Guerre à Gaza et blocage d'une école de journalisme : pour ces étudiants, le traitement médiatique du "génocide en cours" n'est pas à la hauteur

Devant les universités du monde entier les mobilisations en soutien au peuple palestinien se multiplient. Les établissements lillois ne font pas exception. Pour la première fois en dix ans, l'une des premières écoles de journalisme du pays a été bloquée : tout un symbole.

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Des drapeaux palestiniens, des keffiehs noirs et blancs, parfois même des toiles de tentes…À Sciences-Po Paris, Lyon ou encore Bordeaux, devant les facs de Sydney, de Mexico et dans les prestigieuses universités américaines telles que Columbia, Yale ou NYU : de nombreux jeunes manifestent leur soutien aux palestiniens. 

Cette semaine, Lille ne faisait pas exception. On trouvait ainsi portes closes pour l’École Supérieure de Journalisme (ESJ) de Lille, ce jeudi 2 et ce vendredi 3 mai 2024. Des jeunes aspirants journalistes ainsi que des étudiants de Sciences-Po et des différentes facs de Lille ont bloqué l’école s’étaient réunis pour demander un cessez-le-feu immédiat à Gaza. “C’est l’humanité qu’on assassine ! Enfants de Gaza, enfants de Palestine”, scandaient les étudiants.

"Que les Palestiniens ne tombent pas dans l'oubli"

On demande un cessez-le-feu. Particulièrement, en tant qu’étudiants, quand on sait qu’il n'y a plus d’universités à Gaza, que tout a été détruit” explique Nora*, 24 ans, étudiante à l’ESJ. Elle ajoute : “On veut mettre le focus sur Gaza, parler de ce qui se passe, pour que les Palestiniens ne tombent pas dans l’oubli”. 

Une action ce lundi 6 mai à l’Université de Lille 3

Anaïs Gourgand, présidente de l’UNEF à Lille, abonde : “On pense que c’est vraiment important ce qui se passe en ce moment, il y a un génocide en cours en Palestine. Le gouvernement français ne dit rien, voire soutient Israël en envoyant des armes.” Pour la représentante syndicale, “le fait que les jeunes s’engagent pour dénoncer le génocide, que la mobilisation se répande aux États-Unis, à Sciences-Po, c’est une bonne nouvelle.”

Le fait que les jeunes s’engagent pour dénoncer le génocide, que la mobilisation se répande aux États-Unis, à Sciences-Po, c’est une bonne nouvelle.

Anaïs Gourgand

présidente de l’UNEF à Lille

Ce lundi 6 mai, un rassemblement est d’ores et déjà prévu devant l’Université de Lille 3, à 18 heures, alors que les cours et les examens devraient reprendre à la fac. Parmi les attentes des jeunes : une prise de positions de la part du gouvernement et des universités et l’arrêt des ventes d’armes de la France à Israël.

"On veut envoyer un signal à la profession" 

Pour les étudiants en journalisme, les revendications s’adressent aussi aux médias. “On veut envoyer un signal à la profession et au public”, explique Nora, l’étudiante de l’ESJ. “On n’est pas du tout solidaires de la façon dont est traité le conflit dans les médias de grande audience.”

Les étudiants de l’ESJ mobilisés cette semaine, qui n’ont pas de porte-parole et n’ont pas encore fait la liste exhaustive de leurs revendications, appellent la profession à “respecter l’article 1 de la charte de Munich”, précise Nora. Ce dernier impose aux journalistes de “respecter la vérité (...) et ce, en raison du droit que le public a de connaître”. La jeune étudiante parle d’une “faillite” des médias concernant le traitement journalistique du conflit israëlo-palestinien.

Les victimes sont déshumanisées, on n’évoque que le nombre de morts, sans parler des gens.

Nora, 24 ans

étudiante à l’ESJ

Plusieurs points font défaut selon Nora : “les victimes sont déshumanisées, on n’évoque que le nombre de morts, sans parler des gens”, “on constate un double standard entre le traitement médiatique de la guerre en Ukraine et de la situation à Gaza”.

Les jeunes journalistes voudraient que certaines informations soient davantage diffusées dans les médias, comme le risque de génocide dont a alerté récemment la Cour de Justice Internationale

Des actions locales pour l’ouverture de débats 

Avec ces mobilisations étudiantes, les jeunes attendent des actions concrètes pour arriver à un cessez-le-feu, comme l’explique Anaïs Gourgand. “On pense que s’il y avait des mobilisations partout dans le monde, ça aurait un impact sur les politiques menées par les gouvernements et sur les soutiens à Israël”, précise ainsi la présidente de l’UNEF Lille.

L’étudiante syndicaliste déplore que “les possibilités de débats sont limitées au maximum”. “On l’a bien vu avec l’annulation par l’université de Lille de la conférence de Jean-Luc Mélenchon et de Rima Hassan sur la Palestine”, explique-t-elle. 

On pense que s’il y avait des mobilisations partout dans le monde, ça aurait un impact sur les politiques menées.

Anaïs Gourgand

présidente de l’UNEF à Lille

Ce jeudi 2 mai, la ministre de l’Enseignement Supérieur, Sylvie Retailleau, a par ailleurs demandé aux présidents d' université de "faire usage de toute l'étendue des pouvoirs qui leur sont conférés" pour maintenir "l'ordre public dans leurs établissements".

Pour l’UNEF de Lille, “ces annonces de Sylvie Retailleau sont très inquiétantes”. Les étudiants n’ont en tout cas pas prévu de s'arrêter. “On continuera à se mobiliser”, affirme Anaïs Gourgand.”Car on ne peut pas laisser faire comme ça, dans le silence.

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