Elle crée une maison d’édition pour commercialiser les jeux vidéo d'indépendants : "leurs créations sont des œuvres à part entière"

Lorsque l’on imagine, conçoit, un jeu vidéo, la création d’une société pour pouvoir le commercialiser est souvent un parcours difficile, surtout quand nous ne sommes pas à l’aise avec les méandres administratifs. Elizabeth Maler a, en 2019, trouvé LA solution : Créer Abiding Bridge, la première maison d’édition française. On vous explique. (Première publication le 12/11/2023)

C’est vrai que les créatifs de jeux vidéo sont des artistes. Artistes au même titre qu’un écrivain, qu’un auteur, qu’un interprète… Pourquoi ne pas les considérer comme tel pour les aider à développer et commercialiser leur jeu ? Il fallait certainement évoluer dans cet univers pour imaginer cette solution. C’est le cas d’Elizabeth Maler. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Elizabeth est une femme qui a un sacré tempérament. Même si la vie ne l’a pas toujours épargnée, Elizabeth n’a jamais lâché ! Elle a aussi, et surtout, gardé ses valeurs. Valeurs que l’on retrouve dans Abiding Bridge, vous le verrez. En attendant, qui est Elizabeth ?

Après avoir fait ses études au CNAM-ENJIM à Angoulême (une des rares écoles publiques de jeux vidéo du territoire national) où elle a, en particulier, étudié l’ergonomie des jeux vidéo, cap sur Montréal pour travailler. En effet, au Canada, l’industrie des jeux vidéo est très dynamique. Retour en France un an plus tard et début d’une nouvelle aventure…

"Ce jeu a permis de générer de l'empathie"

A Normal Lost Phone est un jeu sorti en janvier 2017 (il est dans la liste des TOP 100 au niveau mondial). Elizabeth fait partie de l’équipe qui a conçu ce jeu vidéo. Imaginez : vous trouvez un téléphone perdu dans la rue, pour découvrir ce qui est arrivé à son propriétaire, vous devez "fouiller" le contenu du téléphone. C’est un jeu d’enquête qui aborde des sujets tels que l’adolescence, le passage à l’âge adulte, l’homophobie, la dépression, la quête de soi… Pour y arriver, c’est au joueur de trouver ou de déduire quels sont les mots de passe utilisés pour accéder aux applications du téléphone afin d’en savoir plus sur son propriétaire "Sam". Son originalité, sa mise en scène, ses musiques originales, les thèmes abordés font que ce jeu a rencontré un beau succès et qu’il a eu une suite.

C’est un jeu qui parle des LGBT-phobies, mais pas seulement, avec A Normal Lost Phone, il y a plein de personnes qui ont réussi à faire leur coming out, mais ce jeu a aussi permis de générer de l’empathie.

Elizabeth Maler

2019 : Il suffisait d’y penser, Elizabeth Maler l’a fait

Sur le principe des droits d’auteur pour les écrivains, les auteurs, compositeurs etc..., les créateurs de jeux vidéo sont des artistes auteurs. Abiding Bridge les rémunère sous forme de droits d’auteur. "Leurs créations sont des œuvres à part entière, si nous devions créer une société à chaque fois qu’on écrit un roman, il y en aurait beaucoup moins dans les rayons et les bibliothèques." Mais la petite maison d'édition va encore plus loin, vous allez le voir, et c'est là que l'on retrouve les valeurs d'Elisabeth Maler.

Si nous devions créer une société à chaque fois qu’on écrit un roman, il y en aurait beaucoup moins dans les rayons et les bibliothèques

Elizabeth Maler

"50% des jeux que nous accompagnons sont soit développés par des personnes dites marginalisées, qui souffrent habituellement de discriminations, ou sont des jeux qui ont un impact social, qui font réfléchir sur des sujets de société". Les sujets de société, ceux qui font réfléchir, l’éducation, Elizabeth aimait déjà cela à 10 ans. Enfant, elle jouait sur l’ordinateur de ses parents. "Ce que j’aimais vraiment, c’est cette forme différente de l’apprentissage, où on peut interagir".

Abiding Bridge est donc une maison d’édition de jeux vidéo, pour accompagner des œuvres multimédias. Car c’est bel et bien d’un accompagnement complet qu’il s’agit ! La petite entreprise s’adapte aux souhaits de chacun, ainsi qu'à la spécificité de chaque projet. Autre chose très importante, chaque créateur, garde sa liberté créative.

Que fait Elizabeth avec Abiding Bridge ?

Il convient de préciser qu'Elizabeth n'est pas seule, elle est bien sûr entourée d'une équipe. Alors, que font-ils ? Vous allez le voir, la liste est longue ! Avec l’artiste (ou les artistes) il y a beaucoup d’écoute, d’échanges, afin de définir les besoins, de trouver des partenaires, et puis à moment, créer un jeu vidéo, c'est bien, mais il faut aussi le commercialiser, en parler, le faire connaître… Et la paperasse ? L’accompagnement va de l’aide à prendre le statut officiel d’artiste-créateur, à la réalisation de toutes les démarches administratives. Enfin, puisque développer un jeu vidéo peut coûter très cher, Elizabeth et son équipe aident les artistes dans toutes les différentes démarches possibles (fonds publics, campagne de financement participatif etc...).

Sur le site internet d’Abiding Bridge il y a également des formations en ligne (à prix libre) disponibles grâce au serveur discord de la société, mais aussi une communauté d’entraide, et pour que ce serveur soit toujours dans la bienveillance, une charte a été écrite à quatre mains, avec Sélène une amie d’Elizabeth (qui faisait aussi partie de l’aventure A Normal Lost Phone), vous pouvez la découvrir ici.

Continuer à écrire de belles histoires

L’une d’entre elles a attiré mon attention, celle de Damien, qui habite dans un village à côté d’Orléans. Âgé de 40 ans, il est menuisier de métier. Voilà 20 ans qu’il passe tout son temps libre à se former sur la création d’un jeu vidéo. Complètement autodidacte, il a passé des heures et des heures à lire, chercher sur internet, tous les contenus possibles sur : comment faire un jeu vidéo ?

Damien n’a pas envie de changer de vie, de quitter son métier qu’il aime, alors il a négocié avec son employeur pour réduire son temps de travail. Depuis 4 ans, il travaille donc 4 jours par semaine et passe deux jours sur la conception de son jeu vidéo Station9. Dans ce jeu, vous partez à la sauvegarde de la Terre, grâce à une matière découverte dans une météorite. Abiding Bridge est aujourd’hui à ses côtés et c’est rassurant de voir qu’un passionné peut réussir à réaliser ses rêves grâce à une telle structure.

Pour aller encore plus loin puisque le secteur est très porteur, Abiding Bridge reste toujours en recherche d’investisseurs. L’objectif est de continuer à développer la structure qui existe depuis 5 ans et qui a généré un chiffre d’affaires de plus d’un million. Avis aux amateurs qui partagent les mêmes valeurs et qui pourront les aider à écrire d’autres belles histoires.