La maire de Tilloy-lez-Marchiennes (Nord), Marie Cau, s'associe aux plaintes de deux associations à l'encontre de la blogueuse Dora Moutot pour injures publiques et incitation à la haine. Lors d'un débat télévisé, cette dernière avait refusé de reconnaître à l'élue son identité de genre, la qualifiant "d'homme transfémin".
"Moi, je ne harcèle pas, je n'agresse pas, je fais appel à mon état de droit en portant plainte. En revanche, je suis visée actuellement par une campagne de haine de la part des partisans de madame Moutot" résume calmement la maire de Tilloy-lez-Marchiennes, Marie Cau.
L'élue, connue pour être la première maire transgenre élue en France et la Marianne de la République 2021, s'est associée à la plainte des associations Mousse et Stop Homophobie, déposées à l'encontre de la militante et blogueuse Dorat Moutot.
Celle-ci se définit comme Terf, une abréviation de la dénomination anglophone Trans Exclusionary Radical Feminist et qui désigne un courant féministe qui refuse d'intégrer les femmes transgenres à leurs combats.
Deux déclarations sont ciblées par ces plaintes pour "injures publiques" à raison de l'identité de genre et "incitation à la haine". La première est datée du 25 août. Dans une publication Instagram depuis supprimée, Dora Moutot s'en prend au journaliste Hanneli Escurier, en écrivant notamment : "ces gens sont des personnes malades, qui utilisent des techniques dignes du pire autoritarisme".
Un débat brûlant au sein des mouvements féministes
La seconde prise de parole est toujours publique, puisqu'elle s'est tenue en octobre 2022 sur le plateau de l'émission Quelle époque, animée par Léa Salamé. La blogueuse, invitée à débattre avec Marie Cau, la qualifie "d'homme transféminin" et déclare également : "on est obligées de se méfier des personnes à pénis en tant que femme".
Cette thèse qui présente les femmes transgenres comme des prédateurs sexuels déguisés est récurrente dans le discours du courant Terf, aussi appelé "femelliste" ou "essentialiste", qui s'attache à la définition de la femme par des attributs exclusivement biologiques. Basée sur quelques fait divers à l'étranger, cette théorie n'est en revanche étayée par aucune étude.
Les militantes de ce courant extrémiste minoritaire au sein du féminisme estiment également que les femmes trans cherchent à s'imposer à l'agenda de la mouvance féministe au détriment des autres femmes. Ces courants sont traditionnellement soutenus par la droite et l'extrême-droite de l'échiquier politique.
A l'opposée de cette mouvance, on trouve les féministes universalistes et intersectionnels qui revendique la défense des droits de toutes les femmes, plus marqué à gauche sur l'échiquier politique. Pas étonnant donc, que les propos de Dora Moutot et les plaintes déposées contre elle cristallisent les tensions.
"Pour moi, l'incitation à la haine, elle est là"
"On tente d'en faire un procès politique, de censure, contre le droit des femmes, mais ce n'est pas de ça qu'il s'agit, estime Marie Cau. Madame Moutot pense ce qu'elle veut sur la définition de la femme, moi ce qui me pose problème, c'est de vouloir faire croire aux gens que nous sommes des hommes travestis dans le but d'agresser des femmes. Alors qu'on parle d'une catégorie de personnes qui, majoritairement, se trouve du côté des agressés. Pour moi, l'incitation à la haine elle est là, pas dans le fait de vouloir définir ce qu'est une femme."
Plusieurs suicides d'adolescents trans ont été recensés par la presse ces dernières années. A Lille, en 2020, une adolescente transgenre de 17 ans s'était suicidée, provoquant une vive émotion dans la région.
La ministre de l'Egalité entre les femmes et les hommes a pris publiquement la parole après la diffusion de l'émission Quelle Epoque, jugeant les propos de Dora Moutot "d'une grande violence. Chaque personne doit être respectée par-delà son identité de genre ou son orientation sexuelle. Ce n'est pas aux autres d'en définir les contours."