Après plusieurs jours de mobilisation des agriculteurs à travers la France, le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé une série de mesures depuis une exploitation de Haute-Garonne. Réactions depuis le péage de Méru dans l'Oise, occupé par les agriculteurs.
Une cinquantaine d'agriculteurs installés sous un pont de l'autoroute A16, au niveau du péage de Méru, écoutent attentivement le discours du Premier ministre. Un micro a été posé près du téléphone portable qui retransmet l'intervention, pour que tout le monde puisse entendre les annonces tant attendues.
Simplification des normes, suppression de la hausse de la fiscalité du gazole non routier (GNR), accélération des aides d'urgence et des indemnisations, refonte des contrôles de l'Office français de la biodiversité (OFB)... Gabriel Attal égrène ses mesures, dont plusieurs font écho aux revendications entendues depuis quelques jours sur les points de blocages organisés par les agriculteurs.
Une déception générale
Mais pas de quoi faire pousser des cris de joie aux agriculteurs présents à Méru. À la fin du discours, les visages restent moroses. "Il a joué de la flûte", lâche Laurent Collet, céréalier dans le Pays de Bray. Ni les annonces sur le carburant ni celles sur la simplification administrative ne l'ont convaincu. Pas plus que la promesse du Premier ministre de "faire baisser la pression des contrôles" de l'OFB. "Mettez-vous à notre place : on est chefs d'entreprise, on sait raisonner, on a des méthodes de travail. (...) Quand on a des contrôles sur le terrain par l'Office français de la biodiversité qui déboule chez nous, qui disent 'on vous prévient, si vous avez mal fait ci, mal fait ça, vous vous retrouvez devant un tribunal'... Ça ne passe pas."
On a dit depuis le départ que si on n'avait pas ce qu'on voulait, on irait sur Paris. Je pense qu'on va y aller, il n'y a pas d'autres solutions.
François Couvreur, éleveur
Il assure qu'il reste déterminé à poursuivre le mouvement. Même son de cloche pour François Couvreur, éleveur à Rotangy, au nord de l'Oise. Lui a apprécié la déclaration sur les contrôles de l'OFB, mais le reste ne l'a pas convaincu. "C'est pas ça qui va nous arrêter, c'est vraiment trop peu, lance-t-il. C'est un discours long, mais sans très grandes avancées. On a dit depuis le départ que si on n'avait pas ce qu'on voulait, on irait sur Paris. Je pense qu'on va y aller, il n'y a pas d'autres solutions."
Laurent Delétoille, céréalier installé lui aussi dans le nord du département, attendait également beaucoup plus. "Forcément, on est déçus. Même s'il fallait pas s'attendre à un miracle, parce que les décisions européennes n'allaient pas tomber aujourd'hui. Mais toutes les petites mesurettes qu'on attendait, comme sur les épandages de fumier, sur des trucs concrets, on les a pas. Donc on est un peu déçus... Fortement déçus, d'ailleurs", souligne-t-il.
La soirée n'est pas finie pour ces manifestants : ils vont passer la soirée à débattre, ensemble, des mesures et de la poursuite de la mobilisation.
Vers une poursuite du mouvement
Dans le même temps sur le littoral, alors que Gabriel Attal n'avait pas encore débuté son discours, une centaine de tracteurs se sont doucement rassemblés sur la plage du Touquet-Paris-Plage vers 17 heures. Objectif : se mobiliser près de la résidence secondaire d'Emmanuel Macron, pour écouter les annonces de son Premier ministre. Pour l'instant stationnés en rang sur le sable, les agriculteurs ne devraient finalement pas se rendre devant la maison du couple Macron, comme initialement avancé.
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— A la ferme DELAPORTE Marc🇫🇷 (@delaporte62) January 26, 2024
"Il faut encore décortiquer les annonces qui ont été très longues, les creuser plus en détail, mais on sait que ça va rester des mesurettes"
François Jesquy, président des Jeunes agriculteurs de Valenciennes
Dans le Nord les professionnels toujours mobilisés sur le blocage de l'autoroute A2 ce vendredi soir vont quant à eux lever leur barrage. "Non pas pour faire plaisir à Monsieur Attal, mais parce que les collègues sont épuisés et ont besoin de s'occuper du retard pris dans leurs exploitations", nuance François Jesquy, président des Jeunes agriculteurs de Valenciennes, en annonçant tout de même que le Premier ministre "peut quand même s'attendre à revoir les blocages la semaine prochaine".
"Il faut encore décortiquer les annonces qui ont été très longues, les creuser plus en détail, mais on sait que ça va rester des mesurettes", précise-t-il par ailleurs.
Avec Anthony Halpern et Noëlle Hamez / FTV