Les initiatives se multiplient en France pour venir en aide aux soldats et à la population ukrainienne qui se trouvent encore dans leur pays. Iryna, infirmière franco-ukrainienne, installée à Chevrière dans l'Oise, organise une collecte de matériel médical.
Il est 9 heures. Iryna commence sa tournée. Pour sa première halte, elle retrouve Babeth, dans son cabinet d'infirmières libérales. Une dizaine de cartons remplis de pansements et autres désinfectants l'attendent. Des sets de soin d'urgence qu'Iryna a commandés à ses contacts.
Installée en France depuis vingt ans et infirmière, Iryna Falières Zayets était médecin en Ukraine. Elle est membre de l'association Aide médicale caritative France-Ukraine qui vient en aide à l'Ukraine depuis la révolution de Maïdan en 2014 et la guerre dans le Donbass, à l'est du pays.
On a des besoins urgents pour soigner les hémorragies
Iryna, infirmière ukrainienne
Iryna est toujours en contact étroit avec le ministère de la santé ukrainien qui a établit une liste des besoins pour soigner les soldats sur le front et la population assaillie par les bombardements, les tirs d'artillerie, d'obus et de roquettes "Nous aidons les blessés sur place donc les besoins en matériel médical sont multiples surtout pour la gestion de la plaie et des hémorragies. Nous recherchons particulièrement des pansements hydrocellulaires qui permettent d'absorber le sang en grande quantité et qui sont tellement chers qu'il n'y en a pas en Ukraine. C'est très attendu sur le terrain de guerre", explique Iryna.
Un réseau d'infirmières en action
Au premier jour de l'invasion russe en Ukraine, Iryna a activé son réseau de professionnels de santé. Des infirmières et infirmiers, en particulier, qui collectent le matériel dans leur cabinet. "On reçoit beaucoup de dons des laboratoires pharmaceutiques et j'ai aussi fait appel à mes patients qui ont été très généreux. Ensuite, il faut faire le tri. Tout le monde est très mobilisé ici. C'est une cause importante", déclare Babeth Duhamel, infirmière libérale à Chevrières.
Une mobilisation sans précédent
Il est 10 heures. Après avoir déchargé les cartons chez elle, Iryna repart. Chaque jour, elle sillonne les routes de l'Oise pour récupérer les dons de ses partenaires. Et elle doit aussi répondre à des dizaines d'appels téléphoniques quotidiens. Dans la voiture, le téléphone n'arrête pas de sonner. Un laboratoire qui propose du matériel, une infirmière qui ne sait pas où déposer ses dons, une autre qui offre aussi des pansements périmés mais toujours utilisables. "La mobilisation est incroyable. Mais c'est très difficile de répondre à tout le monde", constate Iryna.
Ses parents sont toujours en Ukraine, au Nord-ouest du pays, proches de la frontière biélorusse et d'une base militaire, une zone stratégique pour les russes. "C'est très difficile d'être loin de ma famille. Mais, ici, je mène une bataille. C'est une petite goutte d'eau pour aider nos blessés mais heureusement, je vois beaucoup de solidarité", confie t-elle.
Du matériel pour les blessures de guerre
L'infirmière a rendez-vous avec un prestataire de santé à domicile à Montataire. Le directeur lui a mis de côté une quinzaine de cartons de matériel médical. "Aujourd'hui, nous donnons principalement du matériel de cicatrisation, spécialisé pour les blessures de guerre. Nous avons fait un gros travail sur les réseaux sociaux et avec nos partenaires. De nombreuses structures se sont manifestées. On reçoit les dons au compte-goutte et ça va continuer", affirme Frédéric Cancel, directeur de Studiosanté Suite de Soins.
Une grande quantité ira à l'est de l'Ukraine et à Kiev où les besoins sont les plus importants.
Iryna, infirmière ukrainienne
En quelques heures, l'infirmière a collecté une trentaine de cartons. Le petit local de sa dépendance croule sous les colis. "Ce ne sont pas les dons qui me manque mais la place pour les entreposer. Il me faudrait un local d'au moins 100 mètre carrés".
L'aide de volontaires
Ce matin là, elle doit encore se rendre chez un particulier et des pharmacies dans l'Oise. Un programme très chargé qui devrait s'alléger grâce à l'aide de volontaires qui se proposent, tous les jours, pour récupérer les dons chez des professionnels de l'Oise, de la Somme et même de la région parisienne. Tout ce matériel stocké doit être transporté en Ukraine. "J'attends un camion qui doit venir tout récupérer et partir directement à la frontière polonaise. Ensuite, c'est l'armée ou le ministère de la santé ukrainien qui se charge d'acheminer le stock sur le terrain de guerre. Une grande quantité ira à l'est de l'Ukraine et à Kiev où les besoins sont les plus importants. Je suis en contact avec des militaires sur place et d'après ce qu'ils me disent, il y a beaucoup de blessures par balles et de brûlures. Les besoins sont là et urgents", rapporte l'infirmière.
Le lendemain, un semi-remorque, affrété par l'association Aide médicale caritative France-Ukraine, est parti de Paris avec de nouveaux dons.
Une cagnotte en ligne
La gestion de la collecte est lancée mais les véhicules manquent pour acheminer, chaque semaine, les stocks accumulés. L'association a fait appel à des entreprises pour le prêt de camions ou camionnettes et ce sont des bénévoles de l'association qui se chargent du transport. L'association a également mis en ligne une cagnotte pour aider l'Ukraine dans la prise en charge des blessés de guerre et l'achat d'ambulances, de civières, de garrots tourniquet, d'équipements portatifs...
Sur place, d'après les nouvelles recueillies par Iryna, ce sont les hôpitaux militaires, très répandus dans le pays, qui reçoivent les blessés. D'autres hôpitaux prennent le relai dans certaines régions d'Ukraine où la guerre fait rage. Comme tous les médecins ukrainiens, Iryna est réserviste. Elle continue son combat en France en attendant d'être appelée sur le front, à 2 200 kilomètres de Chevrières.