L'institut a publié une étude, sur le niveau de ségrégation résidentielle au sein des principales aires urbaines du Nord, à la demande du Département. Celle-ci montre que le pôle de Lille est l'un des moins mixtes de France.
Riches et pauvres vivent-ils à proximité dans les grandes aires urbaines du Nord ? Dans sa dernière étude, publiée jeudi 14 septembre 2023, l'Institut national de la statistique et des études économiques (l'Insee) offre un éclairage sur cette question. Un travail réalisé en partenariat avec le Département, à partir de données de 2019.
"Le but est de poser un diagnostique sur la mixité sociale et la ségrégation des revenus dans le Nord pour la conduite de politiques publiques", explique Thibault Decruyenaere, directeur adjoint de l'Insee Hauts-de-France. Avec un focus sur les six principaux pôles urbains (Lille, Dunkerque ,Valenciennes, Douai, Maubeuge, Cambrai).
À Lille, peu de mixité sociale
Quels enseignements en tirer ? Premier constat, l'aire urbaine de Lille (composée de 37 communes dont Villeneuve d'Ascq, Tourcoing et Roubaix) est l'une des plus ségrégées de France. Autrement dit, dans ce territoire caractérisé par "d’importantes inégalités de revenus", les ménages modestes et ménages aisés côtoient peu les mêmes quartiers.
Illustration en chiffres de cette ségrégation : dans le pôle de Lille, 28 % de la population réside dans des quartiers aisés et 27 % dans des quartiers modestes. Comparé à Cambrai, le bon élève de la zone, où 19% de la population réside dans des quartiers aisés et 16 % dans des quartiers modestes.
Quelle répartition des revenus par ville ?
Sur la carte, il faut regarder vers les communes du Nord de Lille pour observer les plus fortes concentrations de populations aisées, de Lambersart à Mouvaux, "où un habitat bourgeois s’est développé dès le XIXe siècle et où l'habitat social est peu développé."
À l'inverse, sans surprise, les foyers les plus modestes occupent les communes de Roubaix et Tourcoing, "particulièrement affectés par l’effondrement de l’industrie textile". Mais aussi à Lille-Sud et près d'autres zones prioritaires comme Pont-de-Bois et Hôtel de Ville à Villeneuve-d’Ascq ou encore Fort à Mons-en-Barœul.
La population des quartiers mixtes a diminué en 15 ans du fait d’une gentrification de certains territoires ou au contraire d’un appauvrissement pour d’autres.
Thibault Decruyenaere, directeur adjoint de l'Insee Hauts-de-France
Pour trouver les quartiers avec le plus de diversité sociale, il faut se tourner vers le nord de Tourcoing, au sud d’Hellemmes, à Haubourdin, à Faches-Thumesnil, au sud de Wattrelos, à Lomme (entre Bourg et Maison des enfants) ou bien à La Madeleine…
"La population des quartiers mixtes a diminué en 15 ans, de même que leur étendue, du fait d’une gentrification de certains territoires (Noir Bonnet à Wasquehal) ou au contraire d’un appauvrissement pour d’autres (Wattrelos-centre par exemple)", précise l'Insee.
Les autres aires urbaines plus mixtes
Pour ce qui est des autres aires urbaines, l'Institut note davantage de mixité à Dunkerque, Valenciennes et Douai, "où les ménages aux revenus différents cohabitent plus souvent au sein des mêmes quartiers que dans le pôle de Lille et que dans la plupart des grands pôles français". A Maubeuge aussi la mixité existe, pour autant elle dissimule "des difficultés plus importantes que les autres pôles" en termes de pauvreté.
De son côté, Cambrai est l'aire urbaine qui bénéficie de la plus forte diversité sociale alors que "quatre habitants sur dix vivent dans un quartier mixte, deux fois plus qu’en moyenne dans les six pôles du département."
Des facteurs communs de ségrégation
"L’histoire locale, la structure et le coût de l’habitat, l’emploi, l’offre de transports ou le cadre de vie expliquent en partie la ségrégation résidentielle", avance l'Insee. Par exemple, à Dunkerque les plus modestes habitent près du port, lieu des activités industrielles. A Valenciennes, ils résident sur les terres des anciennes usines. Idem à Roubaix où la crise de l'industrie textile reflète l'habitat des plus pauvres.