Octuple infanticide : Dominique Cottrez raconte son enfance et son obésité

A l'ouverture de son procès pour octuple infanticide, la plus importante affaire de ce type en France, Dominique Cottrez a évoqué jeudi devant la cour d'assises du Nord son enfance et le complexe précoce de son obésité qui l'aurait incitée à cacher ses grossesses et leur funeste issue.

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Après un début de procès marqué par les pleurs de l'accusée, réconfortée par ses deux filles et son mari, l'après-midi a donné une large place à la parole, tantôt claire et déterminée, tantôt chiche et brouillée par les sanglots, de la mère qui a tué à huit reprises ses bébés à la naissance, de 1989 au début des années 2000. Vie à la ferme à Villers-au-Tertre (Nord), fratrie de cinq enfants chapeautée par une mère sévère, père taiseux occupé aux champs, scolarité d'élève moyenne : "j'ai eu une enfance normale", affirme tout de go Dominique Cottrez, en contraste avec la relation incestueuse qu'elle affirme avoir subie à partir de l'adolescence et jusqu'à la mort de son père en 2007.

A peine est évoqué le spectre de son père défunt : la cour a remis à plus tard l'examen de cet aspect trouble de sa jeunesse. "Elle était prisonnière de cet inceste. Elle était persuadée qu'elle allait enfanter des monstres et que ces monstres n'avaient aucune entité, aucune réalité", a déclaré en marge de l'audience son avocat Frank Berton. "J'étais bien en milieu agricole", a souligné Mme Cottrez, cheveux courts et lunettes vissées sur le nez. Dominique Cottrez a eu une "enfance heureuse, harmonieuse, dans une ambiance de famille nombreuse mais dans laquelle elle n'a pas vécu de carences particulières et de souci au niveau éducatif", a témoigné à la barre un enquêteur de personnalité.

'Chouchou'

Au contraire, Dominique Cottrez se vivait et apparaissait aux yeux de sa famille comme "la chouchou" de sa mère et surtout, de son père. "J'étais souvent avec mon père, comme ma mère avait beaucoup de travail à la maison avec mon frère et mes soeurs", s'est-elle souvenue, debout devant sa chaise placée près de la barre, hors du box vitré des accusés. Très vite a été abordée la question de l'obésité, invoquée par Dominique Cottrez pour justifier sa décision d'éviter les médecins qui auraient pu lui prescrire la pilule.

L'accusée a raconté ce qu'elle présente comme un traumatisme, lorsque la sage-femme lui a adressé des remontrances sur son obésité qui compliquait son premier accouchement. "La façon de le dire était un peu stricte, sévère. J'aurais aimé (qu'elle le dise) plus gentiment", a-t-elle susurré, visiblement mal à l'aise. "Elle m'a dit "si t'as pas maigri, la prochaine fois ça va mal se passer"". L'accusée a pesé jusqu'à 130 kilos lors de ses grossesses et a confié atteindre aujourd'hui 160 kilos, en réponse à une question de la présidente. "A l'école dès mon plus jeune âge j'étais déjà à l'écart, j'avais des remarques sur mon poids, même les instituteurs sur le fait qu'en éducation physique j'avais du mal à courir", a relaté Mme Cottrez, d'une voix fluette.

Tabou de l'obésité

Lors de l'instruction, il est apparu que les grossesses clandestines de Dominique Cottrez avaient pu être menées à l'insu de toute sa famille et du corps médical en raison de sa corpulence. Lassée des moqueries, complexée à l'extrême, Mme Cottrez a plusieurs fois tenté des régimes, et l'un d'entre eux a donné de bons résultats - temporaires. "Quand vous faisiez un effort il y avait un résultat, pourquoi n'avoir jamais demandé à être traitée avec des professionnels?", l'a questionnée la présidente de la Cour, Anne Segond. "Je ne savais pas aborder le sujet". "- Mais vous alliez régulièrement voir des médecins", notamment pour des problèmes d'épilepsie, lui a rétorqué Mme Segond.

 Le 24 juillet 2010, le nouveau propriétaire de la maison d'enfance de Dominique Cottrez à Villers-au-Tertre avait déterré du jardin deux cadavres de nourrissons en état de putréfaction, dans des sacs plastiques. Les six autres cadavres avaient ensuite été trouvés au domicile de la mère de famille.
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