"Les filles comme moi ne vont pas à l'école en Afghanistan", Au Tripostal, les réfugiés afghans se retrouvent 10 mois après leur arrivée à Lille

Des dizaines de réfugiés afghans ont rencontré Martine Aubry au Tripostal ce jeudi 9 juin. L'occasion de revenir sur leurs 10 derniers mois passés à Lille et leurs perspectives d'avenir dans leur nouveau pays, loin des Talibans.

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Au Tripostal ce jeudi soir, l'ambiance était particulièrement chaleureuse. Les réfugiés afghans accueillis par la mairie de Lille étaient nombreux à se réunir pour la première fois, tous ensemble, 10 mois après leur arrivée. 

Pour rappel, mi-août 2021, les Etats-Unis annonçaient le retrait de leurs dernières troupes en Afghanistan, laissant le pays aux mains des Talibans. Des centaines de milliers d'Afghans ont tenté de quitter le pays. Des images impressionnantes ont fait le tour de la toile à ce moment-là, parmi lesquelles celles d'hommes et de femmes qui essaient de s'agripper à des avions en plein décollage. 

Depuis, nombre d'entre eux ont réussi à trouver refuge à l'étranger. En France, et plus particulièrement à Lille, Martine Aubry, la maire, a fait tout son possible pour en accueillir. Désormais, elle a de quoi se réjouir : elle a réussi à ramener 85 Afghans en sécurité avec leurs proches. 

Une organisation rapide pour sauver les familles 

L'été dernier, touchée par une situation qu'elle a vécu de près, Martine Aubry s'est organisée avec l'aide de Wally Mohamed, un Lillois d'origine afghane. Elle l'avait accueilli chez elle il y a quinze ans, lors de la première prise des Talibans.

"Il m'a appelé et m'a dit, ça y est, ça recommence", explique Martine Aubry au micro de France 3 Nord Pas-de-Calais. En vacances avec sa famille en Afghanistan, il a pu l'aider à "recollecter" toutes les personnes qui étaient en grand danger.

"Nous avons obtenu, après pas mal de difficultés quand même, du ministère des Affaires étrangères et du ministère de l'intérieur qu'ils puissent venir en France, avoir des visas et pouvoir monter dans les premiers avions", détaille la maire. 

Les premières familles, en grand danger, sont arrivées quelques jours après le retour des Talibans au pouvoir. "Ils avaient à la fois des menaces, ils ont eu des attentats, ils ont perdu pour certains un partie de leur famille, donc il fallait vraiment qu'ils viennent vite." Certains étaient dans la justice, dans le domaine de la santé, d'autres dans l'éducation, les médias ou encore la culture, "à des niveaux où les Talibans les ont repéré". 

Ils ont été suivis quelques semaines plus tard par des artistes, au mois de septembre. "Et puis très récemment, des familles qui étaient dans des situations très particulières dont cinq femmes qui ne pouvaient plus sortir de chez elles" ont réussi à rejoindre le Nord de la France. 

"J'ai la chance d'aller à l'école"

Aujourd'hui, tous les enfants sont à l'école, apprennent le français et sont nombreux à le parler couramment. "Les étudiants vont, je l'espère, maintenant qu'ils ont appris un peu le français, reprendre leur cursus, espère la Maire. Pour les parents, il va falloir un peu plus de temps parce qu'apprendre le français, c'est pas évident".

J'habite en France depuis 10 mois, j'ai la chance d'aller à l'école, les filles comme moi ne vont pas à l'école en Afghanistan

Amra Hashimi, 16 ans

Durant la soirée, Amra Hashimi, une jeune réfugiée afghane de 16 ans est montée sur scène. Vêtue d'un voile jaune et de lunettes rondes, elle s'est lancée dans un petit discours de remerciement : "J'habite en France depuis 10 mois, j'ai la chance d'aller à l'école, les filles comme moi ne vont pas à l'école en Afghanistan", a-t-elle déclaré. 

Les enfants, de leur côté, font preuve d'une maturité à toute épreuve. Le périple et les traumatismes vécus les ont sûrement poussé à grandir plus vite que la moyenne. "J'ai besoin d'apprendre", lance en français une petite fille afghane, en citant des matières comme "l'histoire" ou encore les mathématique. "Mais là tu as déjà bien appris", se réjouit Martine Aubry, maire de Lille, avant de lui tenir affectueusement les joues. 

Les femmes "condamnées à rester enfermées chez elles"

Malgré tout, pour certains, le sauvetage a un arrière-goût amer. Car leur fuite du pays s'est faite en laissant derrière eux un pays sens dessus dessous. "C'est le monde à l'envers. Les gens que j'avais condamnés, que j'avais envoyés en prison pour des violences faites aux femmes, de la corruption, des kidnapping, ont tous été libérés le jour où les talibans sont arrivés au pouvoir", déplore Nafissa Mansouri, ancienne procureure à Kaboul.

Aujourd'hui, "ces criminels" qu'elle a fait condamner "se promènent dans la rue". Pendant ce temps, "les femmes qui travaillaient, qui sont honnêtes, sont condamnées à rester enfermées chez elles, dans leur maison... C'est ça la réalité en Afghanistan".

Martine Aubry, de son côté, leur assure un soutien inconditionnel. "Vous nous avez beaucoup touché par votre courage, par la façon dont vous essayez de vous adapter dans un nouveau pays, ce n'est pas simple. En tout cas, pour nous, vous êtes des lilloises et des lillois, et on sera toujours à vos côtés." Pour tous ces réfugiés, l'avenir s'écrit désormais à Lille. 

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