ENVIRONNEMENT. "Sauver la qualité de vie des oiseaux, c'est sauver la nôtre aussi", prévient un ornithologue face à la disparition massive des espèces

Vous êtes-vous arrêtés dans vos activités pour observer le bal des oiseaux à l'horizon ? Leurs chants mélodieux vous a-t-il déjà réveillés ? Il est possible qu'un jour, ce son ne soit plus qu'un lointain souvenir. Que pouvons-nous faire à petite échelle ? Philippe Carruette, ornithologue et responsable pédagogique au parc du Marquenterre, a pris le temps de nous répondre.

Le constat des espèces d'oiseaux en voie de disparation s'aggrave. Le dernier rapport sur l'état mondial de cette population, publié par BirdLife International, est alarmant. Les oiseaux constituent de véritables baromètres de la santé de notre terre, il est de la responsabilité de tous d'en prendre soin.

Quelle est la cause ?

"Les raisons sont multiples, déclare en préambule Philippe Carruette, ornithologue. La baisse de la biodiversité est liée à notre modèle économique". L'expansion et l'intensification de l'agriculture sont la menace majeure des espèces en danger.

Il détaille : "l'agriculture intensive, la mécanisation accrue sont nocives et défavorables à la biodiversité. Les prairies sont converties en terres cultivées. Ce qui compte c'est le rendement ! Il faut produire plus vite, au prix le plus bas possible et pour cela, on va faire disparaître les terres d’élevages, les prairies, les haies qui les entourent. En d'autres termes, ce qui constitue le garde-manger des oiseaux : les insectes !"

Depuis quelques années, on assiste à la construction quasi frénétique de zones industrielles et commerciales. Pour les construire, on assèche les zones humides comme les bocages, les mares et on détruit les vergers. Or, lorsque les oiseaux migrateurs comme les passereaux vont traverser notre pays, ils recherchent ces zones humides pour reconstituer leurs réserves de graisse en prévision de leur prochaine étape.

La modification de leur habitat amoindrit de ce fait la qualité et la quantité des haltes migratoires. Le lien de cause à effet est immédiat, les espèces d'oiseaux comme les passereaux, les rouges-gorges, les hirondelles diminuent fortement.

La protection de l'environnement, c'est un bien collectif. On ne doit pas être contre les agriculteurs mais travailler ensemble.

Philippe Carruette

Ornithologue et responsable pédagogique au parc du Marquenterre

Les produits chimiques

Pour Philippe Carruette, le constat est clair : "On paie l'impact de ce qui s'est passé il y a cinquante ans. Les sols ont été gorgés de pesticides et herbicides en tout genre. En économie on peut rayer la dette, en écologie on la paie. Pour notre ornithologue, "la protection de l'environnement est un bien collectif et c'est pour cette raison que c'est compliqué, si c'était un bien individuel chacun s'en serait emparé. Mais nous pouvons agir ensemble !"

Le changement climatique

C'est indéniable, le rapport BirdLife International précise que le changement climatique impacte 34% des espèces.La chaîne alimentaire principale des oiseaux est insectivore, en densité ce sont les êtres vivants les plus nombreux sur terre.

Mais la disparition des zones humides et des haies, l'utilisation intensive des pesticides, herbicides et fertilisants, la pollution lumineuse ainsi que le réchauffement climatique ont raison des invertébrés. Cette année, il y a très peu d'insectes. De mauvais augure pour nos volatiles.

En économie on peut rayer la dette, en écologie on la paie.

Philippe Carruette

Ornithologue et responsable pédagogique au parc du Marquenterre

Agir concrètement

Pour Philippe Carruette, le constat est simple : "La nature est une valeur intrinsèque de l'humain, si on appauvrit la nature on s'appauvrit". Que vous viviez en appartement ou en maison, en ville ou à la campagne, tout le monde peut apporter sa pierre à l'édifice. Il nous livre ses conseils.

  • Promenez-vous régulièrement dans la nature ou un parc, afin d'observer et prendre conscience de la richesse qui nous entoure.
  • Soyez curieux, bannissez l'indifférence.
  • Aidez les personnes soucieuses de l'environnement dans leur modèle économique dans la mesure du possible, en favorisant le circuit court. Acheter vos légumes ou vos œufs fermiers au marché ou chez un fermier à proximité.
  • Adhérez à une association de protection de la nature.
  • Si vous avez un jardin, laissez un petit coin de pelouse que vous tondrez moins, les insectes pourront s'y nicher.
  • Une tonte annuelle ou bisannuelle de vos haies est suffisante et profitable à la faune.
  • Variez vos types de haies, en y plantant des noisetiers, des aubépines, des charmes... Les troènes sont feuillus toute l'année mais se révèlent un habitat pauvre pour les oiseaux.
  • Associez l'utile à l'agréable, en plantant des arbustes fruitiers accessibles à tous comme des framboisiers, cassis, groseilliers, ce qui ravira en plus vos papilles.

 Appliquer ne serait-ce qu'un seul de ces conseils, c'est faire beaucoup pour la nature.

Mettre en place des mesures de protection de l'habitat des oiseaux c'est agir. L'être humain est bien dans sa peau quand il agit !

Philippe Carruette

Ornithologue et responsable pédagogique au parc du Marquenterre

"Les contraintes à court terme sont des richesses à long terme. Dans la nature on doit se faire plaisir", martèle Philippe Caruette. Nous ne sommes pas là pour la conserver mais l'enrichir. Il est capital de vivre en harmonie avec la faune. Nous pouvons vivre ensemble. Ça n'est pas parce qu'un couple d'hirondelles a élu domicile dans votre garage, ou votre atelier que vous ne pouvez plus y pénétrer. Au contraire. Vous pourrez observer jour après jour la beauté de la création animale. Bien sûr, il y aura des excréments mais ça vous aidera à réaliser un bon nettoyage avant l'automne ! Si des oiseaux font leur nid près de votre corde à linge, vous pouvez continuer à le pendre, en évitant de le faire juste devant leur nid."

Bon à savoir

Si vous souhaitez faire un nichoir à insectes, pas besoin de l'acheter dans le commerce. Un cageot, quelques pommes de pin, un petit tas de bois, ou des petites branches, des herbes sèches et le tour est joué.

Quant aux mangeoires, pensez à les désinfecter régulièrement, afin d'éviter les contaminations entre espèces. Faites simple, des graines de tournesol sont suffisantes. En retour, les oiseaux chanteront peut-être sous vos fenêtres en guise de remerciements.

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