La communauté de communes du pays bigouden a voté la décision de raser, à Treffiagat, dans le Sud Finistère, sept maisons en bord de mer, menacées par l'érosion de la dune et par le risque de submersion marine. Les propriétaires vont être dédommagés. Cette initiative de déconstruire est inédite en Bretagne.
Inexorablement, la mer s'est rapprochée du petit hameau de Léhan, à Treffiagat, à une trentaine de kilomètres au Sud de Quimper. Les dunes du littoral ont perdu huit mètres de profondeur, à cet endroit. D'années en années, les efforts déployés pour contenir la montée des eaux se sont révélés inefficaces et très coûteux.
Après avoir essayé les enrochements, les endiguements, les pieux, dans la mesure où cela ne fonctionne pas, la seule solution qu'il nous reste, est d'acheter les maisons concernées au premier rang, pour les déconstruire et renaturer l'espace.
Stéphane Le DoaréPrésident de la Communauté de communes du Pays bigouden Sud
En dix ans, la commune a réalisé environ un million d'euros de travaux sur la plage de Léhan. Mais les enrochements n’ont fait qu’accentuer le phénomène d’érosion, l’énergie à la surface de la mer ne parvenant plus à se dissiper. La mer a fini par emporter sable et cailloux. Le phénomène s’est aggravé avec la montée des eaux due au réchauffement climatique.
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Raser : un crève-cœur, "mais c'est pour éviter des morts"
Au terme d'une négociation à l'amiable, sept maisons, certaines étant des résidences principales et d'autres des résidences secondaires, sont en train d'être rachetées, au prix du marché, pour un total de 2,8 millions d'euros. Le prix d'acquisition des demeures s'échelonne de 250 000 € à 700 000 €.
La décision de les raser est "une décision ultime, mais c'est pour éviter des morts", précise le responsable de la Communauté de communes, également maire de Pont-l'Abbé. L'initiative est quasiment inédite en Bretagne, même si une autre maison, dans les Côtes-d'Armor, a, elle aussi, été abandonnée à la mer, en baie de Lancieux.
Pour permettre l'opération, l'État apporte 70% des finances, une partie provenant du fonds Barnier, dédié à l'adaptation face aux catastrophes naturelles, une autre est issue du "Fonds vert", destiné à la transition écologique. Le reste à charge pour la communauté de communes s'élèvera 840 000 euros. "Mais les travaux sur la dune nous coûtaient, chaque année, entre 100 000 et 200 000 euros, pour un effet qui durait à peine cinq mois", rappelle Stéphane Le Doaré. "En moins de dix ans, l'investissement pour les communes sera amorti", calcule l'élu.
D'autres maisons en zone de risques de submersion
Reste que huit autres maisons sont situées dans la zone de risque de submersion marine, en arrière-plan de celles qui vont être déconstruites. Joël a acheté l'une d'elles, il y a deux ans et demi. "J'étais conscient qu'une partie de mon terrain était en zone rouge, inondable, mais pour ma maison, il n'y avait rien de spécifié" assure le riverain. Pour l'instant, il ne s'inquiète pas, soulignant que, "dans l'hiver 2023-2024, on a eu sept tempêtes, et il n'y a pas eu d'eau dans le chemin qui traverse les dunes."
Les onze communes littorales du pays bigouden Sud ont été inscrites, d'après le décret gouvernemental du 31 juillet 2023, sur la liste des communes françaises "dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydro sédimentaires entraînant l’érosion du littoral". La communauté de communes est ainsi en train de cartographier les risques d'érosion marine, sur l'ensemble de son territoire.
Avec Claire Louet et Stéphane Soviller