Coronavirus. « J'ai franchi le Rubicon » : à Tourcoing, un médecin généraliste a décidé de pratiquer lui-même des tests

Et si les médecins généralistes pratiquaient les tests dans leur cabinet ? C'est l'idée du médecin généraliste nordiste. Sera-t-il suivi ?

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Depuis la semaine dernière, le Docteur Bertrand Legrand pratique les tests Covid-19 dans son cabinet du quartier de La Bourgogne à Tourcoing (Nord). C'est le premier médecin libéral de la région Hauts-de-France, si ce n'est du pays, à avoir franchi le pas. Une prise de risque personnelle et professionnelle, mais qu'il justifie ainsi : « Si on veut tester massivement, je ne vois pas d'autre solution que de demander aux généralistes de faire ces tests ».


Pourquoi avoir décidé de pratiquer ces tests dans votre cabinet ?


J'ai observé comment ça se passait dans les centres Covid-19. On ne peut pas dire qu'il y ait foule pour aller se faire dépister ! Ces centres sont pourtant hyper subventionnés et cet argent n'est pas vraiment productif. Tout se termine à l'hôpital. Je pense qu'on doit pouvoir sortir de cette centralisation hospitalière et proposer des solutions de terrain.

Alors de mon côté j'ai appelé un laboratoire qui ne fait pas de tests en « drive » pour lui demander s'il pouvait m'en fournir pour le cabinet. Depuis jeudi dernier, j'en propose systématiquement à mes patients. Ça prend 3 minutes chrono ! J'ai tout le matériel de protection, masques, visière, surblouse. Il ne faut pas minimiser, c'est une prise de risque supplémentaire mais j'assume. Le président du conseil de l'Ordre m'a appelé pour me dire que beaucoup de mes confrères se posaient des questions. Mais rien ne m'interdit de pratiquer ces tests.

 

Avez-vous déjà eu des cas positifs ?


Sur les 17 patients que j'ai testés jusqu'à présent, un seul est positif. Ce patient asymptomatique est retourné s'isoler à domicile. Il aère, il désinfecte, il fait attention aux 3 autres membres de sa famille. Je vais aller les tester dans la journée. Un patient positif sur 17, ça ne veut rien dire en termes statistiques, mais la clé de la situation est là : si on ne teste que les symptomatiques, on va passer à côté de beaucoup de cas. Il faut se poser la question de ce qui est réellement applicable. Pour moi, ce sont les tests en cabinet. Nous avons déjà des écouvillons pour tester les angines, on peut facilement les reconvertir en tests PCR.
 


Que pensez-vous justement de la doctrine du gouvernement sur les tests ?


Pour moi, on fait fausse route en préconisant de tester uniquement les symptomatiques. Il faut savoir que les personnes qui présentent des symptômes ne vont pas forcément consulter tout de suite. Ils attendent parfois 2-3 jours et c'est justement dans ce laps de temps que les contaminations se font. Imaginons ces patients qui se font tester au bout de 2-3 jours, on recevra les résultats 48h plus tard. Ensuite l'Administration va se mettre en marche pour rechercher les cas-contacts. On est au mieux au 5è jour. Puis une fois les cas-contacts déterminés, on va leur demander d'aller se faire tester. On est au 6è jour. Puis il faudra à nouveau attendre les résultats de leurs tests...J'arrête là mais vous voyez bien la problématique à l'échelle de 700 000 tests par semaine ! La politique du gouvernement va aboutir à déconfiner des personnes « faux négatifs » qui vont continuer à répandre du virus.
Pour moi, le confinement que l'on vit aujourd'hui, c'est la conséquence de l'échec de la politique qui a été menée face au virus. Quand j'écoute Edouard Philippe, je me dis qu'on n'a pas encore compris.

 
 

Comment faire pour tester efficacement avant le début du déconfinement ?


Jusqu'à maintenant, seul l'hôpital et les infectiologues décidaient si on faisait des tests ou pas. Si on veut tester massivement, il faut permettre aux cabinets de médecine libérale d'en faire de façon aléatoire en les proposant à tous leurs patients comme je le fais. Notre capacité à tester est très importante, on l'a vu au moment de la grippe H1N1. Ce qui risque d'être problématique, c'est que nous sommes encore très limités en capacité d'analyse de ces tests. Il y a pourtant une méthode qui s'appelle le « pooling »(1), mais la France n'en veut pas. A mon avis il est grand temps de sortir de cette doctrine purement hospitalière dont on ne se donne pas les moyens de vérifier les effets sur le terrain. Pourtant nous sommes lancés dans une course contre la montre.


(*)Le pooling est une méthode de test de plus en plus utilisée en Allemagne notamment.
Elle propose de regrouper les prélèvements réalisés sur plusieurs personnes dans des « pools » et soumettre l'ensemble à un test unique. Si celui-ci est négatif, tant mieux. S'il est positif, chaque échantillon sera testé individuellement pour déterminer la ou les personnes infectées.
Cette méthode a le mérite de n'utiliser qu'un seul test pour écarter la suspicion chez plusieurs personnes, ce qui économise des réactifs et du temps.
En France, l'Institut Pasteur estime que 5,7% de la population sera porteuse du virus autour du 11 mai.
 
 
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