"Si jamais cet accord passe, ça sera la fin de nos exploitations", mobilisation franco-belge importante à la frontière pour défendre les droits des agriculteurs

Hier soir, plusieurs dizaines d'agriculteurs français et belges se sont réunies à la frontière. Ils entendent dénoncer l'accord de libre-échange avec le Mercosur, mais aussi alerter sur leurs conditions pour l'avenir de la profession.

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Pleins phares allumés et pancartes en évidence, ils sont une trentaine d'agriculteurs à braver le froid pour montrer leur colère. Cet accord de libre-échange avec les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay, Bolivie), ils n'en veulent pas. Mais c'est aussi et surtout un changement plus global qu'ils réclament. 

Dans le tumulte des discussions et des voitures qui passent, un homme attire les caméras des journalistes français et belges : Jean-Christophe Rufin. Il a organisé la manifestation : "c’est très symbolique de venir ici pour bien montrer que les accords du Mercosur, c’est l’Europe". Contrairement à la mobilisation générale du début de l'année, aucune voiture n'est arrêtée, "l’idée ici c’est bien de communiquer auprès des citoyens, qu’ils s’intéressent à notre problème" précise l'agriculteur de Mairieux, vice-président de la FDSEA 59. 

Français et Belges main dans la main

Près d'un tracteur, Daniel Depotter échange une poignée de main avec un confrère. Cet agriculteur belge parle sans détours : "si jamais cet accord passe, ça sera la fin de nos exploitations". L'éleveur produisait du lait autrefois, il a finalement abandonné. "On va nous laisser sur le carreau rien que pour faire du commerce ? Aller chercher du lait de Nouvelle-Zélande ? Ramener leur viande hormonée ?" s'insurge-t-il. 

Voulons-nous une agriculture durable ou faire du profit à tout prix ?

Daniel Depotter, agriculteur de Quévy

Jean-Christophe Rufin enchérit : "On refuse en Europe d’utiliser les hormones, les antibiotiques de croissance, et on va les laisser arriver d'Amérique Latine et mettre ça dans l’assiette de nos gamins ? On marche sur la tête !". Derrière les deux hommes, un panneau : "l'UE bafoue ses valeurs pour ses intérêts économiques".  

"Que doit-on dire à nos jeunes, peut-on encore investir ?" 

Au milieu d'un groupe de jeunes hommes, Zoé Castel, 21 ans, longs cheveux bruns et large sourire. Elle le précise immédiatement : "moi, je suis dans une ferme familiale". La belge témoigne : "On a l’impression de ne pas être entendu par le gouvernement, ils font les choses à contresens, on nous dit de défendre l’agriculture locale et de l’autre côté, on nous parle de cet accord".  

On est inquiets pour notre avenir donc on est là pour le défendre.

Zoé Castel, future agricultrice

Cyril Ruykens aussi compte reprendre l'exploitation familiale, mais il a peur : "des fois Papa ne sait pas comment boucler les fins de mois, ça met une boule au ventre". Il évoque "un stress permanent" alors que "c’est une passion, on se sent bien quand on travaille dans l'exploitation". Il se redresse : "on veut juste être rémunéré à la juste valeur, que ce soit équitable pour tous". 

"Qu’est-ce qu’on doit dire à nos jeunes, doit-on encore investir ?" questionne Daniel Depotter. Jean-Christophe Rufin reprend la parole en réclamant pour la France un "vrai choc de simplification" : "on doit revenir sur la charge administrative qui pèse sur le monde agricole, les agriculteurs se sentent harcelés par les contrôles, il faut que ça change."

Français et Belges comptent poursuivre ensemble la mobilisation. La semaine prochaine, une manifestation est prévue à Lille avant d'autres actions sur le long terme : "l’Etat n’est à l’abri de rien, si on n’a pas de réponse, on pourrait repartir sur les routes et les autoroutes, ça peut prendre de l'ampleur" assure Jean-Christophe Rufin. 

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