Diplôme d'homéopathie suspendu à la Fac de médecine de Lille : les homéopathes dénoncent une "chasse aux sorcières"

Le doyen de la Faculté de médecine de Lille a décidé de suspendre le diplôme d'homéopathie en attendant l'évaluation de cette thérapeutique demandée par le ministère de la Santé. Les homéopathes s'en indignent, et dénoncent une opération de dénigrement de cette médecine complémentaire.

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En 1979, la Faculté de médecine de Lille était la première en France à créer un diplôme universitaire d'homéopathie. 40 ans plus tard, elle est la première à en suspendre la formation. 

La décision a été prise par son doyen Didier Gosset, qui l'a annoncée vendredi soir sur Twitter. "L'homéopathie restait comme une doctrine sans preuve scientifique". justifie-t-il. "Les études sur le sujet sont peu nombreuses ou mal étayéesOr aujourd'hui à l'inverse, tout le monde prône et enseigne une médecine fondée sur les preuves".
 

Un esprit de "chasse aux sorcières" contre l'homéopathie 

Du côté des médecins homéopathes, la pilule est dure à avaler. Dans un communiqué, le Syndicat National des Médecins Homéopathes Français dénonce "un esprit de « chasse aux sorcières »  qui se met insidieusement en place et qui tourne le dos à la vision d’une médecine intégrative et réconciliée"
 

 
"Fausse thérapie à l'efficacité illusoire" ?


Mi mars, une tribune au vitriol signée par 124 médecins opposés à cette pratique et réclamant l'arrêt de sa prise en charge partielle par l'assurance maladie a mis le feu aux poudres. 

Une charge violente contre les "médecines alternatives", dont l'homéopathie, pratiquées selon les signataires "par des charlatans en tout genre qui recherchent la caution morale du titre de médecin pour faire la promotion de fausses thérapies à l'efficacité illusoire".

Dans la foulée, le Ministère de la Santé demandait à la Haute Autorité de Santé de lancer une grande étude pour évaluer l'efficacité de l'homéopathie. Ses résultats devraient être publiés en février prochain.
 

Le syndicat des médecins homéopathes a de son côté porté plainte contre les signataires de la tribune auprès de l'Ordre des médecins, pour infraction aux règles de la confraternité. Il dénonce des propos calomnieux et violents pour une pratique médicale vieille de 200 ans et inscrite à la pharmacopée française depuis 1965.
 

Se priver d'une pratique complémentaire inoffensive


Le docteur Didier Deswarte, vice-président du SNMHF et ancien médecin homéopathe lillois, regrette la décision prise par le doyen de la faculté de médecine de Lille dans ce contexte de dénigrement de l'homéopathie. "Je suis très déçu par sa démarche", déplore-t-il. "On se prive de beaucoup de choses par rapport aux patients. L'homéopathie est une médecine complémentaire qui permet notamment d'éviter la surenchère de prescriptions de médicaments et leurs effets secondaires".
 
 
Comme beaucoup de médecins homéopathes, Didier Deswarte préfère ce terme de "médecine complémentaire" à celui de "médecine alternative".

Reine Dubet, médecin à Mons-en-Baroeul depuis 20 ans explique : "Les médecins homéopathes sont des médecins au même titre que les autres, avec le même diplôme et une formation en plus. Lorsque je suis face à un patient, je vais choisir l'option la plus adaptée entre l'allopathie, l'homéopathie, l'acuponcture ou la micro-nutrition. Arrêter l'homéopathie constitue une perte d'option thérapeutique. Ce serait vraiment dommage".
 

Les professeurs informés via Twitter


La décision du doyen de la Faculté de médecine de suspendre les cours d'homéopathie a été prise sans que les principaux intéressés n'en soient informés. Le Docteur Mourad Benabdallah, médecin professeur responsable du diplôme universitaire depuis 20 ans, l'a appris via Twitter. Il ne souhaite pas entrer dans la polémique mais dénonce lui aussi "cette attaque en règle de l'homéopathie qui pourrait priver des patients d'une thérapeutique pour laquelle ils ont une forte demande. "

Il forme chaque année une quinzaine de médecins, sage-femmes et pharmaciens et exerce depuis plus de 30 ans à Arras. Un tiers de ses patients lui sont adressés par leur médecin traitant, preuve selon lui de l'efficacité thérapeutique de l'homéopathie et de la confiance de ses confrères dans sa pratique. 

"Pourquoi les gens continuent-ils de demander de l'homéopathie depuis 200 ans ?", interroge-t-il. Sa réponse : "Parce que l'homéopathie n'est pas un placebo. Elle est efficace et c'est pour ça qu'elle perdure."
 

Une "prise en charge globale"


Comme les autres médecins homéopathes, il vante aussi l'intérêt d'une "prise en charge globale" intrinsèque à cette pratique. "Une consultation dure au minimum une demi heure. Je fais un examen complet de la personne, de ses symptômes et de ses antécédents, avant de décider en mon âme et conscience de faire ma prescription."

Une écoute thérapeutique qui n'est pas étrangère au succès de l'homéopathie. Un Français sur deux y a déjà recouru. Quant aux médecins qui la pratiquent, ils ne sont pas contre une évaluation scientifique poussée et complète, qui permettra selon eux d'en valider la pertinence.


 
L'homéopathie en France
Inscrite à la pharmacopée française depuis 1965, l'homéopathie est remboursée à hauteur de 30% par l'Assurance maladie. .
Un tiers des Français y ont recours de façon régulière, un sur deux s'est déjà soigné à l'homéopathie.
20 000 médecins, soit le quart d'entre eux, prescrivent régulièrement des médicaments homéopatiques, pour un marché pesant 620 millions d'euros.

Les étudiants en médecine peuvent suivre des cours d'homéopathie à Strasbourg, Brest, Marseille et Bobigny. A Lille, 70 médecins, sage-femmes et pharmaciens ont été diplômés dans cette discipline ces trois dernières années.

Selon une étude réalisée avec 825 médecins généralistes intervenant sur 8559 patients, la prescription d'homéopathie permettrait une consommation 2 à 3 fois moindre de médicaments iatrogènes, c'est-à-dire entraînant des effets secondaires (antibiotiques, anti-inflammatoires, psychotropes).

La Haute Autorité de Santé a été missionnée par Agnès Buzin pour évaluer scientifiquement l'efficacité des granulés blancs d'ici février 2019. La ministre de la Santé devra alors se prononcer sur la poursuite ou non des remboursements par l'Assurance maladie.
 
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