32 000 élèves de l'académie de Lille planchaient ce mercredi 14 juin sur un des trois sujets de philosophie du baccalauréat. Si l'épreuve était reine autrefois, avec la réforme appliquée, elle passe à présent au second plan pour beaucoup de lycéens.
"Cette épreuve de philosophie, c'est un enjeu pour la mention, mais pas pour le bac, parce que moi je sais que je l’ai déjà", affirme Suzanne, avec le sourire. Devant le Lycée Louis Pasteur de Lille, où elle planchera dans quelques minutes sur un des sujets de philosophie du baccalauréat, la jeune fille semble détendue. Elle a déjà fait ses calculs : "il me faut au moins 8/20 pour avoir ma mention".
C'est toute la spécificité de cette édition 2023 : le nouveau baccalauréat, pour la première fois depuis la réforme, est entré pleinement en vigueur cette année. Conséquence : l'épreuve de philosophie ne représente que 8% de la note finale. Plus de 80% dépendent du contrôle continu et des épreuves anticipées, déjà disputées en mars par les lycéens.
Les lycéens désertent
Camille, professeur dans un lycée d'Armentières, qui souhaite rester anonyme, est en colère : "dans ma classe technologique, c'est l'hécatombe depuis le mois de mars, la moitié de mes élèves a déserté." Même s'il reconnaît "qu'il y a des ajustements à opérer", Pierre Mathiot, directeur de l'Institut d'études politiques (IEP) de Lille et concepteur de la réforme, tente de temporiser : "les lycéens ne sont jamais absents complètement, ils vont à certaines matières et pas à d’autres."
La réforme fait arrêter l’année au mois de mars
Camille, professeur dans un lycée d'Armentières
Pas facile de se remettre au travail après ces épreuves anticipées, beaucoup de lycéens ont l'impression d'avoir été en vacances avant l'heure. À quelques minutes de l'épreuve, Gaspard témoigne : "on a eu un petit moment de pause, donc le plus compliqué, c’est de se remettre dedans, mais je pense que ça ira, on est prêts".
Des pistes d'amélioration
Si certaines épreuves ont été avancées, c'est pour que les notes obtenues par les lycéens soient déjà inscrites pour la plateforme Parcoursup. "C'était complètement nécessaire pour que l’enseignement supérieur puisse accéder à un dossier complet" précise Pierre Mathiot.
Alors pour éviter l'absentéisme des lycéens à partir du mois de mars, le directeur de l'IEP évoque quelques pistes comme celle de ne pas donner accès aux notes des épreuves de spécialité. Raphaela Janvrin, professeur dans un lycée de Béthune s'interroge : "ces notes comptent dans Parcoursup, il me semble nécessaire que les élèves y aient accès par transparence et pour savoir selon quels éléments ils vont être sélectionnés."
Pierre Mathiot propose également d’alléger "légèrement" le poids de ces épreuves anticipées (pas du contrôle continu) pour le reporter sur les épreuves du mois de juin, "pour essayer d’équilibrer les choses", précise-t-il. Deux hypothèses qui n'ont pas encore été étudiées au Ministère de l'Éducation nationale.
L'épreuve de philosophie, définitivement relayée au second plan ?
Le concepteur de la réforme l'assure : "il y a quand même de l'enjeu, pour pas mal d’élèves, c’est quand même la possibilité d’obtenir une mention ou de se sauver lorsque leurs notes aux épreuves de spécialité ont été médiocres". Ce que confirme Zinad, qui vise une licence Métiers de la culture et des arts l'année prochaine : "c’est très important parce que ça peut vraiment tout changer".
Avant c'était un passage de rite qui amorçait une semaine d'examen, aujourd'hui l'épreuve de philo reste déterminante, notamment pour les élèves en difficulté
Raphaela Janvrin, professeur dans un lycée de Béthune
Après une heure d'épreuve, Corentin est le premier des 350 candidats du Lycée Louis Pasteur de Lille à sortir. Détendu, il précise : "si j’avais zéro, je l’avais quand même mon BAC", "là, je pense que j'aurais un petit 6 ou 7".
Si pour Corentin et une grande partie des lycéens du Nord-Pas-de-Calais, les dés sont jetés, il reste encore l'épreuve du grand oral la semaine prochaine. Les résultats du bac tomberont le 4 juillet.