Au petit matin du 22 septembre, des migrants ont été victimes de tirs de balles en caoutchouc sur la plage de Dunkerque. C'est la première fois que l'utilisation de ce type d'arme est recensé à la frontière franco-britannique. La préfecture défend un usage "proportionné" de la force.
C'est le Daily Mail qui est le premier à titre sur l'affaire, le 1er octobre : "La police française ouvre le feu sur le canot pneumatique d'un groupe de migrants sur la place de Dunkerque, avec des balles de caoutchouc potentiellement mortelles, pour les empêcher de traverser vers le Royaume-Uni". Notre confrère britannique, soutenu par de nombreuses photos et vidéos, relate les faits qui se seraient déroulés au petit matin du 22 septembre.
Selon des témoins, le feu aurait été ouvert alors qu'un groupe de migrants iraniens portait leur canot pneumatique pour pouvoir le mettre à l'eau, ce qui a entraîné une "bruyante altercation" avec les forces de police. Deux personnes auraient été sévèrement blessés, dont un irakien de 24 ans dont la jambe a été fracturée par un tir à bout-portant. "Ceux qui portaient le bateau affirment que le groupe de policers armés riait alors que leurs camarades blessés tombaient au sol", écrit le Daily Mail."Quand la police nous a vu, ils ont dit "Stop", et on s'est arrêtés. Mais ils ont tiré quand même, alors on s'est enfuis du mieux qu'on a pu" rapporte encore un des migrants visés.
Faire vérifier cette information sur le sol français s'est d'abord avérée extrêmement difficile : le service communication des pompiers du Nord (présents sur la vidéo de l'intervention), tous comme les services communications de la préfecture, semblaient découvrir l'incident. Les associations de terrain n'avaient pas non plus eu d'écho sur la situation, un fait assez rare pour être souligné. L'Auberge des migrants a depuis dénoncé une "escalade de la violence policière. Rappelons que cette arme, qui a déjà éborgné de nombreux manifestants français, est létale. Jusqu'où ira cette violence ?"
En janvier 2021, la commission d'enquête de l'Assemblée Nationale avait publié un rapport qui recommandait d'interdire le lanceur de balles de défense en manifestaiton, reconnaissant notamment la capacité de l'arme à occasionner des blessures graves, et notamment des fractures. A faible distance, le tir peut occasionner des blessures fatales. Son prédecesseur, le flashball, réputé moins précis et moins puissant, avait déjà démontré sa dangerosité après la mort d'un homme touché au ventre, et décédé de plaies intestinales.
La préfecture a finalement diffusé un laconique communiqué, suite aux sollicitations de France 3. L'autorité confirme une opération de lutte contre l'immigration clandestine. "Lors de cette opération, un équipage des forces de l'ordre a été pris à partie de manière agressive par des migrants. Les policiers ont fait un usage proportionné de la force, avec les moyens dont ils disposaient, intégrant l'usage de flashball. A ce stade, aucun élément ne permet d'établir un lien entre l'action de la police et les blessures constatées" estime la préfecture, faisant fi des images documentées par le Daily Mail.
C'est au moins la deuxième fois qu'une telle arme est utilisée contre des exilés à la frontière franco-britannique*. Fin janvier 2021, un demandeur d'asile avait déposé plainte contre X devant le procureur de Boulogne, pour "violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique". Cité par FranceInfo, la préfecture avait estimé que "c'est "pour rétablir le calme" qu'usage avait été fait "de plusieurs grenades lacrymogènes et de cinq tirs LBD", mais encore une fois sans voir de lien entre l'usage de l'arme et la blessure de l'homme.
*Notre première version affirmant qu'il s'agissait d'une première occurrence a été modifiée à la lumière de nouvelles informations.