C'est une rentrée placée sous le signe de la galère pour les usagers du réseau de transports en commun Ilévia. Entre frustration, fatigue et foule, nous nous sommes rendus à la Gare Lille Flandres, centre névralgique du réseau, pour aller à la rencontre des voyageurs, exaspérés.
Mardi, 8h, c'est l'heure de pointe. "On sort vite de la rame messieurs dames !" À chaque métro qui pointe le bout de son nez sur les quais de la Gare Lille Flandres, c'est la même rengaine. Une dizaine d'agents Ilévia, sont postés devant les portes des rames pour indiquer la marche à suivre aux voyageurs pour embarquer et débarquer en toute sécurité.
S'ils sont invités à vite se dégager du métro, les usagers font ce qu'ils peuvent face aux mouvements de foule. "On verra si on y arrive" répond agacée l'une d'entre eux à l'agent. Depuis cet été, le réseau Ilévia subit de plein fouet des difficultés en cascade qui impactent la qualité du service. Mais qui dit rentrée, dit retour en masse des voyageurs dans les transports. Un flux de voyageurs qu'Ilévia ne semble plus en mesure de contrôler sans sérieusement dégrader son offre.
"On n'a plus qu'à attendre"
Prendre le métro à la Gare Lille Flandres est devenu un parcours du combattant en ce mois de septembre. Si à la surface, sur le parvis de la gare, tout semble normal. Il suffit de s'enfoncer sous terre pour comprendre l'ampleur du problème.
En bas de l'escalator, certains voyageurs découvrent stupéfaits la situation. "Mais wesh ? Qu'est-ce qu'il se passe" s'étonne l'un d'entre eux. Car en effet, pour valider son billet, première difficulté. Tous les portiques ne sont pas utilisables, ce qui réduit drastiquement les voies d'entrée dans la station. Les voyageurs s'entassent donc devant, créant une file d'attente impressionnante.
Si Ilévia justifie cette mesure par soucis de fluidification du trafic de voyageurs dans la station, cela génère un goulot d'étranglement et des dizaines de minutes d'attente pour simplement valider son titre de transport.
Une fois les portiques franchis, une autre épreuve attend les usagers, rejoindre les quais. Là encore, 10 à 15 minutes sont à ajouter au temps de parcours. C'est une marée humaine qui stagne devant les escaliers qui permettent l'accès aux quais. Comme un métro se présente toutes les 2min50 sur la ligne rouge, les quais se remplissent à vitesse grand V.
Pas de chance, une interruption du trafic de près de 15 minutes est venue ponctuer la matinée du 10 septembre. Pour nombre de voyageurs c'en est trop. "Mais c'est quoi leur problème aux transports en ce moment ?" s'agace Juliette, lycéenne qui arrivera de nouveau en retard en cours. "Là, si je prends le tram, ça va me prendre une heure" désespère-t-elle épluchant les autres trajets.
Autour d'elle, certains capitulent, d'autres soupirent. "À ce rythme-là, on se fait virer dans deux semaines" ironisent deux collègues, qui avaient pourtant anticipé les difficultés en se rendant 20 minutes en avance en station. Mais rien n'y fait, ils seront eux aussi en retard. Les plus patients se rendent quant à eux à l'évidence : "on n'a plus qu'à attendre."
D'autant plus que l'atmosphère semble encore moins sympathique sur les quais. Du haut des escaliers on entend les consignes des agents Ilévia qui tentent, tant bien que mal, de gérer le flux de voyageurs. "Laissez sortir les gens" crie l'un d'entre eux, "vous prendrez le prochain métro" rétorque-t-il sèchement à ceux qui forceraient le passage jusqu'au métro. Les esprits s'échauffent et les sourires se crispent. "Allez, pour sortir, c'est par ici" presse enfin un agent, à ceux qui ont réussi à s'extirper des rames.
Déjà la troisième rame que je laisse passer à Port de Lille sans pouvoir monter, sur ces trois rames, seulement 5 personnes ont pu monter c’est inadmissible @ilevia_metro
— Lisa Grard (@grard_lisa) September 10, 2024
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"Depuis qu'ils ont changé les rames, c'est une horreur"
Pour les chanceux qui ont réussi à se frayer un chemin dans le métro. Le calvaire n'est pas fini. Ils doivent composer dans un environnement exigu, où seuls quelques centimètres séparent tous les voyageurs les uns des autres. Bizarrement, c'est un moment aussi pour souffler après le tumulte de la Gare Lille Flandres.
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"Depuis qu'ils ont changé les rames c'est une horreur", raconte une voyageuse, collée au pylône central de la rame. Elle fait référence à l'indisponibilité de nombreuses d'entre elles du fait d'amiante dans deux ateliers d'Ilévia. "Maintenant, on est tout le temps collé. On attend tout le temps trois rames avant de monter, pour aller travailler c'est compliqué".
Quelques stations plus loin, Iliane partage le même constat. "Il y a beaucoup d'attente, parfois 10 à 15 minutes. J'ai acheté une trottinette pour éviter ces retards", confie celui qui relie tous les jours Lille à la station des Prés - Edgar Pisani.
On paie un abonnement pour rien à la fin. C'est dommage.
GuillaumeUsager de la ligne 2
Tous partagent la même ambition, voir Ilévia leur proposer un geste commercial. Car ces difficultés, ils les subissent depuis cet été. "On paie un abonnement pour rien à la fin. C'est dommage. Mais on n'a pas le choix, on est tributaire. On est obligé de subir ce calvaire tous les jours" désespère Guillaume, à bord de la ligne 2.
Du fait des opérations réalisées en vue du doublement des rames de métro sur le réseau lillois, des interruptions sont prévues sur la ligne 1 depuis le 12 août, et ce jusqu'au 16 septembre. Tous les lundis soir, le trafic de la ligne jaune est interrompu à partir de 22h30, les voyageurs sont donc invités à utiliser les bus relais déployés par Ilévia. Mais à cela s'ajoutent des incidents techniques en cascade et une fréquence de circulation réduite du fait de l'amiante, qui commencent à jouer avec la patience des usagers.
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Si une pétition a été lancée pour réclamer ce geste commercial, Keolis Lille Métropole ne semble pas vouloir l'accorder. Dans une interview accordée à France Bleu Nord, son directeur général Franck Garçon a justifié sa position expliquant avoir un choix à faire. Soit Ilévia dédommage, soit des investissements sont faits "pour minimiser les inconvénients (...) On a choisi de mettre notre argent là, il n'y aura donc pas de dédommagement." Le directeur général a assuré par la même occasion que le service reviendrait à la normale d'ici le mois de décembre.