Le sort de la Zone à Faibles Emissions (ZFE) de la Métropole Européenne de Lille (MEL) pourrait être scellé lors du prochain conseil métropolitain. Alors que les consultations publiques penchaient pour une zone limitée pour les véhicules dotés de vignettes crit'air 4, 5 et non classés dans 95 communes. Le vote devrait se pencher uniquement sur le cas des véhicules hors classe. Un projet décrié par les écologistes.
"C'est une démission politique face à un problème de santé publique". Deux jours après la conférence des Maires, qui s'est tenue le 1er octobre, les mots de Stéphane Baly, co-président du groupe Lille Verte, sont forts.
La MEL devrait finalement mettre en place une Zone à Faibles Emissions (ZFE) impactant uniquement les véhicules non classés, alors que le projet initial visait à limiter les vignettes Crit’Air 4, 5 et les véhicules non classés. Pour les écologistes, cette revue à la baisse est considérée comme un "abandon" du projet de ZFE.
La ZFE, le fruit d'un long processus de consultation
Alors que son objectif est de "critériser la pollution des véhicules, les classer selon une nomenclature, et les limiter dans certains secteurs", détaille la sociologue spécialisée en environnement et eurodéputée écologiste Majdouline Sbai, la ZFE est un feuilleton qui dure depuis presque cinq années dans la Métropole.
Le 28 juin 2019, la MEL s'était engagée à créer une ZFE à l'échelle d'un périmètre de 11 communes. Trois ans plus tard, l'objectif est fixé : la ZFE s'appliquera aux véhicules arborant les vignettes 4, 5 et non classées dans 95 communes. Dès lors, s'est entamé un processus de consultation publique entre les mois de janvier et février 2024, pour laisser les métropolitains s'exprimer sur le scénario qui leur paraissait le plus favorable.
Au mois d'avril 2024, les résultats de cette consultation tombent. Près de 4 200 habitants de la Métropole Européenne de Lille se sont exprimés, 62% d'entre eux ont voté en faveur de l'interdiction des véhicules Crit’Air 4, 5 et non classés sur 95 communes de la MEL.
Mais après le grand public, les parties prenantes ont à leur tour été consultées. Une "trentaine" de communes auraient émis un avis défavorable au scénario qui avait conquis lors de la consultation publique, et une autre "trentaine" aurait émis un avis favorable, témoigne Stéphane Baly. Bref, une équité presque parfaite, même s'il "y avait une légère majorité pour le non" ajoute Majdouline Sbai.
Le scénario finalement retenu aurait été annoncé lors de la Conférence des Maires qui s'est tenue le 1ᵉʳ octobre 2024, et serait soumis au vote lors du prochain conseil métropolitain : la ZFE concernera uniquement les véhicules non classés. Exit, les vignettes Crit'air 4 et 5, donc.
Contacté à ce sujet, Sébastien Leprêtre, Vice-Président de la MEL en charge des mobilités et des transports publics affirme ne rien pouvoir "confirmer en l'état". Mais les écologistes n'ont pas attendu de validation officielle pour exprimer leur mécontentement.
Une "décision punitive pour la totalité de la population"
Pour Stéphane Baly, réduire l'application de la ZFE seulement aux véhicules non classés consisterait en un "abandon." Parce qu'à l'échelle de la Métropole Européenne de Lille, le nombre de véhicules non classés est dérisoire.
En 2024, la Métropole Européenne de Lille comptabilise 7174 véhicules particuliers non classés contre 41 763 véhicules de classe 4 ou 5. "Le fait de réguler exclusivement la circulation des véhicules hors catégorie, ça touche une part infime du parc automobile. Cela n'aura pas d'impact en termes de santé publique, pas l'impact que l'on espérait" se désole Majdouline Sbai.
Son confrère Stéphane Baly, propose la même analyse. "On nous parle souvent d'écologie punitive. Mais cette décision est punitive pour la totalité de la population. C'est antisocial." L'écologiste estime que cette décision est le résultat de "mauvaises décisions : le périmètre et l'absence de soutien."
Il ne faut pas croire que les écolos sont contre toutes les voitures.
Stéphane Baly
En effet, les Verts plaidaient pour une ZFE concentrée en hypercentre de la Métropole. "On a porté d'arrache-pied que ce périmètre de ZFE soit à peu près calé sur les communes où il y a un tramway, une ligne de métro ou une liane", relate Stéphane Baly. Or, le projet s'est finalement étendu à 95 communes. Il ajoute : "La MEL et l'État n'ont pas été au rendez-vous de l'accompagnement financier des ménages pour l'acquisition de nouveaux véhicules. Il ne faut pas croire que les écolos sont contre toutes les voitures."
Le groupe Métropole Écologiste Citoyenne et Solidaire (MECS) a donc fait savoir par voie de communiqué : "La MEL a elle-même créé les conditions d'une ZFE inacceptable, en optant pour un périmètre insensé et en se contentant d'un simulacre de concertation. (...) Alors qu'à quelques kilomètres, en Belgique, les métropoles adoptent des règles plus contraignantes, alors qu'ailleurs en France les ZFE lancées il y a quelques années ont montré leur efficacité sur l'amélioration de la qualité de l'air."
Le conseil métropolitain, prévu le 18 octobre prochain, devrait permettre d'y voir plus clair.