Le propriétaire d'Ascoval abandonne son projet de délocalisation en Allemagne d'une partie de l'activité du sidérurgiste nordiste. Soulagés, les syndicats saluent la mobilisation qui a permis cette décision, Emmanuel Macron s'en félicite.
"Après trois jours de mobilisation, c'est une bonne nouvelle". Nicolas Lethellier est le secrétaire du CSE sur le site emblématique de Saint-Saulve dans le Nord. "Si cette annonce est officiellement confirmée" précise-t-il.
Ce matin du vendredi 19 novembre 2021, le représentant CGT d'Ascoval vient d'apprendre la nouvelle dans la presse. Comme il le rappelle volontiers : "qui ne dit mot consent". Pour lui aucun doute, "c'est la mobilisation des salariés, des élus qui a fait du bruit et cela est remonté jusqu'à Bercy. La négociation a pu aboutir grâce à ça !"
Une information communiquée hier soir par Bruno Le Maire après d'intenses négociations avec l'actionnaire Saarstahl.
Cette "bonne nouvelle" n'est pas vraiment une surprise pour Nicolas Lethellier. Il n'imaginait pas une seconde que le groupe allemand Saarstahl, propriétaire de l'usine nordiste, puisse longtemps justifier le transfert d'une partie de l'activité en Allemagne où l'acier aurait été fabriqué dans des fours à charbon, beaucoup plus polluants que ceux de Saint-Saulve, qui sont eux électriques.
"Je me suis toujours battu pour cette usine"
L'annonce du retrait de ce projet de délocalisation partielle intervient alors que le chef de l'Etat, qui connait bien le dossier, est en visite ce vendredi dans le Nord et l'Aisne pour parler développement des territoires. Xavier Bertrand candidat LR à la présidentielle et président de la région Hauts-de-France avait annoncé interpeller Emmanuel Macron à ce sujet, sur le thème du "quand on veut, on peut !". Et l'échange a bien eu lieu, à Guise.
L'interpellation est franche et dure autour de cinq minutes. Sous les masques, les propos sont fermes. "Le problème c'est le tarif de l'électricité" affirme Xavier Bertrand au chef de l'Etat. "Vous savez peut-être mieux que tous les autres" réplique Emmanuel Macron qui rappelle s'être toujours battu pour cette usine. Les deux hommes se retrouvent finalement sur la nécessité d'avoir "des garanties".
Rapport de forces
Ce 17 novembre, la CFDT et la CGT annonçaient en effet après une réunion, que la direction du groupe avait partagé son intention de délocaliser temporairement 40% de sa production en Allemagne. En cause : la hausse des prix de l’électricité qui alimente le site à la pointe en matière environnementale. Saarstahl n’avait pas confirmé, affirmant n’avoir pris "aucune décision", mais reconnu qu’il étudiait des "options temporaires" pour "limiter les effets négatifs" de cette hausse, quand ses hauts fourneaux en Allemagne tournent donc au charbon, bien moins cher.
"Les prix de l'énergie ont explosé [et le groupe étudie] toutes les options temporaires (...) pour limiter les effets négatifs résultant de cette phase", avait déclaré à l'AFP la porte-parole du groupe, Ute Engel.
Alors que l'Etat avait encore débloqué en début d'année 20 millions pour payer les salaires et aider à la reprise d'Ascoval, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire avait affirmé jeudi matin qu’il n’était pas question que le sidérurgiste délocalise son activité "définitivement" en Allemagne.
Une délocalisation définitive, c'était la crainte des syndicats, comme cela est déjà arrivé par le passé. "On est soulagé" ! Nacim Bardi est délégué CGT à Saint-Saulve. Sur le site où il travaille ce matin, les sourires sont sur tous les visages même s'il précise : "il faut toujours rester vigilent".
Il regrette qu'il faille "toujours monter au front" pour que les évidences soient prises en compte par la direction. "Les politiques ne pouvaient pas ignorer la situation, la hausse du coût de l'énergie ne pouvait pas justifier une telle décision".
Les syndicats attendent désormais la réaction officielle de leur actionnaire, une réunion est programmée mercredi 24 novembre prochain.