La 24e édition du festival se tiendra du 3 au 12 novembre 2023. Cette année, 115 films seront projetés, dont 75 nouveaux films.
Le rendez-vous annuel du cinéma dans le Nord est de retour. Le Arras Film Festival 2023 se tiendra du 3 au 12 novembre prochains. À quelques jours du coup d’envoi du festival, son délégué général Éric Miot nous présente la programmation de cette 24e édition.
Quels vont être les temps forts de cette édition ?
Éric Miot : Pour la première fois depuis la création du festival, nous allons projeter en ouverture un film historique, un genre très apprécié à Arras. Une affaire d’honneur, réalisé par Vincent Perez, qui se déroule au 19e siècle. Les comédiens Roschdy Zem, qui y incarne un maître d’armes, et Doria Tillier, dans le rôle de Marie-Rose Astié (une militante féministe qui a réellement existé NDLR) seront également présents. Au cours de cette édition, nous avons aussi la chance de recevoir trois invités d’honneur exceptionnels. Dominique Blanc, qui viendra dédicacer son livre, Chantiers, je, et échanger autour de sa carrière lors d’une master class, le 10 novembre. Côté européen, la réalisatrice polonaise Agnieszka Holland viendra présenter son film Green Border, prix spécial du jury de la Mostra de Venise ; et le metteur en scène italien Matteo Garrone son dernier long-métrage Moi, Capitaine, Lion d’argent du meilleur réalisateur 2023.
Quelles thématiques sont abordées par les films sélectionnés ?
C’est une année forte sur le plan européen. Les films d’Agnieszka Holland et Matteo Garrone évoquent tous les deux le racisme. La réalisatrice polonaise nous plonge à la frontière Pologne-Biélorussie en 2021, lorsque l’ancienne république soviétique tente de déstabiliser l’Europe en projetant des migrants vers l’Union européenne. Elle s’intéresse au point de vue des migrants, mais aussi des associations qui tentent de les aider, des gardes-frontières… Dans un tout autre décor, Matteo Garrone relate le parcours de cousins sénégalais vers l’Europe. De manière générale, les longs-métrages sélectionnés abordent des questions d’identité raciale, sexuelle, évoquent la famille, le retour aux racines… La programmation est très diversifiée et reflète tous les genres cinématographiques : la comédie avec Chasse gardée de Frédéric Forestier et Antonin Fourlon, des drames, des films d’auteur plus pointus, de l’animation avec Les Paysans de DK et Hugh Welchman, de la science-fiction… Le festival met aussi à l’honneur sept films tournés dans la région. Pour nous c’est un peu une mission de contribuer à la visibilité de ces films.
L’année dernière, c’est le réalisateur roumain Paul Negoescu qui a remporté l’Atlas d’or pour Men of Deeds. Que peuvent attendre les spectateurs du cru 2023 ?
La sélection pour l’Atlas d’or (la plus haute récompense délivrée par Arras, NDLR) est habituellement très fournie en films d’Europe de l’est. Cette année, c’est un peu différent. Les metteurs en scène sélectionnés sont plus expérimentés, mais parmi il y a aussi deux premier film. Parmi les neuf nominés, quatre réalisatrices sont nommées. Tous ont été choisis parce que leurs films nous interpellent, qu’ils sont très humains. Beaucoup mettent en avant des héroïnes qui se battent. Avec Let the River Flow, Ole Giæver relate l’oppression du peuple Sami par le gouvernement norvégien. Libertate de Tudor Giurgiu nous plonge dans la révolution roumaine de 1989, c’est très prenant.
Depuis sa création, en 2000, le Arras Film Festival s’intéresse tout particulièrement au cinéma européen. Pourquoi ce choix ?
La relation du festival avec l’Europe de l’est est très ancienne. Lorsque nous l’avons lancé, nous voulions diffuser des films européens et nous avons découvert de très belles productions d’Europe de l’est. Les spectateurs ont beaucoup aimé, les salles se sont remplies, nous avons continué dans cette direction. Ces films sont souvent méconnus du public français. Ils peuvent avoir la réputation de films très esthétiques, lents mais ennuyeux. Mais à Arras, c’est tout le contraire ! Les longs-métrages projetés parlent du monde d’aujourd’hui et évoquent des problématiques contemporaines. Le film slovène Wake me, de Marko Santic, raconte l’histoire d’un homme devenu amnésique. Il découvre alors qu’avant de perdre la mémoire, il était extrémiste et va tenter de changer de voie et d’empêcher son frère de prendre le même chemin. Restore Point, de Robert Hloz, est une superproduction tchèque, à l’image d’un Minority Report ou un Blade Runner américains.
Au fil des ans, Arras est devenu un vrai rendez-vous pour les cinéphiles. Comment décrire l'ADN du festival ?
C’est un festival de proximité, qui s’adresse à tous les publics : enfants, familles, adultes. À l’image de notre région, nous voulons être accueillants. Lorsque nous choisissons un film c’est d’abord pour nos spectateurs. Ici vous ne trouverez pas de tapis rouge, ni de barrières. Il y a bien des vedettes, mais nous essayons de créer une complicité entre les talents invités et les festivaliers. Beaucoup de nos films ne sont pas connus, il ne faut pas hésiter à oser. Très souvent, lorsque les personnes viennent pour la première fois, c’est pour une avant-première. Ça leur plaît, ils reviennent pour une autre séance et découvrent d’autres richesses. Certains prennent même des congés en fonction des dates du festival. Dans les salles de cinéma, il se passe quelque chose de l’ordre de l’irrationnel : les gens sont heureux d’être ici. Les films y contribuent, mais pas seulement.