En voilà au moins une qui se réjouit de la pluie incessante de ce printemps. La limace a envahi nos jardins. Le gastéropode adore la douceur humide de la saison. Maraîchers et jardiniers s'en accommodent tant bien que mal.
Douceur et pluie, le cocktail parfait des gastéropodes. Limaces et escargots prolifèrent en ce printemps 2024. De quoi compliquer un peu les cultures. Maraîcher à Saint-Omer, Gaël Delannoy des "Jardins du marais" reconnait que "c'est compliqué". La terre est humide et ne sèche pas. "Les limaces se font plaisir", sourit-il. "C'est une année exceptionnelle, il y a tellement d'humidité". Impossible de quantifier les pertes pour le moment, "on se débrouille".
Un temps à limaces
Car les limaces sont gourmandes. On connait leur goût pour le chou et la salade, mais elles grignotent de tout. Egalement maraicher dans l'Audomarois, David Lothmann nous répond tout en désherbant ses carottes. Quatre ans qu'il a lancé ses "Légumes de David" : 9000 mètres carré cultivés à Loison-sur-Créquoise. "C'est terrible !", nous dit-il avec une pointe d'humour. "C'est un vrai temps à limace ! Elles se promènent gratuitement". L'humidité favorise en effet la sécrétion de mucus et donc la rapidité de déplacement des petites bestioles gluantes.
Maraichers ou jardiniers amateurs, tous parlent d'une année exceptionnelle. Pourquoi une telle prolifération ? D'abord, il y a la douceur des températures de ce printemps et l'humidité, nous l'avons dit, mais ce n'est pas la seule raison. "Une limace pond environ 500 œufs", explique François-Xavier Gabriel, responsable du secteur manufacturé d'une jardinerie de Villeneneuve d'Ascq. "Le manque de gelée l'hiver dernier a favorisé cette prolifération". Sans compter le manque de prédateurs, oiseaux et autres lézards, de plus en plus rares dans nos espaces naturels.
Comment lutter contre les limaces ?
Dans le rayon du commerce, les produits les plus utilisés pour lutter contre les limaces sont déjà en rupture. Il a fallu relancer les commandes de Ferramol, un phosphate ferrique qui coupe la faim des gastéropodes. "On est déçu du coup", regrette un client. "On a beaucoup de problèmes avec ça. Tout est mangé. Les salades, les potirons, tout part". Également dépité, un autre va tenter un "paillage de chanvre", mais pas aussi efficace.
A chacun sa petite astuce : "Je vais tenter la cendre de bois", nous confie une cliente de la jardinerie. "J'ai aussi vu qu'on pouvait mettre une herbe qui accroche. Et puis, quand il y en a vraiment beaucoup, je les enlève à la main. Désolée Mère Nature, mais je les mets dans l'eau vinaigrée. Je les tue en fait". Bière, cuivre, géraniums… Les bons plans sont nombreux, mais insuffisants face à l'invasion de ce printemps. Pour le responsable du rayon de la jardinerie, le problème est ailleurs : on nettoie trop nos jardins selon lui.
Les jardins sont trop propres. (…) La limace mange les salades, les tomates en dépit. Ce ne sont pas ses mets préférés. Ses mets préférés, ce sont les mousses, le lichen, les plantes en décomposition. Si on met des détritus, elle mangera les détritus.
François-Xavier Gabriel, responsable "produit manufacturé" d'une jardinerie
Le gastéropode est même très utile quand il n'envahit pas tout. Pour le maraicher David Lothmann, la limace est un "allié au quotidien", indispensable au processus de décomposition des éléments. En dégradant les paillages, elle joue un rôle dans la chaine alimentaire et le cycle de régénération de la nature. "J'étais bien content avant le printemps". Alors il fait avec. "On perd du temps, de l'argent. Ça crée des dégâts, mais on ressème. Il faut s'adapter et accepter".
Pour éviter une telle prolifération l'année prochaine, il faudra donc espérer une météo plus clémente et prendre quelques mesures : éviter les pots et les pierres à la fin de l'été, nettoyer pour détruire au maximum les œufs. Le seul moyen pour éviter un "feu d'artifice", conclut-on à la jardinerie.