"Les personnes en attente vont décéder" : le don d'organes victime de la désinformation en France

Un fait divers venu tout droit des États-Unis a bouleversé le don d'organes en France. Les inscriptions sur la liste des refus ont été multipliées par dix selon l'Agence de Biomédecine. Antoine Sénéchal, président de l'association pour le don d'organes (ADOT) dans le Nord alerte sur les dangers de la désinformation pour les patients.

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C'est un fait médical qui s'est produit en 2021, mais qui trouve une résonance en France en ce mois d'octobre. Le média américain NPR a rapporté le cas d'un trentenaire qui s'est réveillé juste avant de se voir prélever des organes alors qu'il avait été déclaré en état de mort cérébrale par les équipes médicales d'un hôpital du Kentucky.

Plusieurs médias français se sont fait le relais de cette information, expliquant que l'homme s'était réveillé "pendant le prélèvement de ses organes", provoquant une vaste vague d'inquiétude dans l'hexagone. "Le fait de véhiculer cette information est très préjudiciable et jette l'opprobre sur le don et la greffe d'organes en France" regrette l'Agence de la biomédecine. "Nous avons (...) relevé une augmentation nette du nombre d'inscriptions sur le registre national des refus" depuis la publication des articles. L'Agence constate une multiplication par dix de ces inscriptions depuis.

Antoine Sénéchal, président de l'association pour le don d'organes, de tissus et de moelle osseuse (ADOT) dans le Nord, alerte sur les dangers de cette "désinformation". Pour en comprendre les ressorts, nous lui avons posé trois questions.

Le cas de ce patient américain peut-il se produire en France ?

Antoine Sénéchal : "Le fonctionnement américain est différent du nôtre. Les médecins français font des analyses et des scanners du cerveau pour vérifier qu'il ne réagit plus. Aux États-Unis, l'examen est visuel, ils ne vont pas jusqu'au scanner. C'est donc impossible que cela se reproduise en France, car les scanners montrent que le cerveau est inondé par le sang. 

Le problème, c'est que dès qu'on dramatise et qu'on image la peur, ça prend vite une ampleur phénoménale. Surtout quand on a vu les titres qui sortaient dans la presse. Tout le monde s'alerte, les gens ont peur. Aujourd'hui, les gens ne cherchent plus et s'inscrivent d'office sur le listing des refus. Dans les faits, ce qu'il s'est passé n'est pas une fake news, mais le problème résidait dans la formulation des faits."

Quelles sont les conséquences de cette affaire sur le don d'organes ?

Antoine Sénéchal : "Jusqu'ici, les gens s'inquiétaient de leur âge, se demandaient s'ils étaient trop vieux, avaient peur de la façon dont le corps allait leur être rendu... Certaines avaient peur de savoir comment ça se passe réellement, est-ce qu'il n'y a pas une possibilité que le corps du patient vive encore. Mais on les rassure, on leur explique que le corps est restitué en entier, que les organes fonctionnent encore, mais que le cerveau ne vit plus.

Le don d'organe permet de transcender la mort.

Antoine Sénéchal

Président ADOT 59

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Aujourd'hui, on estime que 1% de refus entraîne 100 morts. Si les taux de refus augmentent, c'est sur les personnes qui attendent une greffe que cela va se répercuter. Depuis cette affaire, l'Agence de la biomédecine a annoncé que les refus ont été multipliés par dix. Le souci, c'est quand il y a un potentiel don d'organes, c'est le listing qui prime en France, c'est ce qui est consulté en premier. Cela veut dire qu'il n'y a pas information sur les personnes potentiellement donneuses, et que les infirmiers de coordination doivent poser la question à l'entourage.

La greffe cela fonctionne et cela permet de vivre. Si les gens se positionnent sur le refus cela aura pour conséquences qu'un nombre impressionnant de personnes en attentes vont décéder. Le don d'organe permet de transcender la mort. Il serait souhaitable qu'au niveau gouvernemental, ou au niveau ministériel, il y ait une prise de parole. C'est le seul moyen pour arrêter. Pour calmer, il faut une clarification."

Comment se renseigner fiablement sur le don d'organes ?

Antoine Sénéchal : "Le meilleur moyen de trouver toutes les informations, c'est de se rendre sur le site de l'Agence de la biomédecine. Même au niveau associatif, c'est là que l'on récupère toutes les informations.

Je suis greffé du cœur et président de l'ADOT 59. Depuis que je suis greffé je fais de la sensibilisation de manière régulière pour casser les tabous qui existent sur le don et mobiliser les gens pour en parler. Ce qu'il faut c'est rassurer, que les gens ne soient pas inquiets et qu'ils n'aient pas peur."

Pour plus d'informations, rendez-vous sur : dondorganes.fr · Avec AFP

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