Coronavirus : le quotidien des aides à domicile, entre débrouille et dévouement

L'épidémie de coronavirus rend les aides à domicile plus essentiels que jamais. Il est aussi de plus en plus difficile pour les travailleurs d'apporter repas et services aux personnes dépendantes. Alors, les salariés d'une entreprise lilloise s'organisent pour maintenir une activité satisfaisante. 

Comment concilier distanciation sociale et soins à la personne ? Comment continuer à apporter du lien et du réconfort aux personnes âgées dépendantes en cette période de confinement ? C'est le défi des organismes d'aide à domicile. Aide à la toilette, à l'habillage ou bien simplement livraison de repas. L'épidémie de Covid-19 a changé leur quotidien. Exemple avec l'entreprise d'insertion Louvéa, à Lille.


Système D


D'abord il a fallu s'équiper. 200 mètres d'élastique ont été récupérés à Comines, 15 mètres carré de polyester offerts par l'entreprise Doublet. En quelques jours, l'entreprise a réussi à faire confectionner plus de 300 masques lavables en tissu afin d'équiper ses 80 salariés.
 

"Des couturières de l'association Amitié Partage de Roubaix se sont spontanément proposées pour la réalisation, puis nous avons fait appel à des professionnelles. J'ai fait des navettes entre Seclin, Fâches-Thumesnil, Bondues, Marcq-en-Baroeul. Ma voisine en a aussi confectionné une vingtaine", raconte Tanguy Desauw, responsable administratif de la structure.  Le surplus a été donné aux agents de sécurité d'une entreprise du groupe.
 

Même démarche pour le gel hydroalcoolique : après avoir récupéré une recette auprès d'un pharmacien, l'équipe en a fabriqué 3-4 litres en urgence.
 

L'organisme livre 25% de repas de plus qu'habituellement


En temps ordinaire, 830 repas sont livrés chaque semaine sur la métropole lilloise. "Depuis la semaine dernière les demandes ont bondi de 25%, avec des gens qu'on n'avait pas l'habitude de servir, des jeunes", constate un salarié de 31 ans. Les demandes viennent aussi "des personnes qu'on a fait sortir de l'hôpital plus tôt afin de libérer des places", explique Marcly Prudent, responsable des livraisons de repas. 
 


Il remarque que sa manière de travailler a évoluée, confinement oblige : "D'ordinaire, les bénéficiaires aiment bien qu'on rentre pour discuter, ils ont toujours des choses à nous raconter. Maintenant, c'est très succint : on arrive, on donne les sacs à la porte en gardant nos distances ou bien s'ils le souhaitent, on leur dépose simplement à l'entrée, on s'assure juste qu'ils les récupèrent. Les gens qu'on voit ont toujours le sourire, ils relativisent, mais nous sommes souvent leur seul contact de la journée. Par précaution, beaucoup de familles évitent les visites."

 

"Si nous n'étions pas là, certaines personnes n'auraient ni visite ni moyen de se restaurer"



Pour répondre à la demande croissante, l'entreprise va mettre en place une nouvelle tournée. 

Seul un des livreurs s'est mis en arrêt. Les autres continuent, avec gants, masques et en désinfectant le plus souvent possible leur véhicule de livraison. "Je ne vais pas vous dire que je n'ai pas peur. J'ai des enfants, j'ai une femme, je ne sais pas ce que je peux rapporter à la maison. Mais quand je fais la tournée je n'y pense pas. Si nous n'étions pas là, certaines personnes n'auraient ni visite ni moyen de se restaurer", affirme un livreur. 


Un aide à domicile sur deux ne se présente plus au travail



Pour le service d'aide à domicile, c'est plus compliqué. Depuis la semaine dernière, l'absentéisme dépasse les 46% chez les auxiliaires de vie. Certaines gardent leurs enfants, d'autres avaient peur de tomber malade. Il a fallu réorganiser tout le service. "On a dû réduire les prestations au minimum vital : uniquement les toilettes et les repas. Nous n'assurons plus le ménage par exemple", déplore le responsable administratif.
 


Autre conséquence de la réorganisation en urgence : impossible désormais de proposer un horaire précis de passage. Un détail important pour un public habitué à recevoir une visite à heure fixe.

Le temps passé avec chaque personne a aussi considérablement diminué, "quinze à trente minutes maximum", d'abord pour  limiter les risques de contagion mais aussi parce qu'en raison des absences, chaque aide à domicile doit assurer presque deux fois plus de visites qu'à l'habitude.

"Demain, si 60 à 70 % des aides à domicile sont absentes, nous ne pourrons plus assurer le service", s'inquiète Tanguy Desauw.
 

"Ce sont des personnes très courageuses"


Certaines aides à domicile, particulièrement investies, ont accepté de renoncer à leurs week-ends, de revenir sur leurs congés.  Elles endossent une charge de travail supplémentaire sans perspective de prime, "Nous n'en avons pas les moyens malheureusement", déplore leur responsable. "Ce sont des personnes très courageuses, qui continuent de faire leur boulot alors que sortir fait peur à tout le monde en ce moment."

 
Comment aider soi-même ses voisins ?
S'il est primordial de rester chez soi autant que possible, comment aider ceux qui en ont besoin ?

Une première solution, toute simple, consiste à laisser un petit mot dans le hall d'entrée de son immeuble pour proposer de faire quelques courses de ses voisins ne pouvant pas se déplacer en même temps que ses proches achats. "Lors de nos tournées, nous avons repéré plusieurs affiches de personnes qui se proposent pour aller récupérer les courses de ceux qui ne peuvent pas se déplacer dans le quartier. Et ça c'est bien !" raconte Marcly Prudent.

D'autres initiatives existent sur le site de Voisins Solidaires ou sur le site du gouvernement "Je veux aider".
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