Homophobie dans les stades : suspension de match, sanctions individuelles, à quoi s'attendre pour le derby Lens-Lille ?

Le ministre des Sports souhaite agir contre l'homophobie dans les stades de football. Matches à haute tension sur la pelouse, mais aussi dans les tribunes, les rencontres opposant le LOSC au RC Lens ont déjà été le théâtre de violences et d'insultes dans le passé.

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À quelques heures du coup d'envoi du très attendu RC Lens - Lille OSC, le derby a déjà démarré sur les réseaux sociaux. L'occasion pour les supporters de rappeler leur désamour pour le club adverse, à coup de slogans grivois et potaches, mais également teintés d'homophobie.

Le 25 octobre, le compte X @mentalite_lens publie une vidéo dans laquelle plusieurs dizaines de supporters du RC Lens sont regroupés, entonnant des chants contre leurs adversaires lillois. "Quand j'étais petit, dans mon grenier, j'ai retrouvé une flûte enchantée, et les seules notes qu'elle savait jouer, c'était Lillois va te faire enc*ler".

Ce n'est pas la première fois que des supporters ont recours à un vocabulaire homophobe. Mais cela pose tout de même la question de la limite entre le supporting et l'incitation à la haine.

Arrêt des matches et billets nominatifs en Ligue 1 ?

Ces propos prennent une autre dimension depuis la prise de parole du ministre des Sports, Gil Avérous, jeudi 24 octobre. À la suite d'une réunion au ministère de l'Intérieur avec les instances du football français (FFF et LFP), le ministre a demandé "d'appliquer strictement le protocole FIFA dès qu'il y a un chant homophobe."

Les sanctions pourraient aller de la "suspension du match" à son "interruption", jusqu'au match déclaré perdu pour l'équipe qui reçoit. Ces mesures ne sont pas nouvelles, et avaient déjà été mises sur la table des négociations par les ministres qui l'ont précédé : Amélie Oudéa-Castera et Roxana Maracineanu.

Les annonces de Gil Avérous ne font cependant pas l'unanimité. C'est notamment le cas du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. "S'il y a des chants homophobes, le mouvement sportif doit prendre ses responsabilités, il doit y avoir une interruption temporaire, a-t-il soutenu au micro de RMC. Arrêter des matches est très compliqué, ce n'est pas la bonne solution. Mais il faut une interruption provisoire, éventuellement des exfiltrations, même si c'est compliqué au sein d'une tribune."

La Ligue de Football Professionnel (LFP) estime de son côté que "l'arsenal juridique existe avec la possibilité de prononcer des sanctions exemplaires en matière d'interdictions de stade, qu'elles soient administratives ou judiciaires." L'instance se dit favorable à "tout ce qui permettra d'identifier et d'interpeller les fauteurs de troubles pour permettre ensuite d'individualiser les sanctions."

C'est pourquoi le ministre des Sports à d'ores et déjà annoncé qu'il allait "signer un arrêté" d'ici au 31 décembre pour "activer la billetterie nominative." Pour l'instant, seuls l'Olympique lyonnais, l'Olympique de Marseille et le PSG sont concernés par cette mesure. Cette billetterie nominative s'étendra aux autres clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 dans un second temps. 

Une rencontre sous haute tension

S'ils ne sont pas concernés pas cette mesure, les supporters des clubs de Lens et de Lille n'en sont pas pour le moins exemplaires. Alors que le ministre préconise l'arrêt des matches en cas d'homophobie, racisme, mais aussi de violences, l'association Rouge Direct qui dénonce l'homophobie dans le sport estime que  "les matchs qui opposent ce week-end Lille-Lens et Marseille-Paris risquent fortement de ne pas aller à leur terme."

En effet, en raison de la rivalité territoriale entre le LOSC et le RC Lens, les derbys peuvent être le théâtre de violences. En octobre 2021, la rencontre entre les deux clubs avait mené à une escalade de violence entre les supporters. Tout avait démarré avec un tifo dans une tribune du Stade Bollaert faisant apparaître comme message : "Lillois merda". À la mi-temps, les supporters lensois avaient envahi le terrain, alors que des sièges avaient été arrachés dans le parcage des ultra-lillois. Le match sera finalement arrêté 30 minutes, et les tensions entre les deux camps feront 7 blessés

► Lire aussi : Derby du Nord, RC Lens - LOSC : Le dispositif pour éviter les débordements entre supporters

Le 30 avril dernier, le derby du Nord a de nouveau été perturbé, mais cette fois-ci par des chants homophobes. Alors que les Dogues menaient leurs rivaux lensois 1 but à zéro, un chant à caractère homophobe a retenti dans les tribunes du Stade Pierre Mauroy. "Si jamais j'étais Lensois, je me serais déjà suicidé. Les Lensois sont des pédés et de pauvres attardés", ont clamé les supporters du LOSC.

Le match qui se joue ce 26 octobre à 21 heures est donc à suivre de près. Violences et insultes sont souvent exacerbées lors de ces rencontres sous haute pression, d'autant plus que le RC Lens talonne son voisin lillois au classement de la Ligue 1. Le derby, c'est aussi le moment où se joue la suprématie territoriale pour les deux clubs, du moins jusqu'à la prochaine rencontre.

Cette rivalité historique ne doit néanmoins pas laisser place à la violence. Bruno Genesio, coach lillois a donné son avis sur le projet du ministre des Sports en conférence de presse. Pour lui, il faut "identifier les pseudo-supporters" auteurs de chants homophobes et les "interdire de stade", plutôt que "d'arrêter les matches". Il précise : "arrêter les matches, je ne pense pas que ce soit la solution. Je ne suis pas spécialiste juridique, mais je pense qu'on a des moyens d'arrêter tout ça en interdisant les gens d'aller au stade, comme les Anglais l'ont fait."

Si les autorités et les clubs prennent le sujet au sérieux, les mentalités peinent à évoluer chez certains supporters. Sur les réseaux, des internautes s'en amusent et relayent des vidéos de propos homophobes, les qualifiant de "masterclass" le tout ponctué par des émoticônes pleurant de rire. Au regard des propos du ministre, tout débordement risque d'entraîner une suspension du match.

Le coup d'envoi de RC Lens - LOSC est prévu à 21 heures au Stade Bollaert Delelis.

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