Un homme était jugé ce vendredi 23 février au tribunal de Beauvais. Il encourait une lourde peine, car des policiers l'accusaient d'avoir été violent lors de son interpellation. Une vidéo est venue remettre en doute leur version.
Il s'en est fallu de peu. Au tribunal correctionnel de Beauvais, vendredi 23 février, monsieur D. encourait jusqu'à 14 ans d'incarcération pour violence sur fonctionnaire de la police nationale suivie d'incapacité supérieure à huit jours en récidive.
Les faits remontent au 14 février dernier. Monsieur D. est bien connu des services de police de Beauvais, son casier judiciaire est loin d'être vierge. D'après son avocat Me Arnaud Ledru, "il est contrôlé régulièrement."
Course-poursuite dans le flou
Vers 17 heures ce jour-là, monsieur D. voit des policiers en train de contrôler son véhicule et leur lance "Pourquoi tu veux me contrôler, chef ?", avant de prendre la fuite en courant. Une course-poursuite s'engage alors.
Au rez-de-chaussée d'un immeuble, dans une zone encerclée de bâtiments, deux policiers arrivent jusqu'à lui. Monsieur D. les contourne et court dans une coursive, les policiers gagnent du terrain, remontent à son niveau, mais il parvient à les éviter de justesse. Il finira par être interpelé le lendemain et placé en garde à vue.
Les bâtiments sont équipés de vidéosurveillance, mais comme le souligne l'avocat du prévenu, "à l'endroit précis où on accuse mon client d'avoir poussé un policier, je n'ai pas d'image, car il y a des fenêtres, donc la zone est floutée."
Pour mieux comprendre les faits, l'avocat demande à son client de retourner sur les lieux afin de conduire une sorte de reconstitution. C'est là que l'affaire bascule.
"Mon client a les cheveux peroxydés, une résidente l'a reconnu, elle est sortie de chez elle et lui a dit 'J'ai tout filmé !' Je suis immédiatement allé transmettre la vidéo au parquet."
Relaxe et soulagement
Vendredi 23 février, Monsieur D. est donc ressorti libre du tribunal. "Soulagé, parce que j'encourais une peine à deux chiffres pour des faits que je n'ai pas commis", souffle-t-il.
Si cette affaire est rendue publique, c'est, pour l'avocat de monsieur D., une façon de dénoncer une pratique problématique : l'établissement de faux procès-verbaux et le soutien mutuel que s'apportent les fonctionnaires de police dans ce mensonge.
Maître Ledru affirme pourtant qu'il "n'aime pas faire de vagues". "Ce n'est pas personnel, mais on ne peut pas accepter cela, ajoute l'avocat. On ne peut pas considérer que lorsque les policiers disent quelque chose, c'est parole d'évangile en raison de leur serment. Ce n'est pas le cas."
"Une procédure judiciaire distincte va être diligentée concernant les faits qui pourraient être imputés aux fonctionnaires de police" indique quant à lui le parquet de Beauvais.
D'après son dernier rapport sorti en septembre 2023, l'IGPN, la "police des polices", a mené 67 enquêtes pour faux et usages de faux en 2021 et 61 en 2022. Dans le cas de monsieur D., c'est donc une voisine qui a tout changé.