Vétusté, insalubrité, accès aux soins défaillant... les avocats dénoncent l'état des geôles du palais de justice de Lille

Depuis décembre 2021, les bâtonniers sont autorisés à visiter les lieux de privation de liberté. À Lille, une délégation d'avocats a visité les geôles du Palais de justice, lieu par lesquels transitent les personnes poursuivies avant d'être présentées à un juge.

Elles se situent à l’abri des regards, au rez-de-chaussée du Palais de justice de Lille. Les geôles, qui accueillent temporairement des personnes devant être présentées à un magistrat du tribunal, sont au cœur d’un rapport publié par l’ordre des avocats.

Le 17 novembre 2023, une délégation d’avocats du barreau de Lille, sur demande du bâtonnier, a visité ce lieu de privation de libertés, comme la loi le leur autorise depuis décembre 2021. Et le constat est sans appel. "Pour nous, il y a urgence à agir", lance Antoine Chaudey, avocat au barreau de Lille, délégataire du bâtonnier et membre du SAF, le syndicat des avocats de France.

Les personnes retenues y passent 12 à 15 heures par jour, nous y travaillons également quotidiennement. Tout est à refaire.

Antoine Chaudey, avocat, délégataire du bâtonnier de Lille et membre du SAF

Jusqu’à 55 personnes peuvent y être accueillies de manière simultanée. En 2022, environ 6 800 personnes sont passées par le poste de police du Palais de justice de Lille, soit une moyenne de 19 personnes par jour. Pas de problématique de surpopulation donc, précise le rapport de l’ordre des avocats. Mais une nécessité de rénover rapidement les locaux.

Des cellules "vétustes, sales et abîmées"

Dans ces cellules, une simple banquette en métal permet aux personnes de s’asseoir. Bien qu’il ne soit pas prévu que des personnes dorment au sein des cellules, aucun matelas ni oreiller ne sont proposés. Les toilettes, situées à l’extérieur des cellules, sont accessibles sur demande tout comme les lavabos pour s’hydrater. Lors de la visite de novembre 2023, il n’y avait pas de papier hygiénique dans les sanitaires.

Bien que conformes à la réglementation en vigueur, les locaux du poste de police du Palais de justice de Lille sont "vétustes, sales et abîmés", indique le rapport. "L’état de vétusté que nous avons constaté est assez incroyable, complète Antoine Chaudey. Les locaux n’ont visiblement pas été remis à neuf ni entretenus depuis leur création". Il donne un exemple, photo à l’appui. "Nous avons par exemple constaté dans plusieurs cellules des projections de matières fécales ou de sang, on ne sait pas vraiment".

4 recommandations formulées

Au-delà de l’insalubrité constatée dans les cellules, deux autres points ont été soulevés par la délégation de l’ordre des avocats de Lille : la question de l’accès aux soins et les locaux mis à disposition des avocats pour effectuer les entretiens avec leurs clients.

"Nous assistons des personnes vulnérables comme des mineurs, des femmes enceintes ou des toxicomanes mais il n’existe pas de salle dédiée permettant un entretien confidentiel et de qualité", indique maître Chaudey. Manque de local médical... mais également sous-dimensionnement des bureaux permettant aux avocats d’effectuer les entretiens avec leurs clients. "Il n’y a qu’un local d’entretien unique avec une petite cloison séparant deux bureaux, détaille Antoine Chaudey. La confidentialité des échanges n’est pas garantie, dès lors que deux entretiens peuvent avoir lieu dans la même pièce en même temps".

Outre des travaux "urgents" de remise en état des cellules "pour garantir la sécurité et la dignité de chacun", le rapport de l’ordre des avocats demande :

  • La réalisation des prestations de ménage quotidiennes et un nettoyage "en profondeur" des cellules et des parties communes
  • La création d’une salle permettant un examen médical confidentiel
  • La création de 4 bureaux pour garantir la confidentialité des entretiens avocat / client

Des recommandations qui n’ont débouché sur aucune observation de la part de l’administration à ce jour. "L’objectif, c’est que ces recommandations soient effectives, conclut Antoine Chaudey. Si elles ne le sont pas, nous saisirons le tribunal administratif pour sommer l’État de réaliser ces travaux".

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