Enseignants et parents d'élèves se sont rassemblés devant le collège Averroès de Lille ce mardi 26 mars 2024, pour protester contre la fermeture de leur établissement scolaire, faute de financement. En décembre dernier, le préfet du Nord avait mis fin au contrat d'association, à travers lequel Averroès touchait des subventions de l'État.
Déterminés, mais dans l'incertitude. Le personnel du groupe scolaire Averroès s'est rassemblé ce mardi 26 mars 2024, devant l'entrée de son collège à Lille Sud. Une petite dizaine de personnes, enseignants ou membres de l'association des parents d'élèves, venus défendre leur établissement scolaire qui menace de fermer ses portes dès la rentrée prochaine, faute de subventions de l'État.
Le 7 décembre 2023, l'ancien préfet du Nord Georges-François Leclerc avait mis fin au contrat d'association qui unissait l'État au lycée Averroès, qui permettait au groupe scolaire de recevoir des subventions, nécessaires à son bon fonctionnement. Dans un courrier, l'ex-préfet justifiait sa décision par la découverte de "propos hostiles aux valeurs de la République" au sein du lycée.
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Une incompréhension
Des accusations "humiliantes et blessantes" que le directeur du groupe scolaire, Eric Dufour, ne comprend pas, continuant de qualifier ces accusations d'infondées : "Le plus insupportable c'est la mise en cause permanente du non-respect des valeurs de la République. Elle est pourtant un point fort de nos établissements. Nos enseignants représentent la République tous les jours."
Nos enseignants représentent la République tous les jours.
Eric Dufour, directeur d'Averroès
Le directeur du groupe scolaire fait part de sa lassitude. Une lassitude qui survient après les vagues d'accusations, mais également d'islamophobie et de racisme, dont son collège et son lycée sont victimes depuis décembre. "On nous accuse de tous les maux, on raconte un peu tout n'importe quoi sur le lycée, des accusations ridicules et scandaleuses", fustige le directeur, en rappelant que l'avenir des élèves de l'établissement et de leurs professeurs est en jeu.
Le stress des enseignants
"Nous sommes un lycée Républicain !", "Attal, Macron, intervenez, c'est l'excellence que vous bridez !"... Depuis que la fin du contrat d'association a été annoncée, de multiples mobilisations ont fleuri en soutien à l'établissement musulman de Lille, dont le lycée figure parmi les meilleurs de France. Ce mardi, devant le collège Averroès, les manifestants tentent de mettre la lumière sur leur angoisse.
On vit cette situation avec du stress puisqu'on ne sait pas ce qu'on va faire l'année prochaine, est-ce que j'aurai un poste ? Ni ce que nos élèves vont devenir. L'avenir est incertain.
Ait Belkacem Abdellah, professeur
"On vit cette situation avec du stress puisqu'on ne sait pas ce qu'on va faire l'année prochaine, est-ce que j'aurai un poste ? Ni ce que nos élèves vont devenir. L'avenir est incertain", raconte Abdellah Ait Belkacem, professeur. Sans subventions, il manque 1 million d'euros à Averroès pour assurer sa rentrée 2024-2025.
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Les élèves et leurs familles, dans l'attente
Pour tenter de sauver leur collège et leur lycée, le personnel d'Averroès, avec le soutien des parents d'élèves, a lancé une cagnotte en ligne qui a dépassé les 170 000 euros. La plupart des familles souhaitent encore croire à une rentrée en septembre prochain.
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"Mes enfants restent scolarisés ici tant que l'établissement continue de fonctionner et on fait tout pour que ça continue", fait savoir Leïla, mère de deux filles qui étudient au lycée Averroès. Depuis le début des mobilisations, cette mère de famille participe à chaque rassemblement, dans l'espoir de changer la situation. "Si ça ferme on ira ailleurs, mes enfants continueront leur scolarité... Mais on devra vivre pour toujours avec ce sentiment d'injustice, d'être discriminés."
Si ça ferme on ira ailleurs, mes enfants continueront leur scolarité... Mais on devra vivre pour toujours avec ce sentiment d'injustice, d'être discriminés.
Leïla, mère de deux élèves inscrites à Averroès
Beaucoup de membres de la communauté musulmane, proches ou non du groupe scolaire Averroès, perçoivent cette fermeture comme une injustice. Les élèves sont les premiers à revendiquer ce sentiment. "Je ne comprends pas cette fermeture", s'offusque Safaa, élève de terminale qui a fait toute sa scolarité dans l'établissement. "On a vu avec Stanislas que certains lycées font bien pire. Nous, on n'a rien à se reprocher. Ils cherchent juste la petite bête."
Pour tenter de sauver leur école, les avocats de la direction d'Averroès se sont pourvus en cassation et espèrent une réponse favorable du Conseil d'État, en attendant le verdict du procès sur le fond.