Les agriculteurs sont à nouveau autorisés à vendre légumes et lait, mais ne sont pas sortis d'affaire pour autant. Le nuage provoqué par l'incendie de Lubrizol est passé, mais il a laissé une trace tenace dans les esprits. Qui va payer ce préjudice d'image ?
"Il y a trois semaines, ces salades auraient été belles. Et là avec l’humidité et le temps tout est perdu". Pendant plus de vingt jours, les choux, salades et autres légumes de Clotilde Ghesquière n’ont pas été récoltés. Depuis l'arrêté préfectoral interdisant la commercialisation des légumes dans 43 communes de l'Oise après l'incendie de l'usine Lubrisol à Rouen, la production a pourri sur place. "Quand on voit la détérioration, on ne peut rien en faire, se désole la maraîchère. On va le broyer au champ parce que ça fera du compost" .
Une cinquantaine de variétés n'a pas quitté l'exploitation, par principe de précaution. Lundi 21 octobre, la maraîchère a enfin reçu l'autorisation de vendre ses légumes. Mais absente des marchés pendant ces trois semaines d'interdiction, elle estime les premiers dégâts à près de 10 000 euros. Sans compter le chômage technique de ses employés.
Une réputation entachée
L'indemnisation, c'est le dossier qui concentre toutes les attentions à la préfecture. Une commission a réuni les banques et les syndicats agricoles pour négocier les pertes, accentuée par une défiance des consommateurs. "Tous les produits des Hauts-de-France sont blacklistés actuellement, regrette Thierry Bourbier, président de la FDSEA de l'Oise. C’est inadmissible parce que l’ANSES a confirmé qu’il n’y avait aucun résidu nuisible pour la santé. Donc il faut appeler le consommateur à revenir".
Quelles indemnisations ?
De son côté, Louis Le Franc, préfet de l’Oise, a reconnu qu’il était difficile d’indemniser un déficit d’image "car la désaffection de la clientèle dans l’Oise est difficile à quantifier".
Toutefois, le haut fonctionnaire a annoncé deux mesures visant à accompagner les agriculteurs. D’abord, un dispositif d’avance de trésorerie sera mis en place avec les organismes bancaires pour aider les agriculteurs à boucler leur fin de mois.
Seconde mesure : l’Etat va mettre en place un formulaire permettant de quantifier les pertes de chiffre d’affaire. Selon le préfet, ce dispositif d’indemnisation sera mis en œuvre à partir d’un protocole finalisé prochainement. "Il permettra aux agriculteurs d’être indemnisés par Lubrizol selon le principe pollueur/payeur. C’est donc à cette société d’indemniser les agriculteurs victimes de retombées de suie".
Le formulaire d'indemnisation sera disponible dans les prochains jours.