Une équipe de journalistes de L’œil du 20 heures a mené l’enquête dans le Nord sur la sous-location de terres agricoles. Un sujet tabou dans notre région car la pratique est strictement interdite par la loi. Explications.
"Certains agriculteurs n’ont plus besoin de travailler"
Dans ce champ du Nord situé à Saint-Python les arracheuses de pomme de terre viennent de Belgique. Une fois les bennes remplies, les camions prennent la direction de Tournai, à 2h15 du lieu de récolte.
De l’autre côté de la frontière, les patates sont stockées au milieu des pommes de terre belges, dans un hangar. La gérante de la société explique alors au journaliste qu’elle loue 150 hectares de terres à une dizaine d’agriculteurs éparpillés un peu partout dans la région.
1500 euros l’hectare contre 180 euros dans la loi
Or, louer un hectare de parcelle pour un propriétaire d’une terre est strictement encadré par la loi. Cette pratique s’appelle le fermage. Dans notre région, le prix d’un hectare oscille entre 120 et 178 euros annuels.
Prenons donc un exemple : un propriétaire loue un hectare à un agriculteur 150 euros. Celui-ci sous-loue par la suite cet hectare à un agriculteur belge qui paie 1500 euros. L’argent récolté tombe dans la poche de l’agriculteur français, et non du propriétaire. Une pratique dénoncée par Pierre Delannoy, représentant des propriétaires dans le Nord Pas-de-Calais.
La métropole ferme les yeux
Autour de Lille, la MEL (Métropole Européenne de Lille) est le plus gros propriétaire avec 855 hectares de parcelles agricoles, attribuées à 168 agriculteurs. L’œil du 20 heures a donc interrogé Gérard Caudron, vice-président de la MEL et maire de Villeneuve d’Ascq, qui concède avoir ignoré le problème pendant plusieurs années.
"Les élus ne veulent pas d’histoire avec ni les agriculteurs, ni les syndicats agricoles. Face au risque d’avoir des conflits, ils ont préféré fermer les yeux et ne rien faire." Gérard Caudron, vice-président de la MEL
La MEL affirme qu’une hausse des contrôles aura lieu dans les prochains mois, pour vérifier que les agriculteurs locataires de parcelles dans la région sont bel et bien les exploitants de ces terres.