7 voitures ont été incendiées dans la nuit de dimanche à lundi, à Montigny-en-Gohelle. Pour le Maire de la commune, ces feux pourraient être en lien avec le non-lieu qui a été prononcé la semaine dernière à propos la mort du jeune Lahoucine, en 2013.
"C'est un quartier qui allait de mieux et mieux, et finalement on se rend compte que quoi qu'on fasse, on ne contrôle rien", cède Bruno Yard, maire de Montigny-en-Gohelle (PS), non sans émotion. Dans la nuit de dimanche à lundi, dans le quartier de La Plaine, 7 voitures ont été incendiées. D'après les pompiers, un premier véhicule a pris feu à 4h44, puis un autre à 5h04 et un troisième à 5h20, avant que les flammes ne se propagent.
La nuit est encore noire, mais quelques riverains sont alors réveillés par les flammes. Ou plutôt par le bruit des pneus de voiture qui explosent. Ils filment l'impressionnant incendie. "Faites attention, ça explose", prévient une femme en arrière-plan. "Regarde, ça y est c'est l'effet boule de neige", répond un autre devant les flammes qui prennent alors 3 voitures. Puis les pompiers arrivent et s'efforcent d'éteindre le feu à l'aide d'une lance à eau, ne laissant que les carcasses des voitures, détruites.
Misère contre misère
Contacté par téléphone, Bruno Yard ne peut réprimer sa tristesse. "Le plus malheureux, c'est que ce sont des voitures d'un certain âge, qui appartiennent à des personnes qui s'en servent pour aller travailler et qui n'ont pas forcément les moyens d'en racheter une", dit-il après s'être rendu sur les lieux de l'incendie. Ici, c'est le quartier de la Plaine. Un quartier où résident de nombreuses personnes en difficulté. "On voit des personnes défavorisées s'en prendre à d'autres personnes encore plus défavorisées", explique le Maire.Kévin Dusautoir, le riverain qui a filmé la scène, confirme : "C'est un quartier un peu chaud, il s'y passe toujours quelquechose. Par contre je connais les personnes à qui on a brûlé les voitures, ce sont des personnes tranquilles, qui n'ont pas d'histoires avec les jeunes du quartier. Ce n'est pas un règlement de compte". Lui est persuadé que les incendiaires "profitent" des évènements, comme les manifestations pour Théo, pour accomplir des actes violents.
Les incendies de voiture, c'est visible, impressionnant. Mais dans le quartier résident des traces de détresse sociale moins spectaculaires. A la Maison de quartier, on parle de feux de containers, de poubelles, des plafonds d'escaliers recouverts de tags. Il y a les interphones arrachés et les rassemblements noctunes quotidiens, ajoute-t-on. Des incivilités, des délits, qui provoquent de vives réactions parmi les autres habitants. "Ca me donne la gerbe", commente l'un d'entre eux sur la vidéo de l'incendie. "Honteux", ajoute un autre.
Toutefois, la vie s'était apaisée depuis quelques mois. Thibaut Ottenin, responsable du site pour ICF, confirme : "On a fait plein d'efforts, il ne faut pas que tout soit gâché à cause de l'incendie de ces voitures." Puis il ajoute : "On change toutes les fenêtres, on a planté des fleurs avec les habitants pour embellir le quartier... Ca s'était vraiment calmé."
L'ombre du non-lieu
La Plaine, c'est aussi le quartier où, le 28 mars 2013, le jeune Lahoucine Ait Omghar est tué par la balle d'un policier venu l'arrêter. L'homme de 25 ans était auto-entrepreneur dans la revente de voitures. La police était venue l'arrêter car ils le soupçonnaient d'avoir commis une tentative d'extorsion à Fontaine Notre Dame, près de Cambrai. Il tente de se débattre, une balle l'atteint à l'abdomen.A l'époque, la famille et le quartier sont sous le choc. L'ambiance devient tendue. Deux ans plus tard, lors de la reconstitution du drame, plusieurs associations dénoncent encore une bavure policière. Le 13 mai 2016, le non-lieu est prononcé. Un non-lieu confirmé en appel, la semaine dernière.
Cela a-t-il un lien avec les incendies de la nuit dernière ? "Peut-être, mais on n'est pas sûrs", murmure le Maire. "A mon avis, c'est collatéral de ce qui se passe en région parisienne en ce moment." Comprendre les nombreuses manifestations de soutien à Théo, violemment blessé lors d'un contrôle policier à Aulnay-sous-Bois. En attendant, Bruno Yard insiste : "Ce qu'on doit faire, c'est de la prévention, parce qu'une fois que c'est fait c'est trop tard". Il y a un an, il avait également demandé à l'Etat d'installer des caméras de suveillance dans le quartier, même s'il pense que ce n'est pas la seule solution. Une demande restée sans réponse.