Les "gilets jaunes" sont encore quelques milliers à se rassembler pour plusieurs manifestations dans le Nord et le Pas-de-Calais. Pour eux, la mobilisation ne faiblit pas et ils ont souhaité interpeller le président après sa déclaration sur le "sens de l'effort".
"Les troubles que notre société traverse sont parfois dus au fait que beaucoup trop de nos concitoyens pensent qu'on peut obtenir" quelque chose "sans que cet effort soit apporté" a estimé Emmanuel Macron, vendredi 11 janvier, lors de la traditionnelle cérémonie de la galette des rois à l'Élysée.C'est la nouvelle phrase polémique du chef de l'Etat qui (sans surprise) n'est pas du goût des "gilets jaunes". À Lille, Le Touquet ou encore Calais, les manifestants ont tenu à réagir aux propos du président.
Ils ont aussi voulu montrer que la mobilisation ne faiblissait pas pour ce neuvième week-end de contestation. On fait le point sur les différentes actions et revendications ville par ville.
Action coup de poing devant la villa Macron
Les "gilets jaunes" étaient environ 200 à converger aux abords de la villa présidentielle, au Touquet, ce samedi matin. Ils sont arrivés de la place du Centenaire et ont fait face à plusieurs cordons de CRS au niveau de l'avenue Saint-Jean, où se situe le lieu de villégiature du président.
"Emmanuel Macron, on vient te chercher chez toi", scandaient les manifestants dans les rues de la ville, banderoles à la main, peut-on entendre sur une vidéo de La Voix du Nord. D'importants moyens de sécurité ont été mobilisés pour l'occasion, assure la préfecture du Pas-de-Calais.
Didier Karbowiak
Villa Macron Les gilets jaunes sont attendus de pied ferme !??
"Les forces de l’ordre seront complètement mobilisées afin d’assurer la sécurité des biens et des personnes sur l’ensemble du département. Elles ont reçu pour instruction d’interpeller tout fauteur de troubles", précise un communiqué.
La manifestation s'est globalement déroulée dans le calme malgré quelques jets de projectiles de la part des manifestants auxquels les forces de l'ordre ont répondu par des tirs de gaz lacrymogènes, a précisé la préfecture. Deux personnes ont été interpellées.
Au moins 3 000 manifestants à Lille
C'est devenu une coutume chaque samedi : les "gilets jaunes" ont défilé dans les rues de la capitale des Flandres. Partis de la place de la République, dans le centre-ville, les manifestants étaient entre 1 500 et 1 800 selon la préfecture, 3 000 voire plus selon les "gilets jaunes".
Ils ont entamé leur parcours en chantant la Marseillaise, avant de scander "Castaner en prison" ou "Macron démission". "Libérez Christophe !", ont-ils également lancé en référence à l'ex-boxeur Christophe Dettinger, placé en détention provisoire dans l'attente de son procès après avoir été filmé en train de frapper deux gendarmes à Paris le weekend dernier.
Plus d'un millier de #giletsjaunes à Lille pour l'#ActeIX. Les syndicats enseignants mobilisés aux côtés des manifestants. Important dispositif policier. pic.twitter.com/rMtgtuyQN8
— Margot Desmas (@margot_desmas) 12 janvier 2019
"On n'appelle pas à la violence mais il y en a tellement de la part de la police", a déploré Franck, Lillois, qui appelle à "mettre Alexandre Benalla en prison" et "enquêter sur les policiers qui usent de la violence gratuite". "Mais en France, on n'a pas de justice", a-t-il affirmé.
Des manifestants, parfois munis de cornes de brume, de sifflets et de drapeaux tricolores, ont aussi tiré des feux d'artifice tout au long du parcours. "On veut vivre, pas survivre", "Dégagez les ripoux du gouvernement", "Professeurs en colère", pouvait-on lire sur des pancartes ou au dos des gilets fluo.
"Jusqu'ici, j'étais sympathisant mais c'est la première fois que je viens manifester", a affirmé Valentin Hote, étudiant de 23 ans, qui réclame "surtout un référendum d'initiative citoyenne (RIC)".
Anne-Sophie, Lilloise de 55 ans, a elle participé à "toutes les manifestations depuis le début". Retraitée de l'Éducation nationale, elle dit vivre avec 1 000 euros par mois. "Notre pouvoir d'achat a baissé de façon phénoménale depuis quelques années et j'estime que nos représentants ne font plus leur boulot", a-t-elle expliqué.
Quelques poubelles ont été brûlées sur le passage des "gilets jaunes". Des affrontements ont brièvement éclaté à la fin de la protestation lorsqu'une partie du cortège a tenté de changer de trajectoire, les forces de l'ordre procédant à des sommations avant de faire usage de gaz lacrymogènes. Vingt personnes ont été interpellées, selon la préfecture du Nord.
Marche pacifique à Calais
Dans le chef-lieu du Pas-de-Calais, quelques centaines de "gilets jaunes" ont défilé pacifiquement. Des familles et des personnes âgées ont manifesté avec un objectif : éviter les débordements pour ne pas être associés aux casseurs.
Et les manifestants ont voulu faire passer un message : ils sont toujours présents, même après l'annonce du grand débat national qui doit commencer dans trois jours. Ils ont également tenu à réagir aux propos polémiques du président.
"Le sens de l'effort ? Je pense qu'on en fait assez d'efforts. Par contre le gouvernement avec ce qu'il consomme et ce qu'il dépense, il n'en fait pas du tout. Je suis très choquée", a dénoncé une manifestante tandis qu'un autre demande à Emmanuel Macron de faire un effort "en démissionnant". "Eux, ils font toujours des promesses mais nous on crève de faim", a-t-il poursuivi.
Et quel que soit le résultat de ce débat censé apaiser leur colère, une nouvelle marche est prévue à Calais dès samedi prochain.
Blocage de "La Voix du Nord" dans le Valenciennois
Des "gilets jaunes" ont bloqué, dans la nuit de vendredi à samedi, un dépôt de La Voix du Nord à Anzin, empêchant la distribution de 20 000 exemplaires du journal dans le Valenciennois.
Malgré l'intervention de la police pour faire évacuer les lieux, les journaux n'ont pas pu être distribués. Le quotidien régional a annoncé sur son site internet qu'une plainte serait déposée.