Face à la 5e vague de Covid-19, les professions libérales sont largement mises à contribution pour vacciner la population. Près de Lille une infirmière témoigne de son profond abattement et s'insurge d'un manque de flacons disponibles.
"On se fait engueuler toute la journée !" Emilie P. préfère garder l'anonymat. Diplômée en 1991, elle exerce comme infirmière libérale depuis 2006 sur le secteur de Loos, dans la Métropole européenne de Lille.
Lorsqu'ils l'appellent pour se faire vacciner, les patients n'ont souvent pas réussi à trouver un rendez-vous sur Doctolib, et avec les files d'attentes dans les pharmacies, "ce n'est pas possible, ils n'ont plus de patience" nous raconte cette infirmière.
La 5e vague est la pire de toute
Emilie P.Infirmière libérale à Loos
Emilie est à bout. "Avec le travail habituel, les tests Covid qu'on pratique à tour de bras, sans parler des malades du Covid qui impliquent des soins exigeants, actuellement je vaccine sur mes jours de repos. Moi je veux bien, encore faut-il pouvoir le faire !"
Cette professionnelle de santé, convaincue de l'importance de la vaccination, ne compte pas ses heures. Depuis de nombreuses semaines, ses journées de travail commencent à 6h30 pour s'achever à 21h00, avec souvent un sandwich dans la voiture pour toute pause déjeuner.
Mais ce n'est pas le travail et la fatigue qui l'épuise le plus, c'est la difficulté dans laquelle elle se trouve pour vacciner la population.
On nous demande de vacciner, mais on ne nous en donne pas les moyens.
Emilie P.Infirmière libérale à Loos
Le pire aujourd'hui pour elle, c'est de ne pas pouvoir vacciner tous les patients qui se présentent. "Déjà en temps normal c'est compliqué", explique Emilie. La commande de flacons de vaccins auprès des pharmacies est très réglementée et en temps normal une commande passée le 1er du mois n'arrive que 10 à 12 jours plus tard. "Lors de ma dernière commande, sur les 6 flacons attendus, je n'en ai reçu que 4 à l'arrivée."
Ce mardi 14 décembre, sa pharmacienne habituelle a prévenu : elle ne pourra délivrer qu'un seul flacon de Pfizer par semaine et par professionnel. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase... "Je trouve ça aberrant, on commence les 3e injections des moins de 30 ans, cela concerne majoritairement les jeunes, les étudiants et pour eux le Pfizer est obligatoire."
Comment peut-on limiter alors les livraisons aux professionnels de santé libéraux ? Emilie ne comprend pas, "surtout quand en face le gouvernement nous demande de vacciner le plus grand nombre d'ici le 15 janvier."
En attendant, et malgré sa grande lassitude, notre infirmière de Loos dans le Nord continue de vacciner. "Je dois anticiper très en amont pour être sûre d'avoir mes doses." Emilie rappelle qu'elle ne peut injecter que 7 doses avec un seul flacon. Elle ne voit absolument pas comment le plan vaccinal sera atteint dans ces conditions.
Cette restriction de livraisons n'est pas spécifique à la région Hauts-de-France mais concerne également les flacons de Pfizer pédiatrique pour les enfants âgés de 5 à 11 ans.