier Canteleu à Lambersart est pris. Les Français détruisent leurs armes avant de se rendre.
 


A Loos, des soldats du 9e Régiment de Dragons contre-attaquent une dernière fois avec un char et deux chenillettes. Ils ramèneront 11 prisonniers allemands. Mais à 18h, les derniers défenseurs de Loos doivent déposer les armes, à court de munitions. A Haubourdin aussi, les Français puisent dans leurs dernières ressources.

A 20h30, le général Jean-Baptiste Molinié rencontre le général allemad Kurt Waeger dans une maison de la rue de la Rache à Haubourdin, à quelques dizaines de mètres du pont du Moulin Rouge pour lequel les tirailleurs de la 5e Division Nord-Africaine se battent depuis trois jours.
 


Les deux généraux se mettent d’accord sur les termes de la reddition. Les Français peuvent conserver leurs armes et leurs positions jusqu’au lendemain. Le cessez-le-feu est ordonné à 22h.


► La suite de notre série demain avec la journée du 1er juin 1940. Vous pouvez relire les épisodes précédents dans le récapitulatif ci-dessous :
 

 

 

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