Hervé est aide à domicile dans l’Oise, premier département désigné comme cluster du coronavirus dans le pays. Pénuries de masques, règles sanitaires impossibles à respecter face à un public vulnérable : il témoigne des difficultés auxquelles le milieu paramédical doit faire face.
Dans l'Oise, département particulièrement touché par le coronavirus, certains peinent à continuer leurs activités. À plus de 35 ans, Hervé* travaille comme aide à domicile dans le Vexin depuis 3 ans. Plusieurs fois par jour, il rend visite à des personnes âgées. Il les aide pour leur toilette, leur donne leurs repas, fait leurs tâches ménagères et administratives.
Depuis quelques jours, le soignant doute de sa capacité à préserver la santé de ses patients : "Hier, nos responsables nous ont procuré des petits flacons de gels, des gants (même si nous en utilisons de manière générale) mais pas de masques, car ils n’en trouvent pas pour nous, les pharmacies sont dévalisées."Nous sommes de véritables vecteurs du virus
Et de poursuive : "D'habitude, nous n’en portons pas mais là, étant donné les préconisations du gouvernement, il faut nous en trouver car nous allons de maison en maison, chez des personnes âgées et vulnérables. Nous sommes de véritables vecteurs du virus. Pour moi, si ça me touche, ce ne sera pas une fatalité mais pour les patients les plus fragiles, c’est dangereux."
Ce matin, Hervé a fait sa tournée auprès des personnes âgées, comme chaque jour. Une patiente, étonnée, lui a demandé pourquoi il ne portait pas de masque. "Je lui ai répondu que tout simplement, on n’en avait pas ! Qu’on essayait d’en trouver mais que c’est la pénurie partout, même pour nous."
La patiente est âgée de près de 88 ans. Une infirmière libérale était également à son domicile et s'est confiée à Hervé : "Elle m’a dit que pour l’instant ils avaient des masques mais que si ça continuait comme ça, ils n'en auraient bientôt plus."
Si elles peuvent faire leur toilette seules et se passer de nous, alors on n’y va pas
Une situation qui plus est compliquée dans un moment où les directives tombent au compte-goutte, parfois un peu tard, selon Hervé : "Hier, nos responsables ont pris la décision d’annuler nos tâches ménagères car ce n’est pas la priorité en ce moment, on se concentre sur le soin."
Il explique : "On a demandé aux personnes les plus autonomes si elles pouvaient se passer de nos visites, afin que l'on ne puisse aller que chez les patients les plus vulnérables ou qui sont alités. Si elles peuvent faire leur toilette seules et se passer de nous, alors on n’y va pas, en tout cas on évite."
Et de conclure : "Ce sont des mesures nécessaires, même si je suis surpris qu’on ait du gel et qu’on annule les tâches les moins importantes que depuis hier seulement. Dans l’Oise, on est quand même le département le plus touché et ce, depuis plusieurs semaines."
* Le prénom a été modifié