Une fresque peinte ces derniers jours dans le cadre d'un festival de street-art, estampillé Lille 3000 Eldorado, fait polémique. On peut y lire l'expression "All cops are bastard".
La fresque a été terminée ce jeudi soir. Peinte par des artistes mexicains du collectif Tlacolulokos, elle se trouve dans le quartier Moulins à Lille. Elle a été réalisée dans le cadre de la 4e édition de la Biennale Internationale d'Art Mural, un événement labellisé par Lille 3000 Eldorado, festival organisé par la mairie de Lille.
On y voit, sur un long mur, 3 femmes voilées avec à côté un slogan : "Hydrate-toi d'Urbaine liqueur". Mais ce sont surtout quelques détails qui ont interpellé des policiers et des habitants ces dernières heures. L'une des femmes a une kalachnikov tatouée sur le bras et l'autre le mot "ACAB".
Pour les non-initiés, l'acronyme "ACAB" signifie "All Cops are bastard" ("Tous les flics sont des connards"). "Cette fresque a été validée par la mairie de Lille, nous écrit un internaute. En ces temps troublés, inciter à la haine quelqu' elle soit est lamentable." La mairie a rapidement précisé qu'aucune exquisse n'avait été envoyée, ni validée au préalable.
Incompréhension ?
Cette fresque est inacceptable pour le syndicat de police Alliance qui a immédiatement alerté le préfet. "L'affaire est remontée à Christophe Castaner", affirme Arnaud Boutelier, secrétaire régional adjoint du syndicat Alliance.
"L'art, on n'est pas contre mais il y a des inscriptions qui sont inadmissibles. "ACAB", c'est un appel à la haine envers les policiers en sachant qu'aujourd'hui le contexte est hyper difficile. Les forces de l'ordre sont fatiguées. On ne peut pas laisser ce genre d'inscription sur un mur, à la vue du public." Le syndicaliste, après discussion avec les artistes, dit avoir compris qu'il s'agissait plutôt d'une "maladresse".
Ce vendredi matin, des responsables de Lille 3000 Eldorado se rendus sur place pour tenter d'éteindre la polémique naissante.
Un des artistes, également présent, a expliqué à nos journalistes sur place que la fresque était à comprendre dans le contexte mexicain, qu'il y avait une grosse incompréhension. Il ne parle pas de voile mais de costume traditionnel. Et le "ACAB" s'applique au contexte local de son pays où la police est "corrompue". "Il faut replacer la polémique dans un contexte plus global, explique l'artiste Sosi Rensa. Ici, le contexte est bien différent de celui des Mexicains. Cette fresque est symbole de la gauche et de la résistance. C'est une question de fraternité, de pacifisme..."
Il dit comprendre la réaction des policiers en France : "Les fresques provoquent souvent la polémique. L'art, c'est une question de réflexion et de critique." Mais selon lui, "au Mexique, la police est inutile et ne protège pas les Mexicains. C'est un système sans scrupules, complètement corrompu. C'est ça le contexte de la fresque."
Ce vendredi matin, la discussion s'est engagée avec le policier syndicaliste venu sur place qui, malgré tout, maintient sa demande : "Il faut que cela soit retiré". L'inscription "ACAB" a été retiré en fin de matinée. Le reste de l'oeuvre est toujours visible, ce qui ne satisfait pas pleinement le syndicat Alliance. Une plainte est toujours envisagée.
Didier Fusillier, conseiller artistique de l'événement, s'est lui-même également rendu sur place, signe de la tension provoquée par cette fresque. Les organisateurs ont également précisé que la fresque, dont ils connaissaient les gros traits, les a surpris et qu'ils ne peuvent être "derrière tous les artistes".
Lille3000 est un évenement culturel, organisé par la mairie de Lille tous les 3 ans. Cette année, il est consacré au Mexique. La parade de lancement qui devait avoir lieu ce samedi, a été reportée à cause de la météo.